Avançant à grands pas, la rentrée scolaire mettra, à coup sûr, les ménages à rude épreuve. Cette année encore et comme à l'accoutumée, les familles algéroises, sans faire aucunement « bamboche », ne se priveront pas, le temps de la saison des grosses chaleurs, de faire des entorses à la sacro-sainte règle de la retenue. Elles se permettront, par-ci par-là, des dépenses sans grandes conséquences . D'ailleurs, toutes s'affairent, ces dernières semaines, à ce que leurs bambins soient fin prêts pour la rentrée scolaire fixée, pour les élèves du nord du pays, pour le 10 septembre. Boutiques et étals installés dans les marchés, légaux et informels, de la capitale sont pris d'assaut par des pères, des mères et des enfants. Ces endroits enregistrent, à voir le nombre grandissant au fil de la journée, une affluence record. « Le nombre s'accroîtra à partir de la semaine prochaine pour atteindre un pic juste avant la rentrée du 10 septembre, et même des semaines après », nous renseigne un « connaisseur des lieux », ajoutant que les familles préfèrent commencer par l'achat des effets vestimentaires : chaussures, pull-overs, tabliers, avant de se rabattre, à l'approche du jour J, sur les fournitures scolaires. Véritable thermomètre des produits informels de grande consommation, le marché de la rue Ferhat Boussaâd (ex-Meissonnier) propose pêle-mêle, pull-overs, cahiers et produits de beauté. Abordant la question des fournitures scolaires, un vendeur dira : « Nous cédons le cahier de 96 pages à 15 DA, et celui de 288 pages à 70 DA. Les sacs à dos et les cartables sont proposés à moins de 500 DA. Notre marge bénéficiaire est de 5 DA seulement pour les petits effets. Nos cahiers, contrairement à l'idée reçue, sont de meilleure qualité. Nos achats se font chez les grossistes. » Les ressortissants chinois ont, dans ce domaine-là, la partie belle. Les prix que proposent ces nouveaux commerçants dépassent rarement les trois zéros. Jugez-en. Les pantalons et autres chemisettes sont vendus à, respectivement, 800 et 300 DA. Des mères de famille, pour l'essentiel, visiblement très inspirées, flanquées de leur progéniture, leur servant de « prête-main », écument les différents marchés et coins de la capitale connus des seules ménagères. « Je préfère faire le gros de mes achats dans cet endroit. Les prix sont abordables, mais la qualité est loin de suivre », apostrophe une quadragénaire qui fouinait dans un bac plein à ras bord de claquettes, de chaussures et autres attirails. Les prix affichés pour les fournitures nécessaires pour la rentrée scolaire varient suivant qu'on se trouve dans les magasins boudés par les clients ou dans les différents marchés informels du centre de la capitale. Les cartables et les sacs à dos sont cédés entre 350 et 1600 DA selon l'âge et la qualité du produit. La boutique Le Printemps de la rue Bab Azzoun, où se bousculent les familles des quartiers environnants, propose des fournitures à des prix jugés acceptables par les chalands. Les tabliers sont proposés entre 300 et 460 DA selon la taille et l'âge de l'enfant. Les cartables coûtent entre100 DA pour les plus petits et plus. Les vendeurs de la placette attenante à l'hôpital Mustapha proposent, quant à eux, entre 200 et 300 DA les tabliers pour enfant dont l'âge varie entre 12 et 16 ans, et 300 à 600 DA pour les pantalons. Les pulls et les chemises sont cédés à 450 da l'unité. « Tout notre salaire y passera. Les économies faites pendant la saison estivale ne me seront pas d'un grand secours. Même les 2000 da qui sont consentis par les pouvoirs publics arrivent souvent tardivement et n'allégeront pas le fardeau des familles », atteste un père. Et d'ajouter : « Avec 3 enfants, tous scolarisés dans le palier secondaire à ma charge, et même avec l'apport conséquent de leur mère, enseignante au primaire, nous arrivons avec peine à joindre les deux bouts. Pour les seules fournitures, nos dépenses caracolent au-dessus de 10 000 DA », révélera notre interlocuteur. Les enseignants, autre catégorie souffrant de l'érosion du pouvoir d'achat, jugent, à entendre les dires d'un enseignant du secondaire, le trousseau attribué par les œuvres sociales de l'éducation « insignifiant » en comparaison avec les fournitures exigées par le programme scolaire. Par ailleurs, les Algérois ont découvert, il y a peu de temps, - à l'instar de leurs voisins d'outre-mer - les vertus du « consommer malin ». C'est à croire, en se promenant dans les rues commerçantes d'Alger, que les magasins se sont transformés en immenses solderies. Les Algérois ne boudent pas leurs plaisirs et s'abattent en nombre sur ces échoppes qui ont fait flores, notamment à la rue Hassiba Ben Bouali. Le phénomène, prenant de l'ampleur, n'a pas manqué de susciter des remous parmi les autres propriétaires de boutiques. Pour l'exemple, les concessionnaires des locaux commerciaux situés à Riad El Feth ont fustigé l'OREF, gérant des lieux, suite à l'organisation des « soldes de l'été ». Ils ont, rappelons-le, pendant longtemps capté les besoins basiques des familles. En définitive et comme pour encombrer davantage le vécu des citoyens qui souffrent d'année en année un peu plus, le Ramadhan n'est pas très loin. Il reviendra avec son lot de dépenses.