Selon nos estimations, il y a un peu plus de 200 terroristes qui activent aujourd'hui dans la zone s'étalant de Boumerdès à Béjaïa, en passant par Bouira, alors que Tizi Ouzou se trouve au milieu de ces trois wilayas », nous dit une source sécuritaire en charge de la lutte antiterroriste dans la wilaya de Tizi Ouzou. Ces criminels agissent sous les ordres de « l'émir » de la zone II du GSPC, Saâdaoui Abdelhamid, dit Yahia Abou L'haithem, originaire de Aïn El Hamra dans la région de Bordj Menaiel. Selon notre source, il y a au sud de la wilaya, entre 50 à 60 éléments affiliés à la katibat El Farouk, implantée sur le territoire de la wilaya de Bouira. Presque tous les éléments de cette katiba sont originaires de Bouira. Sa zone d'activité s'étend de Tizi Gheniff à Boghni, en passant par Draâ El Mizan. L'attaque de l'agence CNEP de Boghni, le 25 juillet dernier, serait l'œuvre des éléments de cette katiba. Non loin de là, sur un axe allant de Beni Douala à Aïn El Hammam, une quarantaine d'éléments activent au sein de katibat Ennour, dont le QG est implanté à Sidi Ali Bounab. Cette katiba, avec l'aide d'éléments des autres katibas, a organisé et exécuté l'attaque de la BDL de Aïn El Hammam au mois de mars dernier et les attaques en 2004 ayant ciblé des convois de fonds à Aït Aggouacha, sur la RN 15 reliant Larbaâ Nath Irathen à Aïn El Hammam et sur la route reliant Mekla à Aïn El Hammam. Ces deux katibats agissent souvent ensemble et peuvent se replier aisément au niveau du massif du Djurdjura. L'autre groupe, moins important en terme d'effectif mais très actif, se trouve au nord de la wilaya. Regroupés au sein de katibat El Ansar, ils sont environ une quinzaine de terroristes à activer sur l'axe Mizrana, Tigzirt, Azzefoun. Ils sont basés dans la partie ouest de la forêt de Mizrana, dans les environs de Dellys, dans la wilaya de Boumerdès. Ils sont les auteurs de nombreuses attaques ayant ciblé les services de sécurité, principalement les militaires et les gardes communaux installés dans cette région côtière. Notre source ajoute qu'à l'est de la wilaya, dans la région boisée entre Tizi Ouzou et Béjaïa, principalement la forêt de l'Akfadou, se trouve le quartier général du GSPC. Selon les renseignements dont disposent les différents services de sécurité, cette région abrite environ 80 terroristes, qui avaient fui la région lorsque l'ANP avait réussi à décapiter le GSPC en éliminant Sahraoui et ses lieutenants. Depuis plusieurs mois maintenant, le GSPC a réinvesti les lieux. A la question de savoir ce qui gêne ou empêche les services de sécurité d'anéantir une bonne fois pour toutes ces sanguinaires, notre source cite en premier lieu le relief géographique. Toutes les régions, où activent ces nombreux terroristes, sont des régions fortement boisées, très accidentées et très difficiles d'accès. « En plus du terrain non favorable, très accidenté et fortement boisé, aujourd'hui les terroristes ne se regroupent plus comme avant. Ils sont très mobiles et souvent en petits groupes. Ils s'habillent comme n'importe quel citoyen ordinaire. Tout cela rend leur localisation plus difficile », ajoute notre source, qui estime que la lutte antiterroriste de nos jours ne peut pas se concevoir de la même manière que celle menée durant les années1990. « Il ne suffit pas aujourd'hui de mobiliser de gros moyens pour anéantir ces assassins, mais il faut agir avec intelligence. » Le renseignement manque Dans leur lutte contre ces sanguinaires, les services de sécurité en Kabylie sont privés d'un outil indispensable qu'est le renseignement. Qu'ils soient militaires ou policiers, nos contacts au sein des différents corps de sécurité avouent que depuis quelques années, principalement depuis 2001 avec la crise qu'a connue la région, ils ne disposent plus d'importantes sources de renseignement. Cela s'explique, selon eux, par deux choses. La première étant la stratégie adoptée par le GSPC qui, en ne ciblant que les différents corps des services de sécurité, tente de ne pas s'attirer le courroux des populations et ainsi de pouvoir circuler tranquillement. La seconde est en rapport avec la crise qu'a vécue la région entre 2001 et 2004. Le pouvoir, en jouant sur le pourrissement et les exactions subies par la population durant la période de troubles, a fait naître au sein de la population une très forte méfiance envers les services de sécurité. Durant ces années, le GSPC s'est implanté « en toute tranquillité ». Rétablir ce lien de confiance entre le citoyen et ceux censés veiller sur sa sécurité est primordial. D'autre part, si de nombreux bataillons de l'ANP sont installés en Kabylie, il arrive souvent que les efforts des services de sécurité engagés dans la lutte antiterroriste soient vains, notamment au moment d'intervenir lorsqu'un faux barrage ou une attaque est signalé dans une région isolée. « Il est anormal que dans une région comme la nôtre, qui connaît une forte activité terroriste, il n'y a pas par exemple un hélicoptère disponible sur place pour pouvoir agir rapidement. Le temps qu'un hélicoptère décolle de Boufarik et arrive à Tizi Ouzou, les terroristes sont déjà loin », nous confie notre source, qui précise que 5 terroristes seulement ont été éliminés et un autre capturé depuis janvier 2005 à ce jour. Aujourd'hui, les hommes engagés sur le terrain de la lutte antiterroriste, qu'ils soient militaires, policiers, gendarmes ou gardes communaux ont besoin de moyens, de soutien, d'encouragements et non pas de discours glorifiant l'amnistie.