Selon Ali Yahia Abdenour, « le président de la République a fait un virage à 360° ». S'attendant peut-être à quelque chose de particulier, il conteste ce qu'il considère être une « immunité accordée à l'armée » dans le texte portant sur le projet de la charte pour la paix et la réconciliation nationale. « On ne sait pas ce qui a dû se passer au sommet du Pouvoir, pourtant il (le président de la République) s'est toujours défendu d'être un ‘'trois quarts Président'' », a-t-il déclaré hier lors de son passage à Oran où il a animé une conférence de presse. Le président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH) était, avant tout, venu préparer, à l'Ouest, le congrès de cette ONG qui devra se tenir les 22 et 23 septembre dans un hôtel de la ville de Boumerdès. S'étant exprimé ouvertement contre l'impunité, son souhait est que ce congrès puisse permettre aux militants nationaux d'apporter leur contribution pour enrichir la notion universelle des droits de l'homme, sans lesquels, estime-t-il, c'est le chaos qui va s'installer. « Les pays arabes, musulmans et, de manière générale, ceux du Tiers-Monde ont leur vision propre sur le sujet et peuvent enrichir les thèses élaborées, jusque-là, en Occident », a-t-il indiqué en annonçant que des textes portant sur la question de la femme, le pouvoir, l'éducation, l'économie, mais aussi la paix et la réconciliation nationale seront débattus. Concernant ces deux derniers aspects, Ali Yahia Abdenour tient d'abord à les dissocier. « Nous sommes pour la paix mais, est-ce que les initiatives antérieures, du moment qu'elles étaient toutes axées sur ceux qui ont porté les armes, ont réussi ? », s'était-il interrogé en citant la loi portant sur la rahma du temps de Liamine Zeroual (février 1995) et celle portant sur la concorde civile en 1999. Selon lui, depuis la promulgation de cette dernière, entre 780 et 1250 morts sont comptabilisés chaque année. « Sachant que les commissions probatoires étaient présidées par les procureurs généraux, de grands chefs (terroristes) sont revenus (du maquis) mais on ne leur a rien demandé », a-t-il déploré en considérant que la charte proposée au référendum du 29 septembre est, elle aussi, exclusivement sécuritaire. « La paix - qui, par ailleurs, doit précéder l'amnistie - a ses conditions et elles ne sont pas sécuritaires », devait-il ajouter en pensant que, conséquence du 11 septembre 2001, le pouvoir algérien, comme ceux des autres pays arabes, s'est aligné sur la politique de Bush. C'est également par les pressions extérieures, américaines et européennes cette fois (deux entités qui auraient insisté sur le règlement immédiat de la question du Sahara-Occidental), qu'il expliquera la désignation de Larbi Belkheir à la tête de la représentation diplomatique algérienne au Maroc. Revenant sur le sens qu'il donne à la réconciliation nationale, Me Ali Yahia Abdenour considère que celle-ci doit se faire avec les chômeurs, les déracinés (ceux qui ont fuit leur maison à cause du terrorisme), etc., mais aussi avec la levée de l'état d'urgence (décrété en 1992) et la promotion du dialogue politique. « On parle des conséquences, mais pas suffisamment des causes de la crise que traverse le peuple algérien », explique-t-il en estimant que les groupes armés actuels sont des jeunes non connus et c'est pour cela qu'il est impossible de connaître exactement le nombre de ces terroristes en activité. Une manière de dire que la paix est encore loin malgré les textes et même les consultations électorales.