Des milliers de personnes ont dénoncé, hier, en France l'expulsion des Roms. A Londres, Barcelone et Bruxelles, il a été dit autrement… Le président français, Nicolas Sarkozy, faisait face, hier, à une journée de mobilisation en France et en Europe contre le virage sécuritaire du gouvernement, notamment sa politique d'expulsions de Roms qui a suscité la réprobation internationale. Des manifestations étaient organisées dans de nombreuses villes en France ainsi que devant des ambassades françaises de plusieurs pays de l'Union européenne (UE), à l'appel de dizaines d'associations et organisations de défense des droits de l'homme avec le soutien de syndicats et des partis d'opposition (gauche, écologistes). Des Roms roumains ont ouvert le défilé parisien rassemblant plusieurs milliers de personnes, suivis de personnalités politiques, syndicales, associatives ou artistiques, réunies derrière le slogan de cette mobilisation : «Non à la xénophobie et à la politique du pilori. Liberté, égalité, fraternité». Au plus bas dans les sondages, embarrassé par le scandale politico-fiscal touchant le ministre du Travail, Eric Woerth, chargé de défendre dès mardi la cruciale réforme des retraites, le président français avait tenté de reprendre la main fin juillet en annonçant un durcissement de sa politique sécuritaire – thème qui avait participé à son succès à la présidentielle de 2007. Mais en décidant le démantèlement de camps illégaux de Roms et en envisageant de déchoir de leur nationalité certains criminels d'origine étrangère, Nicolas Sarkozy a suscité l'indignation de la société civile et de l'opposition, et l'inquiétude de l'ONU, de la Commission européenne, du Vatican. Au total, plusieurs milliers de personnes ont également manifesté en province, notamment dans le Sud-Ouest, à Bordeaux et Toulouse, ou dans le Sud-Est à Montpellier. En Europe, des manifestations ont rassemblé quelques dizaines à une centaine de personnes devant quelques représentations de la France. Sur les banderoles à Bruxelles, on pouvait lire : «Roma, immigrants, who's next ?» (les Roms, les immigrés, qui d'autres ?). A Barcelone : «Basta deportaciones» (ça suffit les déportations).
Boomerang A Londres : «Assez, c'est assez». Depuis fin juillet, environ 1000 Roms roumains et bulgares ont été reconduits à la frontière et une centaine de campements illicites démantelés. «La ligne rouge a été franchie», a déclaré hier le président de la Ligue des droits de l'homme (LDH) Jean-Pierre Dubois.«On n'accepte pas le poison qu'est en train d'instiller le gouvernement dans notre République», a déclaré la patronne des Verts, Cécile Duflot. Le secrétaire général du premier syndicat de France (CGT, gauche) Bernard Thibault estimait «très dangereux de retenir l'idée selon laquelle tous les maux de la société viendraient de l'immigration». La France avait été appelée fin août par l'ONU à «éviter» les «discours politiques discriminatoires». Cette semaine, pour la première fois, le ministre roumain des Affaires étrangères, Teodor Baconschi, a critiqué le renvoi des Roms estimant que ce n'était «pas une solution». Face à ce tollé, la France a expliqué hier, devant une Commission européenne réservée, sa politique d'expulsions de Roms, déclarant que le droit européen était «scrupuleusement» respecté. La France «ne stigmatise personne», a dit le ministre des Affaires européennes, Pierre Lellouche. Environ 15 000 Roms vivent en France, où ils bénéficient des règles de libre circulation de l'UE, mais vivent souvent dans des abris de fortune. Après trois mois passés en France, sans domicile ni sources de revenus, ils sont dans l'illégalité et deviennent expulsables. Les parlementaires européens doivent débattre de ce sujet le mardi 7 septembre à Strasbourg. Le même jour, le Président français devra faire face à une autre journée de mobilisation, contre l'impopulaire réforme des retraites.