A la représentation diplomatique du Niger en Algérie, on se veut rassurant malgré les propos alarmants sur la situation alimentaire dans ce pays sahélo-saharien provenant notamment de l'ONU. Elhadji Yahia Mahamidou, conseiller auprès de l'ambassadeur, reconnaît la difficulté de la situation et indique que le gouvernement de son pays continue à compter sur ses partenaires internationaux. Quelle est l'étendue de la crise que le Niger vit en ce moment ? Dès novembre 2004, le gouvernement a fait une évaluation de la situation qui allait se poser une année plus tard. Nous avions estimé à trois millions et demi de personnes menacées de crise alimentaire et un déficit de 18 000 t de produits alimentaires. Mais aujourd'hui, nous ne parlons plus de menace, mais effectivement de famine qui touche les tranches faibles de la population : femmes, vieillards et enfants en bas âge. L'aide internationale a été maigre par rapport à vos demandes, notamment par le biais du Programme alimentaire mondial (PAM)... Malgré cela, nous continuons à compter sur nos partenaires bilatéraux et multilatéraux. Mais la communauté internationale prend un long moment pour répondre à ces situations. Actuellement, la situation est difficile, mais on est sur le terrain. Nous faisons face à l'urgence. Les aides arrivent en fonction de ce que nous avons demandé. L'Algérie a contribué avec trois envois, dont le dernier remonte au 10 juillet dernier. Le Niger vit une situation de crise alimentaire de manière endémique... Le pays n'a pas les moyens de développer toutes ses potentialités. Le marché de l'uranium a décliné et nous travaillions avec Sonatrach sur la prospection de nouveaux gisements d'hydrocarbures. Notre seule ressource est l'agriculture et l'élevage. Nous avons un seul cours d'eau qui traverse l'extrême ouest du pays sur 700 km. Il faut aménager des barrages pour permettre des cultures de contre-saison et se libérer ainsi de la dépendance de l'eau de pluie. Mais ce n'est pas possible à cause du manque de moyens. Il existe des nappes souterraines au nord du pays, mais le forage coûte excessivement cher. L'agriculture est très rudimentaire, c'est à peine si nos agriculteurs utilisent la charrue. Il n'y ni tracteurs ni engrais dans la conduite de cultures essentiellement destinées à la subsistance. Le gouvernement nigérien est objet de critiques de la part d'ONG humanitaires activant sur place... Les ONG sont là et agréées. Mais les ONG veulent faire leur publicité et attirer des fonds. On sait que ces ONG nous critiquent pour ne pas faire des distributions gratuites de vivres. Nos partenaires nous font comprendre que si nous le faisons, l'agriculture ne pourra jamais être revalorisée. La vente à prix modéré que préconise le gouvernement permet théoriquement à la population d'accéder à cette nourriture. Il est vrai que parfois le pouvoir d'achat très bas de certaines populations ne leur permet pas d'y accéder. Le gouvernement y remédiera par les moyens qu'il faut, y compris avec des distributions gratuites et limitées de vivres. Il y a souvent des accrochages avec ces organisations, mais on finit toujours par faire la part des choses à l'issue de réunions. Les ONG nous aident à recueillir des vivres, mais le gouvernement leur fait savoir que sur place, les autorités locales savent mieux les problèmes qui se posent.