Le projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale, annoncé officiellement avant-hier par le président Bouteflika, a suscité l'indignation des organisations des familles des disparus. L'association Somoud des familles des victimes enlevées par les groupes armés islamistes, l'Association nationale des familles de disparus (ANFD) et SOS disparus ont été unanimes à dire « non à la proposition présidentielle ». Somoud a qualifié la charte de « pacte de l'impunité voulu par référendum ». Dans un communiqué transmis hier à notre rédaction, cette association a estimé que « les espoirs des familles se sont dissipés après le discours de Bouteflika ». « Nous avons suivi avec attention le discours. Il ne nous a pas donné l'espoir que nous attendions, concernant les droits des victimes enlevées par les groupes armés islamistes. Par contre, il nous a donné le sentiment d'injustice », lit-on dans ce communiqué. Le bureau de l'association Somoud dira qu'il attendait, à travers ce discours, une volonté de l'Etat à tourner le dos à l'impunité et la résolution du problème des disparus par la création d'une commission d'enquête sur la question. Toutefois, l'organisation a indiqué qu'avec cette décision « l'amnistie générale et l'impunité sont imposées aux familles sous le chapeau de la réconciliation nationale et la paix auxquelles aspirent tous les Algériens ». « L'amnistie voulue par le Président touchera également les auteurs d'enlèvements, tortures et assassinats. Les coupables des crimes contre l'humanité ne peuvent être amnistiés que si cela se fait sur le dos des victimes. Nous sommes les oubliés du pacte voulu par référendum », a précisé encore Somoud. De son côté, l'ANFD a considéré que « le projet est le résultat du travail accompli par Farouk Ksentini, président de la CNPPDH ». Contacté hier au téléphone, Mme Ighil, présidente de l'ANFD, a déclaré : « La proposition de Bouteflika est une vente concomitante. » « Le président nous propose de transcender la douleur par l'oubli. C'est inconcevable pour les familles des victimes. On ne peut pas tourner la page avant de l'avoir lue », a lancé l'interlocutrice. Pour elle, « les criminels doivent répondre de leurs crimes devant la justice. Le projet de réconciliation est un précédent grave. Que le président ait le courage de faire la lumière sur le problème », a-t-elle ajouté. Selon elle, « les familles ne peuvent faire de concessions et accepter l'impunité pour les assassins ».