Maître Hocine Zahouane succède à maître Ali Yahia Abdenour à la tête de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (LADDH). Il a été élu, hier, par le bureau exécutif de l'organisation à l'issue de son deuxième congrès tenu, jeudi et vendredi, à Boumerdès. L'accouchement du congrès de la LADDH ne s'est pas fait sans douleur. Un climat tendu a marqué les travaux de l'organisation de défense des droits de l'homme en raison de divergences entre ses membres portant sur la réforme des statuts de la LADDH. Le départ à la retraite du désormais ex-président de la LADDH, Ali Yahia Abdenour, semble être dur pour l'organisation et ses militants. Ce n'est qu'à la fin de la journée d'hier que les membres de l'organisation ont réussi à « dépasser » les divergences et la lutte de leadership qui a gagné le terrain juste après le début des travaux de la rencontre. En effet, la présidence de l'organisation et la révision de ses statuts ont divisé les congressistes. Entre partisans à l'élection de maître Hocine Zahouane et ceux qui préfèrent maître Bouchachi, majoritairement des militants du FFS, le courant n'est pas passé. Deux tendances se sont dégagées dès l'entame des travaux. Le conflit s'est exacerbé dans la matinée d'hier. Alors que le rapporteur de la commission chargée de débattre et d'enrichir le projet de statut s'apprêtait à présenter, pour adoption, son rapport final, les militant du FFS ont quitté la salle. Ils accusent l'autre partie de vouloir imposer le projet initial élaboré par la commission préparatoire sans débat. Selon des informations recueillies auprès des contestataires, tous des militants du FFS, le malentendu a eu lieu à l'amorce des discussions du projet. Il a fallu l'intervention de maître Ali Yahia Abdenour pour ramener les contestataires à la raison. « Il faut accepter de faire des concessions pour arriver à un consensus. Je ne veux pas voir la ligue divisée après mon départ. En tous cas, ce congrès est un congrès de transition, il faut en organiser un autre très prochainement », leur a-t-il déclaré. De leur côté, les militants du FFS lui ont expliqué l'objet de leur contestation. « Nous sommes venus en tant que militants de la ligue et non en tant que ceux du FFS. Nous voulons qu'il y ait un débat contradictoire ». Ces derniers accusent Kamel Daoud, président du congrès, de les avoir empêchés de prendre la parole en plénière. Ali Yahia Abdenour a réussi à les convaincre de rejoindre la salle des travaux. Dans un point de presse animé, en marge des travaux de ce rendez-vous, Hocine Zahouane a expliqué l'objet de cette divergence. Il s'agit, a-t-il précisé, d'un nouveau article introduit dans les statuts de la ligue. Un article portant sur l'incompatibilité des statuts de la LADDH avec les fonctions au sein de l'Etat et au sein des partis politique. « Il n'y a pas de divergences dans les droits de l'homme. Il n'y a aucun enjeu », a-t-il martelé. L'article en question interdit l'accès aux postes de responsabilité au sein de la LADDH à tout ceux qui en assument d'autres au sein des partis ou des institutions étatiques. Cela n'a pas été du goût des militants du FFS. En tous cas, les travaux de ce deuxième congrès ont été achevés par l'adoption du nouveau statut, l'élection du conseil national qui a élu le bureau exécutif qui, à son tour, a élu Hocine Zahouane comme président. Le congrès a adopté également une charte des droits de l'homme. Une proposition et une collaboration de la LADDH, selon maître Zahouane, à la promotion des droits de l'homme dans le monde. N'ayant pas pu se présenter au congrès de la LADDH, faute de visa, la Fédération internationale des ligues des droits de l'homme (FIDH) a transmis un message aux congressistes, dans lequel elle a critiqué la charte pour la paix et la réconciliation nationale, qui sera soumise à référendum le 29 septembre prochain. Cette ONG a demandé, en outre, une enquête « pour faire la lumière sur la situation des disparus et les victimes de la tragédie nationale ». De leur côté, SOS disparu, Somoud et la ANFD ont vivement critiqué ladite charte et réclamé la vérité et la justice. Sur un autre volet, et concernant la charte pour la paix et la réconciliation nationale, Me Ali Yahia Abdenour donnera la lecture suivante : « Il y a toujours un calcul stratégique et politique dans le geste généreux d'un chef d'Etat qui offre la paix et la réconciliation nationale. » Dans un discours prononcé à l'occasion de l'ouverture des travaux du deuxième congrès de la LADDH, Ali Yahia Abdenour n'a pas été tendre avec le régime, à sa tête le Président Bouteflika. « Il faut intégrer ce calcul dans toutes les analyses, le président de la République, qui détient un pouvoir absolu que les rois peuvent lui envier, mise sur les aspirations du peuple à la paix pour obtenir un oui massif au référendum qui lui permettra de renforcer son pouvoir et de modeler à sa guise la charte pour la paix », a-t-il ajouté. Acclamé chaleureusement par l'assistance, l'orateur a réitéré la position de son organisation quant à la revendication de la justice et la vérité sur la question de la violation des droits de l'homme en Algérie. Pour lui, la paix ne peut être réalisée sans le respect des droits de l'homme. « Droits de l'homme et paix sont les deux aspects indissociables de la vie humaine. Toute tentative de sauver l'un aux dépens de l'autre, assurer la paix aux dépens de la justice, conduit à l'échec des deux », a-t-il martelé. Ali Yahia Abdenour a assimilé les pratiques du régime actuel en Algérie à celles pratiquées par le nazisme et les régimes coloniaux du XIXe siècle. Il conditionne toute tentative de réconciliation nationale par la vérité, la justice et le respect des droits de l'homme. « Nous sommes très loin de la réconciliation. Il y a un fleuve du sang qui sépare les algériens », a-t-il lancé. Le conférencier a exhorté, par la suite, les militants de la LADDH à poursuivre la ligne de conduite tracée et de poursuivre la lutte pour la levée de l'état d'urgence, le combat contre la torture. « Si tout le monde se lève contre la torture, nous la démunirons et nous la supprimons. La LADDH est contre la violence d'où qu'elle émane, que ce soit du pouvoir ou des islamistes », a-t-il déclaré.