L'Iran a souligné, hier, sa détermination à poursuivre les activités nucléaires ultrasensibles reprises la veille sans se laisser impressionner par une réunion en urgence de l'agence onusienne de non-prolifération ni un éventuel recours au Conseil de sécurité. « Est-ce que nous devons accepter l'humiliation, accepter les sanctions des autres, voire nous sanctionner nous-mêmes, ou bien résister ? Je crois que nous devons résister », a dit le ministre de la Défense Ali Chamkhani devant la presse, quelques heures avant une session extraordinaire de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). « Nous ne ferons pas marche arrière (...), pas un seul instant », a-t-il insisté. Les 35 membres du Conseil des gouverneurs, l'exécutif de l'AIEA, devaient se réunir à Vienne pour décider des suites à donner au redémarrage de l'usine de conversion d'Ispahan (centre). L'Iran, rendu suspect par 18 années de dissimulations, a bravé la réprobation occidentale en reprenant la conversion, préalable à l'enrichissement d'uranium. Pour un responsable du département d'Etat américain, la réponse « appropriée serait un renvoi » devant le Conseil de sécurité de l'Onu. Les Etats-Unis et l'Europe pressent à présent l'Iran de revenir à une suspension totale de ces activités, qui produisent le combustible pour les centrales civiles, mais peuvent être détournées à des fins militaires. L'AIEA devrait émettre un ultimatum en ce sens plutôt que de décider dès à présent de saisir le Conseil de sécurité. L'Iran a répondu que sa décision était « irréversible » et a invoqué un droit qui lui est reconnu par le Traité de non-prolifération. Il a rejeté comme « inacceptables » des propositions de coopération nucléaire, commerciale et politique que lui a soumises l'UE3 (Allemagne, France, Grande-Bretagne) en contrepartie d'un renoncement à l'enrichissement. Après l'excitation qui a présidé lundi au redémarrage d'Ispahan, les officiels iraniens paraissaient absorbés par les consultations préalables à une session de l'AIEA qui s'annonçait tendue. La remontée en puissance d'Ispahan semblait elle se poursuivre. Ali Chamkhani, qui n'est pas aux avant-postes du nucléaire, était dans la matinée le seul à s'exprimer. Il a jugé « probable » que l'affaire se termine finalement devant le Conseil de sécurité. « Que vont-ils faire » au Conseil de sécurité, « nous imposer des sanctions ? Nous sommes déjà sous le coup de sanctions » a-t-il dit. Il a réaffirmé la nature purement civile du programme nucléaire national. Cependant, a-t-il prévenu, « si, un jour, les installations nucléaires iraniennes sont attaquées, nous mettrons de côté tous nos engagements nucléaires ». Le président américain George W. Bush a refusé d'exclure un recours à la force pour empêcher l'Iran de se doter de l'arme nucléaire. Mais M. Chamkhani a jugé peu probable une telle éventualité. L'AIEA est saisie du dossier iranien depuis 2003. Les Européens s'y sont jusqu'alors opposés aux Américains sur un recours au Conseil de sécurité, préférant la solution négociée. Mais ce sont eux qui ont fait convoquer d'urgence le Conseil des gouverneurs il y a quelques jours à l'annonce de la décision iranienne.