Mme Khalida Toumi, ministre de la Culture, a exprimé jeudi dernier son étonnement face à l'inscription du projet du village Numide du Khroub sans la consultation préalable et l'aval de la direction centrale du patrimoine. Bien plus, l'attitude de Mme Toumi s'est révélée une véritable remise en question du projet de réhabilitation du mausolée de Massinissa et la réalisation d'un site à vocation touristique et culturelle défini vaguement sous l'intitulé village numide. La décision prise de l'arrêt des travaux intervient ainsi au moment où le projet souffre du cafouillage entre les intervenants, de nombreuses zones d'ombre qui l'entourent et de la polémique sur sa conception. Mme la ministre venue pour la première fois en visite officielle à Constantine, quatre années après son installation, a saisi cette occasion pour inspecter certains chantiers qui traînent en longueur et fouetter un secteur qui tombe dans la somnolence faute d'un encadrement remuant. L'hôte de la ville du Rocher avait inauguré la veille le festival de Aïssaoua et annoncé à l'occasion son institutionnalisation. Pour le reste de la visite, elle a effectué une tournée à pied dans les ruelles de la vieille ville accompagnée de son staff et demandé à ce que les travaux d'urgence soient entamés juste après le Ramadhan avant de passer à la réhabilitation complète selon les recommandations du Master Plan qui sera exposé incessamment par les Italiens de l'université Roma III. Ensuite, la délégation a fait une halte au palais du bey dont les travaux de réhabilitation ont 23 ans d'âge. Ce gouffre financier, qui a résisté tant bien que mal aux scandales, n'est pas tout à fait loin aujourd'hui de la zone du gâchis alors que les travaux de consolidation, encadrés désormais par un spécialiste de la restauration, ont atteint un taux d'avancement de 80%. Pour les travaux de restauration proprement dits, Mme la ministre a décidé, avec l'accord de tous, de recourir aux compétences étrangères afin de redonner son vrai visage à ce bijou de l'architecture ottomane. Cette décision, qui intervient un peu en retard, ne peut être que bénéfique à ce palais qui en avait besoin pour avoir une prise en charge à la hauteur de son histoire et de sa beauté d'autant plus qu'il se situe en plein cœur d'une ville qui aspire à construire un avenir économique basé sur le tourisme culturel. Par ailleurs, l'idée de création d'un office de protection et de sauvegarde du patrimoine à Constantine s'est cristallisée lors de cette visite pour devenir presque une réalité. En fin de course, la délégation a visité le chantier de construction de l'Ecole régionale des beaux-arts qui a redémarré après un abandon de deux années et la réduction du projet à sa moitié pour manque d'argent. Mme Toumi a promis d'apporter une aide financière pour compléter les blocs manquants avant d'annoncer sur place la réouverture de la cinémathèque An Nasr avant l'Aïd et sa dotation de l'appareil de projection qui manquait à la salle pour s'ouvrir aux cinéphiles après avoir été rénovée il y a deux années. Par manque de temps, la délégation a annulé les visites prévues au Palais de la culture, victime d'un incendie ravageur l'été dernier, et au centre culturel El Khalifa complètement dévasté. Toutefois, il faut reconnaître que cette visite a apporté de bonnes nouvelles et débloqué certains projets perdus dans les arcanes de l'administration locale. Pour ce qui est du plus important, c'est-à-dire l'acte culturel en lui-même, les Constantinois devront se débrouiller et trouver des solutions, car ni l'argent du pétrole ni l'intelligence du ministère ne peuvent assister une cité qui n'a pas le sens créatif.