Plus d'un siècle après, le nouveau maire d'Oran a eu l'idée de barricader avec une barrière en fer forgé les larges et beaux escaliers représentant l'entrée principale (non fonctionnelle) de l'hôtel de ville, imposante structure (fin XIXe siècle) agrémentée des deux célèbres lions coulés dans le bronze vers la même époque et devenus la véritable effigie de l'ancienne cité de Sidi El Houari. Cette initiative a été mal interprétée par les citoyens qui se sont vu éloigner de leur mairie mais surtout de leur symbole. « C'est son côté artiste qui a ressurgi subitement », ironise un fonctionnaire. Les énormes lions représentent les jouets préférés des enfants des quartiers limitrophes de la place du 1er Novembre. Les escaliers débordant de la façade principale de la bâtisse qui donnent directement sur la place sont par contre le rendez-vous de toutes les manifestations, dont celles à caractère politique. Ils représentent une tribune idéale pour les animateurs de tout bord qui ont la possibilité de s'adresser comme sur un piédestal aux foules amassées plus bas sur la place. Pour ne citer que quelques exemples, durant la guerre du Golfe, l'ancien chef du gouvernement, Ali Benflis, a emprunté ces escaliers pour soutenir les manifestants antiguerre d'Oran. Auparavant, les animateurs de la grande marche pour la liberté de la presse, entamée devant le siège de la cour d'Oran, se sont donné rendez-vous sur ces mêmes escaliers pour des discours de protestation. Plus loin encore, lors de la remise en cause des résultats des élections locales de 1997 et qui devaient consacrer la victoire d'un parti autre que celui qui était au pouvoir à l'époque, un maire symbolique a même été désigné sur ces escaliers. Les citoyens d'Oran n'auront-ils plus le droit de s'exprimer du haut de cette tribune ?