Cette zone est une terre semi-désertique sans eau, nourriture ou abri. Les variations thermiques auxquelles sont exposés les immigrants sont extrêmes, de -6ºC en hiver à 43ºC en été. De plus, cette zone frontalière se caractérise par le trafic de personnes et de marchandises, ainsi que par la présence de bandes criminelles marocaines, algériennes et nigériennes, qui n'hésitent pas à agresser les immigrants d'origine subsaharienne en situation irrégulière (ISS) pour les dépouiller des quelques biens qu'ils ont pu conserver après leur détention. D'après certains témoignages, maladies et lésions graves dont souffrent certains aggravent encore cette situation. Témoignage : Oujda, 15 janvier 2005. F. T. M. est une jeune Nigériane qui, après avoir accouché dans un bois, va demander l'aide de l'équipe médicale de MSF. Son enfant nouveau-né souffre d'une infection du cordon ombilical. Après avoir été envoyée au service de maternité de l'hôpital, F. T. M. et son enfant sont transférés dans l'unité pénitentiaire de celui-ci où ils resteront cinq jours, pour être ensuite reconduits et abandonnés à la frontière algéro-marocaine. Témoignage : Ern, 29 ans, Camerounais, célibataire et père d'un enfant de quatre ans, quitte son pays en mai 2002 pour tenter de rejoindre son frère en France. Les conditions du voyage et son statut immunologique (Ern est porteur du VIH/sida) font qu'en 2003, durant l'hiver, il contracte une tuberculose pulmonaire. Après avoir commencé le traitement pour les deux maladies, et malgré les difficultés liées à sa clandestinité, Ern constate une nette amélioration. Le 20 avril 2004, Ern est arrêté par les forces de sécurité marocaines au cours d'une rafle à Bel Younech, conduit au commissariat de Tétouan et détenu pendant 24 heures sans boire ni manger. Malgré les efforts de l'équipe de MSF pour garantir la prise de ses traitements, Ern est reconduit à la frontière algéro-marocaine où il est abandonné dans un état grave : il tente de revenir à Oujda, où il est retrouvé par les équipes de MSF, après avoir été attaqué par des bandits. Il est évacué par MSF vers le service des maladies infectieuses de l'hôpital Ibn Rochd de Casablanca. Neuf mois plus tard (17 janvier 2005), Ern est à nouveau détenu, alors qu'il tentait de retourner à Tétouan. En dépit de nombreuses démarches effectuées par l'équipe de MSF, le résultat reste identique : Ern est transféré de l'hôpital Ben Harrich de Tétouan à la frontière algéro-marocaine, où il est abandonné en plein hiver. A l'heure où ce rapport est élaboré, Ern est toujours à Maghnia (Algérie). (Extraits du rapport « Violence et immigration, rapport sur l'immigration d'origine subsaharienne en situation irrégulière au Maroc », enquête réalisée par la section espagnole de Médecins sans frontières, rendue publique le 29 septembre 2005. Document en provenance du site Internet de Médecins sans frontières http://www.msf.fr/.)