Alors que les contacts avec le commandant du navire Aïn Témouchent, en panne sèche au large des côtes nigérianes, n'ont toujours pas été rétablis, la compagnie de navigation maritime, Cnan, est sortie hier de son silence en rendant public un communiqué, signé par son directeur général adjoint, A. Djebari, rapportant les circonstances de cette grave affaire. Tous nos efforts en vue de joindre cette direction durant ces deux derniers jours se sont avérés infructueux. Selon les responsables de la Cnan, le vraquier Aïn Témouchent se trouvait le 30 septembre dernier au port camerounais de Douala, où il venait de finir ses opérations commerciales de déchargement de marchandise pour le compte d'un affréteur. « Dans l'impossibilité d'approvisionner le navire en soutes dans ce port, il avait été demandé au commandant de rallier le port de Lagos où il s'est présenté le 6 octobre. Compte tenu du nombre important de navires en rade ainsi que des commandes de soutes enregistrées, le vraquier Aïn Témouchent devait attendre son tour et changer son point de mouillage pour y être approvisionné. Il a fini par épuiser toutes ses réserves nécessaires au fonctionnement des groupes électrogènes et donc à la production d'énergie électrique à bord. Le 20 octobre 2005, l'agent local Cnan Group informait le commandant du navire que l'opération de ravitaillement était en cours. Le même jour vers 20h, le commandant a lancé un premier appel d'urgence intercepté par les gardes-côtes algériens dans lequel il demandait la livraison de 10 tonnes de mazout et de vivres. Une cellule de crise a été immédiatement activée au sein du siège de la Cnan Group afin de prendre en charge directement le problème... » Il est pourtant important de signaler que le premier télex faisant état de la panne de soute transmis par le commandant du navire est daté du 13 octobre 2005. Le navire est resté sans énergie et sans vivres pendant près d'une semaine, ce qui aurait pu faciliter une attaque pirate. Une situation qui a poussé le commandant du vraquier à lancer un SOS à travers les ondes de sa radio, capté par tous les navires ainsi que les gardes-côtes. Néanmoins, dans le communiqué, les responsables de la Cnan ont affirmé qu'en raison de la complexité de la réglementation locale et des conditions requises pour la mise en œuvre des moyens nécessaires à une telle opération d'urgence, ce n'est que le 21 octobre dernier, à 18h locales, que les gardes-côtes nigérians ont autorisé le remorqueur ravitailleur à rallier le Aïn Témouchent. « L'opération de nuit a dû être différée par les autorités nigérianes en raison de la mauvaise visibilité et du manque d'éclairage. Le navire a finalement reçu ses soutes le 22 octobre à 12h locales et l'énergie a été immédiatement rétablie. » Il est curieux néanmoins de constater que les responsables de la Cnan n'aient pas pu prendre contact avec le commandant du navire pour s'enquérir directement de la situation, d'autant que cette région, de l'avis de nombreux professionnels marins, est connue comme une zone de piraterie. Le directeur général adjoint de la Cnan s'est contenté de reprendre les propos très rassurants du commandant du port de Lagos, avec lequel il a pris attache. « Le commandant du port de Lagos contacté par Cnan Group informe, par ailleurs, de l'absence totale de danger lié à la piraterie dans le port de Lagos depuis la mise en œuvre du dispositif ISPS. » Il est cependant important de signaler que le Aïn Témouchent n'est pas au port de Lagos mais au large, à 45 miles de la côte nigériane. Il aurait été plus judicieux de prendre contact avec le commandant du navire, seul habilité à révéler les circonstances d'une telle affaire. Pour l'instant, aucune nouvelle n'a été donnée quant au sort du Aïn Témouchent et de son équipage. C'est pour cette raison, et uniquement pour cette raison, que la thèse de la piraterie a été retenue. En attendant, les responsables de la Cnan Group ont informé qu'« une commission d'enquête sera diligentée dès le retour du navire en Algérie afin de déterminer les éventuelles responsabilités ». Il est pour le moins surprenant qu'un navire d'un tonnage aussi important, assurant des liaisons aussi lointaines, fasse l'objet d'une panne de soute. Cela démontre le laisser-aller dont souffrent aujourd'hui les navires de la compagnie battant pavillon national.