Fatma-Zohra Flici est présidente de l'Organisation nationale des victimes du terrorisme (ONVT). El Hadi Flici, son époux, a été assassiné à Alger au milieu des années 1990. Après avoir soutenu la concorde civile en 1999, elle explique, dans cet entretien, son appui à la démarche de réconciliation nationale. Vous avez annoncé votre soutien à la charte pour la paix et la réconciliation. Peut-on connaître les raisons d'un tel choix ? Ce n'est pas un choix. Il n'y a aucune autre solution à même de faire sortir notre pays du précipice dans lequel il s'est engouffré. Y a-t-il un consensus au sein de votre organisation ? En ma qualité de présidente de l'organisation, j'ai consulté tous les secrétaires de wilayas à travers le territoire national lorsque le président de la République avait annoncé le projet de charte pour la paix et la réconciliation nationale. Nos différents représentants et la majorité des familles des victimes du terrorisme ont exprimé leur attachement indéfectible à la paix et ont dès lors affiché leur soutien à la charte pour la paix et la réconciliation. Au-delà de toute autre considération, êtes-vous prête à pardonner aux assassins de votre défunt époux, feu docteur Flici ? C'est très difficile de demander aux victimes du terrorisme de pardonner. Notre douleur est grande, mais notre Algérie est beaucoup plus grande. Le fait de mettre les terroristes et les victimes sur un pied d'égalité n'est-il pas en contradiction avec les raisons même de la création de votre organisation ? Nous avons écouté tous les discours du président de la République, et à aucun moment, il n'a parlé d'égalité entre les terroristes et les victimes du terrorisme. Au contraire, il a signifié clairement que tous ceux qui ont été assassinés pour sauvegarder l'Algérie sont des héros et ils le resteront à tout jamais. Selon vous, quel statut pourrait-on attribuer aux victimes et à leurs familles ? Et quel statut devrait-on donner aux terroristes et à leurs enfants ? Nous avons demandé, à maintes reprises, un statut particulier pour les victimes du terrorisme. Nous militons et nous resterons dans la même lancée. Nous poursuivrons notre combat jusqu'à la satisfaction de nos revendications. Concernant les enfants des terroristes, l'Etat décidera de leur prise en charge. Notre organisation s'occupe uniquement des victimes du terrorisme et des orphelins. Elle a été créée dans le but de défendre les droits moraux et matériels des familles victimes du terrorisme. Qu'attendez-vous concrètement de cette charte ? Nous attendons de ce projet le retour de la paix et de la stabilité. Nous attendons également une amélioration de la vie quotidienne de tout le peuple algérien. A votre avis, pourquoi les autres associations des familles de victimes du terrorisme se sont-elles prononcées contre le projet ? Toutes les associations ont déclaré leur soutien à la charte pour la paix et la réconciliation nationale, tout en demandant la prise en charge des familles de victimes du terrorisme. L'association Djazaïrouna, à titre d'exemple, a émis des réserves sur le projet... J'ignore si cette association a changé de position, mais au départ, elle s'est prononcée en faveur de la charte pour la paix et la réconciliation. De toute façon, Djazaïrouna ne couvre que la wilaya de Blida. Au sein de notre organisation, nous avons beaucoup d'adhérents à Blida et à Boufarik. Ces derniers ne demandent que la paix, tout en demandant la prise en charge des victimes du terrorisme.