Le président américain semble décidément comme pris entre deux mâchoires d'un étau avec au bout l'image de l'Amérique incarnée par son administration aussi bien à l'intérieur qu'à l'étranger. Des efforts sont désormais engagés vers l'extérieur, mais l'intérieur est lui aussi d'une extrême importance, puisqu'il aura un impact direct sur l'Administration du président George W. Bush et le parti républicain auquel il appartient et qui doit faire face d'ici la fin de cette année à des échéances. Les cyclones Katrina ou Rita ne seraient toutefois que la goutte de trop, celle qui fait déborder le vase, car la tendance dans les sondages s'est inversée au début de cet été, avec pour la première fois depuis son accession à la magistrature, une majorité d'avis contre la politique du président Bush. Et de nombreux rendez-vous avaient alors été prévus pour cette rentrée. Celle-ci s'ouvre avec les pacifistes américains, lesquels, emmenés par Cindy Sheehan, mère d'un soldat tué en Irak et devenue leur porte-voix, espèrent mobiliser plus de 100 000 manifestants ce week-end à Washington et porter un nouveau coup au président George W. Bush de plus en plus sur la défensive. « Nous allons voir plus de 100 000 personnes » samedi, a lancé, confiante, Cindy Sheehan devant la presse. Elle est devenue le symbole du mouvement antiguerre aux Etats-Unis après avoir campé 25 jours en août devant le ranch de M. Bush à Crawford (Texas,sud), demandant en vain à le rencontrer pour qu'il lui explique pourquoi son fils de 24 ans avait dû payer de sa vie. Si les organisateurs de cette manifestation atteignent leur objectif, ce rassemblement sera d'une aussi grande ampleur que la marche pour la paix organisée à Washington avant l'invasion de l'Irak en 2003. Selon les estimations de la police, plus de 100 000 personnes y avaient participé, faisant de cette manifestation pacifiste la plus importante depuis le conflit du Vietnam au début des années 1970. Par ailleurs, Win Without War (Gagner sans la guerre), une des principales organisations antiguerre américaines, a lancé cette semaine une campagne médiatique télévisuelle et dans les journaux. Le groupe a dépensé un million de dollars pour acheter deux pages dans 14 grands quotidiens où il accuse l'Administration Bush d'avoir sciemment menti pour justifier l'invasion de l'Irak qui a déjà coûté la vie à près de 2 000 jeunes Américains. Le responsable national de Win Without War, Tom Andrews, un ancien élu du Congrès, explique que le mouvement antiguerre vise à faire pression sur le Congrès où, selon lui, de plus en plus de républicains vont prendre leur distance avec le président Bush sur l'Irak à l'approche des législatives de 2006. Pour Michael Dimock, un politologue du Pew Research Center, « les dernières protestations antiguerre et leur écho médiatique reflètent un changement dans le sentiment des Américains sur l'occupation en Irak, pas l'activisme des pacifistes ». Tous les sondages montrent qu'une large majorité du public pense désormais que l'invasion de l'Irak était une erreur, relève cet analyste. Une récente enquête de l'institut Gallup indique que 59% des Américains partageaient cette opinion à la mi-septembre. « Même ceux qui soutiennent encore la présence des troupes en Irak, sont de plus en plus nombreux à être inquiets de la tournure des choses et souhaitent savoir comment et quand les Etats-Unis vont mettre fin à leur occupation », a expliqué Michael Dimock. Les américains partagés Selon Thomas Mann, un expert électoral de la Brookings Institution, plus que Cindy Sheehan devant le ranch de M. Bush en vacances, « les images quotidiennes des carnages et les coûts de la guerre sont surtout responsables du désenchantement des Américains ». Le choc provoqué par l'ampleur des dévastations du cyclone Katrina et « l'impréparation » des autorités fédérales, ont fini d'affaiblir M. Bush et ses alliés républicains déjà sur la défensive, a-t-il ajouté. Il reste que les effets de ce cyclone, même les plus inattendus, sont nombreux, et certains, comme la flambée du prix du carburant était déjà ressentie avant le départ des Américains pour leurs vacances d'été. Habitués à rouler sans restriction, ils en sont eux aussi aux limitations. Même les écologistes trouveront, eux aussi, à dire sur les phénomènes naturels. Comment alors réagira l'Administration américaine ?