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Managers et management dans les entreprises publiques et économiques (2e partie et fin)
Publié dans El Watan le 17 - 10 - 2005

La question se pose, au regard de la situation très fortement délabrée du secteur public économique, de délimiter la part de responsabilité à affecter aux gestionnaires des EPE et celle qui doit être attribuée à un environnement foncièrement hostile à toute démarche rationnelle en matière de management et de développement des entreprises publiques ou privées (rappelons que l'environnement politique, économique et juridique est tout aussi défavorable aux entreprises privées, même si ces dernières ont une plus grande marge de manœuvre et plus de souplesse en matière de gestion). Par la même occasion, il y a lieu de répondre à la question inverse, peut-on attribuer à ces mêmes managers l'état de santé excellente des quelques EPE qui se portent bien. En un mot, s'il est normal de critiquer les mauvais gestionnaires, a-t-on le droit de ne pas encourager les bons, ceux qui font la preuve tous les jours que les entreprises publiques peuvent être viables, créer des richesses et participer à la croissance et au développement économique du pays ?
La situation dégradée de la majorité écrasante des EPE
L'image globale qu'offre de lui le secteur public économique est celui d'un secteur sinistré et en ruines : à de notables exceptions près, les EPE sont, dans leur immense majorité, financièrement déstructurées et juridiquement inexistantes. Les statistiques font état d'un nombre considérable d'EPE ayant un actif net très franchement négatif. Ce qui fait que ces entreprises sont en situation de non existence juridique. Seule une recapitalisation, que les pouvoirs publics semblent pour le moment éliminer, pourra changer la donne et redonner vie à ces EPE. Mais la recapitalisation n'est qu'une solution juridique ; économiquement, c'est un pis-aller semblable aux assainissements antérieurs, qui ont ruiné le Trésor public sans pour autant empêcher les EPE de retomber dans une situation de faillite.
Le niveau académique et professionnel des managers
Qui est responsable de cette situation ? La première idée qui vient à l'esprit est de répondre : les gestionnaires de ces entreprises. Est-ce à dire que l'écrasante majorité de ces managers est inapte à la gestion d'entreprises publiques autonomes ? Les quelques statistiques disponibles montrent au moins une chose : la cause des dysfonctionnements du système ne résident pas dans l'absence de formation académique et professionnelle des gestionnaires : le niveau de la quasi totalité des managers des entreprises publiques importantes est élevé (il est du niveau universitaire et parfois post-universitaire). Par ailleurs, la majeure partie de ces managers a suivi des formations spécifiques en gestion, soit par l'intermédiaire de formations post-universitaires diplômantes, à l'image de celles dispensées par l'Inped ou l'ISGP, soit par l'intermédiaire de séminaires ou stages dans des institutions spécialisées, et parfois même à l'étranger. Ce n'est donc pas à ce niveau que le bât blesse.
Un système totalement anachronique
L'insuffisance des managers est à chercher ailleurs, au niveau du système mis en place par les autorités : dans ce système tout a été coulé dans un même moule, où tout ce qui dépasse ou dépareille est combattu sans pitié. Une entreprise doit être organisée et gérée à l'image de toutes les autres ; elle doit répondre aux mêmes sollicitations de sa hiérarchie ; elle doit rester aux ordres dans n'importe quelle situation et à n'importe quel prix. Le système a horreur de ce qui est spécifique, de ce qui ne répond pas aux normes. En fait, pour le système, la finalité d'une entreprise publique économique n'est pas d'être rentable et de dégager des bénéfices afin d'assurer sa pérennité et son développement ; elle n'est là que pour servir les besoins exprimés par sa tutelle directe ou indirecte. Le PDG, qui a la volonté de sortir de cette logique, doit s'attendre à des représailles plus ou moins graves selon que la « faute » commise dérange gravement, ou non, le ronronnement de la machine. Résultat, le manager vit dans un état de paranoïa permanent et de délire de la persécution qui ont fait de lui un champion toutes catégories du maniement du parapluie : tout ce qu'il fait tient compte des possibles réactions de ses tutelles. La confiance du manager dans le système est très limitée : il sait qu'au moindre problème, la loi dans toute sa rigueur lui sera appliquée. Il n'a retenu des réformes que la notion de responsabilité pénale du gestionnaire : d'ailleurs la notion de mauvaise gestion est toujours présente dans le code pénal algérien. La peur et l'absence de confiance ont fini par fabriquer un manager au comportement totalement paranoïaque. Le management de son entreprise, pris dans son sens universellement admis, est devenu accessoire pour lui ; la situation de l'entreprise, les résultats comptables, les bénéfices, ou à contrario les déficits, tout cela n'est pris en compte que marginalement. Pour les managers, le choix est vite fait entre deux possibilités contradictoires et incompatibles : d'une part, faire leur travail de manager avec tout ce que cela suppose de compétence, de courage et de persévérance ; et dans ce cas, courir le risque de s'opposer de front à l'une de ses nombreuses tutelles, avec les conséquences fâcheuses que cela peut entraîner pour eux. Et d'autre part, faire le dos rond, et si nécessaire, plier l'échine et appliquer les ordres des tutelles, même s'ils sont iniques et antiéconomiques. Il n' y a pas photo. Il choisira la solution qui présente le moins de risques pour éviter les ennuis et assurer sa pérennité au poste. Cela explique en grande partie, pourquoi la majorité écrasante des managers du secteur public économique est viscéralement attachée au maintien des commissions paritaires au sein de leurs entreprises, telles qu'elles avaient été instaurées par le système de la GSE, mêmes si les appellations sont différentes. Il n'y a bien sûr plus de CPAPF ni de CPES, mais des commissions, le plus souvent ad hoc, créées pour couvrir un acte de gestion qui relève normalement de la seule compétence du manager. Il s'agit d'impliquer dans la prise de décision le plus grand nombre possible de personnes, dont bien sûr des représentants de travailleurs. L'objectif étant de diluer au maximum la responsabilité, donc les risques inhérents à l'acte de gérer.
Le mode de désignation des managers
Un autre facteur important contribue à ce type de comportement des managers : c'est leur mode de désignation par la tutelle. Tous les PDG d'EPE sont cooptés. La cooptation se base très rarement sur des critères de compétence et d'expérience antérieures de gestion réussies. Ils ne sont pas non plus choisis sur la base d'objectifs économiques et d'un programme de travail prédéterminé. Les critères d'appréciation sont le plus souvent des critères extraprofessionnels : le décideur cherche un gestionnaire en qui il aura confiance et qui appliquera ses directives à la lettre. Il n'y a pas lieu ici d'en rajouter avec les critères de régionalisme, de tribalisme et de copinage qui sont pourtant réels. Cela ne milite pas bien sûr pour le choix de véritables compétences professionnelles et de fortes personnalités, capables de dire non et de s'opposer aux décisions de la hiérarchie.
Les PDG organisent leurs entreprises de manière à pouvoir tout contrôler
Tout ce qui précède donne une petite idée sur la raison pour laquelle les PDG dans leur majorité organisent les entreprises qu'ils gèrent de manière à tout contrôler personnellement, et font en sorte que leur taille ne dépasse pas ce qu'ils sont capables de maîtriser directement. Depuis près de quinze années, les observateurs ont eu à constater que la taille des EPE (et donc leur part de marché) n'a fait que rétrécir, contrairement à un marché qui lui n'arrête pas de croître. Exit la mission traditionnelle du manager qui consiste, rappelons-le, « à concevoir et mettre en place les grandes lignes d'une politique prévisionnelle visant à gagner le maximum possible de parts de marché, et par conséquent, la croissance et le développement continus de son entreprise ». Tout ce qui relève du stratégique, de l'analyse des risques, de la politique de croissance est mis entre parenthèses. Le manager d'une EPE ne vit que dans le présent ; il n'a aucune perspective sur la ou les années à venir, de manière à y insérer son entreprise avec de grandes chances de réussite. Dans les faits, cette partie fondamentale du management d'entreprise, c'est-à-dire la perspective, est sous-traitée à la tutelle. Le manager ne fonctionne que dans le cadre étroit qui lui a été tracé : chaque fois qu'il compte sortir de ce cadre, il doit demander l'autorisation à qui de droit ; c'est comme cela qu'il se croît à l'abri des mauvaises surprises.
L'opération mains propres contre les cadres du secteur public économique
L'histoire récente peut à la rigueur justifier un tel comportement : la politique "mains propres" menée, dans la deuxième moitié des années 1990, a jeté en prison près de 2000 cadres d'entreprises publiques, accusés de corruption et de mauvaise gestion. La grande majorité d'entre eux était innocente des faits qui leur étaient reprochés et a donc été acquittée après plusieurs mois (pour certains plusieurs années) passés en prison : des vies ont été brisées dans le but inavoué de paralyser le secteur public économique. Depuis cette date, le manager du secteur public ne prend plus d'initiatives ni de risques, même si ceux-ci sont consubstantiels de l'acte même de gérer. Ajoutons que le délit de mauvaise gestion est toujours inscrit dans le code pénal, une manière de laisser pendue sur la tête des gestionnaires du secteur public une épée de Damoclès, dont le fil peut se rompre à tout moment. Plutôt que de risquer la prison pour une décision de gestion qui ne fait pas l'unanimité, il est préférable d'attendre les autorisations écrites de la tutelle qui vont servir de couverture, au prix d'une détérioration inéluctable et rapide de la situation de l'entreprise qu'il est censé gérer avec compétence et savoir-faire. Cela pour une écrasante majorité d'entreprises publiques économiques pour lesquelles la situation est désastreuse. Qu'en est-il de celles qui sont en bonne santé.
Les EPE qui réussissent
Même si elles ne sont pas nombreuses, il y a, en effet, des EPE qui réussissent et qui font la preuve que la situation de faillite chronique de l'entreprise publique n'est pas une fatalité. Est-ce le fruit de l'action de managers émérites, compétents, engagés et surtout courageux ? Ou ne serait-ce que le résultat d'une rente de situation ?
Les entreprises qui profitent d'une rente de situation
La situation de rente existe bel et bien, ce qui explique la réussite de certaines entreprises publiques. C'est le cas par exemple de toutes celles qui sont encore en situation de monopole (de fait ou bien droit) : les entreprises du secteur de l'énergie sont dans leur majorité dans ce cas d'espèce. C'est le cas aussi, mais plus pour longtemps, tant la concurrence devient rude, des entreprises publiques productrices de ciment et de produits rouges. C'est encore le cas des banques publiques et des assurances qui continuent de jouir d'une jolie rente de situation, même si la concurrence privée, surtout étrangère, devient rude. Le seul vrai mérite des managers de ce type d'entreprises est d'avoir su maintenir leur position dominante. Mais il y a des signes qui ne trompent pas et qui montrent que ces situations de rente sont en train d'évoluer au profit d'investisseurs privés, locaux ou étrangers. Si les managers de ces entreprises n'y prennent pas garde et n'entreprennent rien pour faire face à cette nouvelle concurrence, c'est la crise qui les attend à brève échéance.
Les entreprises qui font face à la concurrence et qui réussissent
Il y a par contre des entreprises publiques qui activent au sein d'un véritable champ concurrentiel et qui s'en sortent plutôt bien : le cas le plus connu est bien sûr Saïdal qui doit faire face non seulement à la concurrence des laboratoires privés nationaux et étrangers, mais aussi et surtout à toute une faune d'importateurs. Malgré tout cela, les chiffres de cette entreprise, qui étaient dans le rouge il y a encore quelques années, sont devenus positifs et lui ont même permis d'être l'un des quatre titres cotés en bourse. D'autres cas, certains connus et d'autres moins, sont là pour démontrer ce qu'un manager compétent, mais aussi courageux peut réussir, malgré un environnement hostile : El Aurassi, Socothyd, EPLA, la plupart des grandes entreprises de travaux publics, ENGCB, Inerga, ENGI et quelques autres doivent leur bonne santé à l'action de leurs managers.
Des managers à très forte personnalité
Les quelques managers compétents, ambitieux, courageux et efficaces qui existent se battent seuls et n'ont souvent que leur personnalité de battants à opposer aux nombreux écueils qu'ils rencontrent sur leur chemin. Ceux-là fournissent quotidiennement la preuve que quand des managers ont le courage d'opposer à leurs tutelles une vision concrète et réaliste de leurs entreprises et de leur environnement ; quand ils proposent en fonction de la situation concrète de leurs entreprises une politique de redressement, de sauvetage ou de développement cohérente et un programme de travail pragmatique, quand ils mettent en avant des personnalités ambitieuses, sûres d'elles, dynamiques, décidées et volontaires, quand ils sont capables de refuser d'appliquer les injonctions de la tutelle (même si le prix à payer est d'être immédiatement démis de leurs fonctions) ; ceux-là aboutissent régulièrement à de très bons résultats qui se manifestent par des bilans très largement bénéficiaires, avec distribution de dividendes importants à l'actionnaire principal, c'est-à-dire l'Etat. Les entreprises gérées par ces managers créent de la richesse, maintiennent et développent l'emploi et sont la preuve qu'une entreprise publique économique peut, au même titre qu'une entreprise privée, être rentable et participer au développement économique du pays. Il y a lieu de se poser ici la question de savoir si le comportement courageux de ces managers là n'est pas dû à de hautes protections, dont ils peuvent bénéficier de la part de parents, d'amis ou de membres d'un clan du pouvoir. La question mérite d'être posée, même si la réponse importe peu : on a vu des PDG qualifiés d'intouchables mis en prison malgré l'existence de très hauts protecteurs. Il nous suffit de dire que ce qui compte ce sont les résultats pour les entreprises qu'ils gèrent. Comment pousser tous les managers des entreprises publiques à rejoindre les rangs de ceux qui réussissent et portent haut le flambeau du secteur public économique ? En créant un espace de rencontres et de dialogue dans lequel ils peuvent se retrouver régulièrement et en transformant cet espace en association de défense du secteur public économique, et partant, de défense des intérêts matériels et moraux des managers. En effet, ce qui rend la fonction de manager d'entreprise publique ardue et dangereuse, c'est l'état d'isolement permanent dans lequel chacun d'entre eux se trouve. Il n'y a aucune solidarité entre eux ; chacun active dans son coin, sans se rapprocher des autres qui sont dans la même situation. Il convient que quelques-uns des PDG d'EPE parmi les plus influents, conscients, compétents et courageux prennent la décision de créer cette association, ouverte à l'ensemble des cadres dirigeants et se lancent hardiment dans une action visant la renaissance et la crédibilisation du secteur public économique.


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