Le couple Jean-Marie Straub et Danièle Huillet, vivant à Rome et filmant partout des films remarquables comme Chronique de Anna Maghdalina Bach (1967), Othon (1969) d'après la pièce de Corneille, ont présenté leurs nouveaux films à Locarno : Une visite au Louvre, œuvre constituée de plans fixes des tableaux célèbres avec des commentaires qu'a laissés Cézanne (qui fut un critique acerbe aussi bien qu'un peintre sans équivalent). Cézanne avait toujours refusé les expositions. Dans Une visite au Louvre, on voit d'abord une sculpture : La victoire de Samothrace, puis des tableaux d'Ingres, Giorgione, Delacroix (Femmes d'Alger dans leur appartement), Tintoret ou encore Courbet. Les tableaux défilent sur l'écran, encadrés dans leur entier, pas de zoom à l'intérieur des peintures. La voix off récite le texte de Cézanne, extrait d'un livre biographique publié en 1926 par un de ses amis poète d'Aix-en-Provence. Cézanne a un langage fleuri quand il parle des œuvres des autres peintres, parfois méchant. Il dit par exemple que Ingres n'a pas de sang, il dessine seulement. Lorsqu'un tableau lui plaît (comme celui de Delacroix), Cézanne exprime une vive joie. Il ajoute même cette phrase : « Qu'on foute le feu au Louvre, si on a peur de ce qui est beau. » Le 57e Festival de Locarno s'achève. Près de 300 films ont été montrés dans de bonnes conditions, sauf les projections en plein air de la Piazza Grande annulées pour cause de violents orages. La rétrospective newsfront comme les films du Mékong ont drainé beaucoup de spectateurs. Les fils du roi Norodom Sihanouk ont passionné beaucoup de monde. Au moins deux de ses films : Ombres et Crépuscule, ont pour thème la situation du Cambodge à la veille du coup d'Etat du général Lou Nol, valet de la CIA.