Ecrit dans le sillage de la crise du Cachemire qui en toute logique devrait rejoindre la Fédération de l'Inde mais où des mollahs fanatisés sèment la terreur pour le compte du Pakistan, le nouveau roman de Salman Rushdie : Shalimar the clown nous plonge dans le feu et les flammes d'un Etat qui, au fond, ne rêve que d'autonomie et de liberté. Le livre de Rushdie paraîtra en français en octobre prochain. Salman Rushdie a toujours été considéré comme un dissident plutôt cool, vis-à-vis de l'Inde son pays (mais si la loi qui autorise désormais la double nationalité est votée par le Parlement de New Delhi, l'écrivain sera le premier à récupérer son passeport indien). Et vis-à-vis aussi de la Grande-Bretagne qu'il a quittée depuis trois ans pour New York où il préside le Pan Club... américain ! Le récit de Rushdie fourmille de personnages haut en couleur : Shalimar, l'assassin ; Max, l'ambassadeur ; sa fille, India. C'est écrit à la manière d'une fable avec en arrière-fond des tensions politiques qui s'exacerbent. Pourquoi le Cachemire ? Parce que Salman Rushdie qui est né en 1947 à Bombay (l'année de l'indépendance de l'Inde) a un grand-père originaire du Cachemire, et c'est là, que pendant toute sa jeunesse, il a passé le plus clair de ses vacances : « Ce pays, à mes yeux, était comme le paradis perdu. Et la tragédie du Cachemire, c'est l'histoire de ce paradis perdu », affirme l'auteur. Dans son roman pourtant, le romancier semble renvoyer dos à dos les antagonistes. Chaque camp, écrit Rushdie, commet des violences. Et la grande ironie de l'histoire, c'est que sous le déluge de feu et des attentats aveugles, les Cachemiris continuaient à vivre comme si de rien n'était, avec une foi très forte que leur malheur s'arrêtera bien un jour. Salman Rushdie qui était tout récemment invité à lire son roman Shame devant les étudiants de l'université de Toulouse semble avoir totalement oublié la fetwa de Khomeyni qui ordonnait « à tous les musulmans d'exécuter » l'écrivain pour blasphème. c'était en 1989, et l'écrivain a passé dix ans dans la clandestinité totale. A présent, il voyage partout, sauf à Téhéran ! British Airways a levé aussi l'interdiction qui l'empêchait de prendre ses vols. Toute les librairies en Inde vendent les Versets sataniques, mais le livre officiellement y est toujours interdit. Avec son nouveau passeport indien, Salman Rushdie a le projet de replonger dans son pays, à la manière de Naipaul, autour d'ouvrages enflammés, très critiques sur le pays de ses lointains ancêtres. Rushdie a déjà commencé avec Shalimar the clown, roman essentiel, ample saga à la lecture passionnante.