Vive contestation, jeudi dernier, devant la tour n°17 du site AADL Les Bananiers (Mohammadia) où plus d'une centaine de familles - des locataires des tours 15, 16 et 17 - ont organisé un sit-in de protestation afin de crier haut et fort leur indignation face à ce qu'elles considèrent comme des « promesses non tenues ». Ces familles, par ce geste, espèrent interpeller les autorités du pays, en premier lieu le ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme, sur l'état « déplorable » dans lequel se trouve leur cité. Les appartements livrés sont dépourvus de toute commodité. Absence d'eau, de gaz et non-installation des ascenseurs malgré les directives du président de la République selon lesquelles aucun appartement ne sera livré tant que tout le site n'est pas achevé avec toutes les conditions et les commodités requises. « Nous avons été induits en erreur par l'AADL. Nous avons cru à cette formule. Malheureusement, ce ne sont pas des appartements qu'on nous a livrés, mais des carcasses », tiennent à affirmer les bénéficiaires tout en attestant que les branchements effectués pour l'électricité constituent un réel danger pour les locataires. « Regardez, des fils électriques sont à même le sol, ce qui constitue un réel danger pour nos enfants », attestent-ils, et d'ajouter : « Est-ce normal de payer des charges, alors que le lieu, sans viabilisation, n'offre aucune commodité vitale ni aucune sécurité ? Où sont les agents de sécurité, alors que ce site est infesté de dealers et de drogués ? » Les contestataires, qui se disent outrés par le silence inquiétant de l'AADL, ne comptent pas « baisser les bras » tant qu'une réponse positive à leurs doléances ne sera pas donnée. Colère et déception Les bénéficiaires des bâtiments 12, 13, 24 et 25 de ce site sont en colère. Ils ne savent plus à quel saint se vouer ni vers quelle direction se diriger. Leurs immeubles, entrant dans le cadre du programme 2001, sont à l'état brut. Les travaux des bâtiments 12 et 13 n'ont pas été entamés jusqu'à présent. Ceux des immeubles 24 et 25 sont au premier niveau. « La décision de geler la réalisation des quatre tours a été prise conjointement avec l'AADL », précisera M. Izri, PDG de Cosider-Construction, qui attestera que cette décision est intervenue suite à la présence de familles résidant à l'intérieur du périmètre du chantier. « Notre entreprise, réalisatrice du projet, ne peut prendre le risque de mettre en danger la vie de ces familles. Il y a risque d'accident, surtout quand nous travaillons avec des grues à tour. Nous ne pouvons assurer leur sécurité en pareilles circonstances. » Un avenant, ajoute notre interlocuteur, a même été signé avec l'AADL, et les travaux de réalisation de ces quatre tours « devront reprendre incessamment ». Quand ? Le PDG répondra que l'entame des travaux sera effective dès la notification par l'AADL de l'ordre de service (ODS). « Notre entreprise, connue à l'échelle nationale et internationale, peut réaliser le gros œuvre dans un délai ne dépassant pas les cinq mois à condition qu'il n'y ait pas de pénurie de matériaux de construction sur le marché. Nous attendons toujours l'ODS », affirme-t-il. A une question sur l'existence de litiges financiers avec le maître de l'ouvrage (non-paiement par l'AADL de plusieurs factures), comme rapporté par des travailleurs sur le site, le PDG dira qu'il n'y a pas de « problèmes majeurs qui nécessitent l'arrêt des travaux ». « Ce sont des problèmes gérables au quotidien, des problèmes qu'on peut régler par le dialogue et la concertation », fait-il remarquer ? Notre interlocuteur donnera l'exemple de la lenteur dans le transfert d'argent du Trésor public à la BEA où est domiciliée Cosider. Quant aux travaux réalisés par les sous-traitants, il dira que ces derniers demandent à être rémunérés tous les dix jours : « Nous n'avons pas de véritables entreprises qualifiées dans la sous-traitance, surtout pour des tours de R+16. Ce sont des artisans qui ont horreur des hauteurs. Les sous-traitants préfèrent les immeubles de 4 et 5 étages. » Le calvaire des souscripteurs « Tout le programme 2001 sera livré avant la fin de l'année », avait déclaré le ministre de l'Habitat et de l'Urbanisme, Mohamed-Nadir Hamimid, lors de son passage au forum de l'ENTV le 3 août 2004. Les souscripteurs qui ont reçu des décisions d'affectation de logements au site Les Bananiers, plus précisément aux tours indiquées plus haut, sont sceptiques. « Cela fait plus de deux ans et demi que les responsables de l'AADL nous répètent la même chanson », se désolent-ils. Pour eux, l'AADL « n'a pas tenu ses promesses ». Dans un courrier dont il a été destinataire à la fin de janvier 2003 par la direction générale de l'AADL, un des souscripteurs au bâtiment 13 a reçu la réponse suivante : « Le bâtiment en question se trouve sur une portion de terrain où une personne étrangère a construit un habitat précaire. Ce problème sera réglé prochainement et il sera procédé à la réalisation dudit bâtiment. » Une année et demie plus tard, point de bâtiment ! Les souscripteurs s'interrogent sur les raisons qui ont poussé l'AADL à retarder le délogement de ces familles et pour quelles raisons le gel des travaux des quatre tours n'a pas été diffusé sur le site internet de l'AADL et aucun des souscripteurs des quatre tours n'a été avisé. Ayant été parmi les premiers à souscrire auprès de l'AADL pour l'obtention de logements, ces bénéficiaires ont effectué le paiement de la première tranche de 10% (140 000 DA) au mois d'octobre 2001. Ils s'interrogent s'il y a discrimination dans le choix de l'immeuble et des étages et si l'ordre de dépôt des dossiers et le versement de la première tranche sont respectés. « De notre part, c'est très clair, il y a anguille sous roche. On m'a même proposé un local commercial reconverti en appartement sans balcon à Bab Ezzouar I, mais j'ai refusé cette proposition. » Nous avons tenté de joindre les responsables de l'AADL pour avoir leur version sur cette question. En vain. Après nous avoir demandé de transmettre les questions par fax, ce qui a été fait dans l'après-midi du 3 août, la direction générale de l'AADL et la chargée de la communication n'ont plus donné signe de vie.