Le Mercenaire. Normal. Pour le titre d'un premier album, on annonce la couleur, le champ d'agitation... Le tonitruant groupe de rap L'As des As s'en va-t-en guerre contre les abus, la mal vie et la déculturation. Le rêve est permis. Dans Funky rêve, le premier titre, on veut casser le blues du quartier, s'en sortir du cantonnement entre les murs du pâté, d'entre les tables de cigarettes et les fléaux nés du désert culturel. Le rêve, ce n'est pas seulement le souhait d'« une vie meilleure ailleurs », mais « le désir ardent de renaître ici » « Ana mada bya/ Hyati fi B'jaïa/Une vie magnifique/Koulchi fiha ghaya... » Cette rage de vivre déteint sur le style funk de la chanson. Le rythme soutenu impulsé par les percussions - un boom saccadé de la grosse caisse - accompagne le débit de manière acidulée. La variation - chaque refrain ouvre sur une autre mélodie - donne l'impression du bien empli. La deuxième chanson avec la satirique formule Ah ya l'kavi est pour confondre le paraître qu'on farde de modèles importés via le satellite. Et finalité, dans l'esprit de la chanson, on fait étalage maladroitement pour séduire le cœur des petites Bougiotes. « ... E'zine kima e'zine/ Ma telqah ghir fi B'jaïa/L'an 2000 Z'dem bleqoua/ Ghir j'did fel aqlya/ Fi bladi heïdj l'bnat/... Ah ya l'kavi/Sahit aoulid l'blad... », pour dire tout le décalage avec nos repères. La réalité des passe-droits et les distances avec les laissés-pour- compte sont dénoncées dans Andi khouya. « Andi khouya houkouma/Dayer chikour fel houma/Andi khouya zaouali/ El aâm fel hit ikali... » Casser les distances, rétablir les ponts moralisent nos amis rappeurs. En tout, huit titres où la touche black est omniprésente. Koscoul, Docteur Hah et DJ M, les principaux éléments du groupe, ont leur master fin prêt - y compris la photocomposition de la jaquette. Toutefois, l'album n'est pas encore édité car, très exigeants sur la high fidelity, ils cherchent un éditeur à telle mesure pour carte de visite. Bien qu'à peine sortis de l'adolescence, nos « trouvères » ont un palmarès plus que correct. Ils se font connaître au grand public à partir de 2003 où ils multiplient gala sur gala. Ils sont alors invités à trois reprises par Radio Bahdja. En 2004, ils sont les hôtes de la Chaîne II en qualité de représentants des chanteurs rap lors du Festival national de la chanson amazighe. Les projets ? Le groupe du vieux quartier de Bab El Louz à Béjaïa aimerait, dans son prochain album, intégrer des reprises du répertoire du célèbre Sadek Lebjaoui dans un composite R'N'B/haouzi. Formés sur le tas - par l'école de la rue comme ils disent -, Koscoul, Dj M et Dr Hah auraient aimé faire le conservatoire, mais on ne veut pas les inscrire, car ayant dépassé l'âge requis. Pour l'instant, ils continuent à répéter chez leurs parents avec tous les désagréments que cela cause aux voisins. Même la maison de la culture leur est fermée, déclarent-ils. Le responsable d'une salle leur aurait même réclamé leur casier judiciaire.