Un récent très beau livre : Grammaire de l'objet chinois nous rappelle que si la planète entière a déjà succombé à la domination de la confection chinoise et de l'industrie du vêtement made in Shanghai, il existe néanmoins un engouement très vif pour le cinéma, la littérature, l'art de la Chine, et en particulier pour la calligraphie qui s'expose aujourd'hui à travers les musées et les galeries. En Chine, la calligraphie fait partie des Beaux-Arts au même titre que la peinture et la musique. L'ouvrage en question indique que pour un calligraphe chinois (des siècles passés), il y a quatre objets sacrés dans l'exercice de son art appelé : les quatre trésors du cabinet du lettré. Ce sont le pinceau, l'encre, l'encrier et le papier. Le pinceau en Chine porte différents noms selon sa fonction dans la peinture ou la calligraphie. On trouve l'orchidée-bambou, le grand nuage blanc et la nervure de feuille. Pour fabriquer un pinceau en Chine, on utilise des plumes d'oie, de canard ou de paon. Mais aussi quelquefois des poils de chèvre et de chat sauvage. L'encre de Chine à l'origine était faite en mélangeant du vernis (la sève de l'arbre à laque) et du sulfure de fer afin d'obtenir la couleur noire. Les procédés de fabrication évoluent constamment au cours des siècles. Les anciens calligraphes chinois étaient extrêmement attentifs à la qualité de l'encre. Pour les encre de couleur, nous dit l'auteur de cette Grammaire de l'objet chinois, on abandonna les anciennes adjonctions de poudre de perle, de jade et de corne de rhinocéros pour les remplacer par des pigments naturels, tels que l'indigo pour le bleu, le plomb pour le blanc, le cinabre (sulfure de mercure) pour le rouge et le vermillon et le malachite (carbonate de cuivre) pour le vert. L'encrier, ou boîte à encre, est fabriqué en Chine dans divers produits et sous toutes les formes. En terre cuite, verre, porcelaine, laiton, fer, bois... Jadis, on utilisait surtout les « pierres à encre » sur lesquelles le calligraphe frottait son bâton d'encre. Ces objets peuvent être très précieux : un calligraphe riche aura un encrier ou une pierre à encre taillée dans le jade. Lorsque ces (riches) artistes partaient pour méditer dans la montagne, il y avait toujours avec eux un serviteur chargé de préparer le thé et de s'occuper de l'encrier... Le papier, dernier trésor du cabinet du lettré, doit être pur, blanc, résistant. Aujourd'hui, le papier est fabriqué partout à l'échelle industrielle. Du temps de « l'empire du milieu », les Chinois le faisaient à partir du bambou, du chanvre, de l'écorce du mûrier ou du bois de santal ou de la paille de riz. Au XIXe siècle, la Chine fabriquait 50 types de papier. Celui qu'utilisent les calligraphes, pour sa résistance, était fait à partir de coton. Mis à part ces quatre trésors du cabinet du lettré, sur la table des artistes chinois, il y avait accessoirement ce qu'on appelait : les quatre trésors du délassement élégant, à savoir le luth, les rouleaux de peinture et de calligraphie enrubannés, les livres et l'échiquier (ou damier). Au cours de leurs retraites studieuses et de leurs méditations solitaires, les artistes chinois ne pouvaient se séparer de leurs emblèmes favoris. Source : Grammaire de l'objet chinois, 272 pages, édition L'amateur (Paris)