La violente polémique ayant entouré le projet de construction d'une seconde mosquée à Aghribs, à l'initiative d'une association religieuse, a fini par faire réagir le département de Bouabdallah Ghlamallah. Des émissaires se sont rendus vendredi dernier à Aghribs pour inviter le comité du village à une entrevue au niveau du ministère des Affaires religieuses. Dans une déclaration remise à la presse hier, le comité de village souligne que «l'urgence n'est pas dans une entrevue avec le ministre, initiative que nous saluons au demeurant, mais plutôt dans la nécessité de dénoncer cette hystérie médiatique qui n'est pas sans préjudice sur l'intégrité physique et morale des citoyens d'Aghribs». Sans décliner l'invitation, le comité de village réclame, du ministre, une déclaration publique, où il précise sa position sur la base des constatations des émissaires dépêchés sur place. Les représentants des villageois nous ont indiqué que les envoyés de Ghlamallah étaient d'avis que la construction d'une seconde mosquée était inopportune dans un village qui dispose déjà d'un lieu de culte ancestral. «Les membres de la commission ont prié dans la mosquée Sidi Djaffar et ont salué les travaux de rénovation que nous avons effectués récemment », nous dit un membre du comité de village. Il ajoutera que les hôtes d'Aghribs, qui ont souhaité un retour au calme au sujet de cette affaire, ont reconnu que l'autorisation délivrée pour construire une nouvelle mosquée n'a pas été suffisamment réfléchie. Les représentants des villageois déclarent que les émissaires du ministre n'ont pas contesté l'attitude du comité de village, qui a décidé de sauvegarder l'ancienne mosquée et de rejeter le projet porté par l'association religieuse, même si cette dernière a pu obtenir les autorisations administratives, allant du terrain d'assiette jusqu'au permis de construire. «Nous attendons maintenant que le ministre s'exprime et rétablisse la vérité afin de mettre un terme aux accusations et à la désinformation», déclarent les membres du comité de village. Dans leur lettre remise à la presse, ces derniers dénoncent le «lynchage médiatique et la campagne de diffamation ponctuées d'appels au meurtre». «Le summum de cet acharnement médiatique, ajoute la déclaration, a été atteint avec l'immixtion de la chaîne de télévision Al Jazeera, à travers un perfide montage d'images choquantes et un appel au djihad lancé contre la population d'Aghribs.» Cette affaire a, en effet, pris une tournure dangereuse à travers des amalgames d'une totale irresponsabilité. Le coup d'arrêt porté à un chantier, arrivé au stade de la plateforme et des piliers, a été transformé en «destruction de mosquée», alors que la mosquée du village, Sidi Djaffar, est vénérée depuis des siècles, non seulement par les habitants d'Aghribs, mais par toute la population de la région. Aucune destruction de mosquée n'a jamais eu lieu dans la région et aucune communauté villageoise n'aurait toléré cela. La véritable violence signalée est sans doute celle de remettre en cause un Islam tolérant et convivial adopté dans les villages depuis des siècles. Il faut souligner que l'ensemble des mosquées ancestrales érigées dans la région se trouvent à proximité de cimetières et entourées de tombes. «Les villageois ont toujours souhaité être enterrés près du mausolée du saint tutélaire», nous fait remarquer un citoyen d'Aghribs, précisant que la mosquée Sidi Djaffar existait bien avant le village lui même. L'argument des fondamentalistes, selon lequel les mosquées érigées près des tombes sont «illicites», n'est rien d'autre qu'une menace de déstabilisation de l'ensemble des communautés villageoises.