La gestion débridée sévissant au niveau de l'agence CNAS de la wilaya de M'sila, notamment ces cinq dernières années - ayant fait l'objet d'écrits d'une rare virulence à l'adresse de différents intervenants dans sa gestion et ayant été à l'origine de l'ouverture d'une enquête sur instruction du procureur général près la cour de M'sila - ne semble pas s'atténuer en demeurant l'apanage de certains responsables qui, par la force du temps, sont devenus inamovibles puisqu'ils maintiennent la gestion frauduleuse. Ainsi, le statu quo reste de mise. Ni le limogeage de l'ex-directeur de l'agence, intervenu dans le sillage de la mise à l'écart de M. Benacer, ex-DG de la CNAS par le ministre du Travail et des Affaires sociales, et encore moins les visites d'inspection d'éléments du ministère ou de la DG de la CNAS ne semblent avoir contribué à estomper les méfaits de cette gestion. Celle-ci n'a cessé de saper le moral des assurés et saigner à blanc les deniers de cette agence à travers une série de malversations aussi honteuses les unes que les autres. Ces actes de malversation ont touché le transport par ambulance des assurés et le remboursement des frais médicaux par la méthode du volet blanc qui consiste en la réutilisation des ordonnances en se faisant payer une deuxième fois une ordonnance en changeant au préalable le nom et le numéro d'immatriculation. Le volet transport par ambulance constitue l'un des principaux éléments. Cette activité de transport a fait l'objet d'une panoplie d'écrits qui ont été adressés aux hautes autorités du pays, mettant en relief les agissements de deux ambulanciers sur les sept que compte la wilaya. Ces deux personnes se sont adonnées à de honteuses malversations en usant et en abusant des fausses évacuations et en accaparant indûment des sommes faramineuses. Pour la seule année 2004, les deux ambulanciers ont cumulé à eux deux 21 800 000 DA sur un total de 62 702 920,35 DA. La fausseté de ces évacuations a été vérifiée par la cellule de contrôle tiers payant qui avait procédé, lit-on dans le compte rendu du 2 juin 2004, à la vérification de 33 dossiers d'assurés sociaux et d'ayants-droit, soi-disant évacués par les transporteurs agréés dans le cadre de la prise en charge en matière de consultations, de soins, d'interventions chirurgicales ou d'hospitalisation. « Après avoir fait le rapprochement entre les listings de séjour des malades au Centre Pierre et Marie Curie (CPMC Alger) et les évacuations effectuées par les ambulanciers, il a été constaté de nombreuses anomalies au niveau des documents médicaux et administratifs. Les dates de séjour à l'hôpital ne correspondent pas aux dates de paiement portées sur le canevas. » « Des documents importants, lit-on un peu plus loin, liés à la filiation du malade sont inexistants. » D'autres irrégularités ont été décelées par cette cellule de contrôle, notamment celles liées aux certificats médicaux émanant du CPMC Alger, sur lesquels ne figurent ni la griffe ni le cachet du médecin traitant. Il est mentionné dans ce compte rendu que « les écritures et les signatures ne sont pas les mêmes. Les dates de séjour portées sur les certificats ne correspondent pas aux dates portées sur les fiches navettes ou bulletin de liaison avec le contrôle médical ». Il est également relevé « l'existence de dates de paiement répétées deux à trois fois, portées sur le canevas de suivi de transport, et des dates d'évacuations quotidiennes durant tous les mois de janvier, février et mars 2003 pour l'assuré T. A. immatriculé sous le n° 27 0476 28 03 49. Transporteur G. N. » Cela veut dire que cet assuré aurait été évacué, sans répit, pendant 90 jours, par ce transporteur, ce qui logiquement ne peut être le cas. Par ailleurs, il est précisé dans ce compte rendu que le cas de T. A. n'est qu'un exemple parmi tant d'autres. Vraisemblablement, les cas similaires sont multiples et ne seraient possibles sans la complicité des éléments de l'agence CNAS, dont le médecin conseil qui, selon la procédure de paiement de transporteur, se doit de donner, préalablement à toute opération d'évacuation, son avis qu'il apposera sur la fiche navette établie par le service transport. Conséquemment à sa position centrale dans cette procédure, le médecin-conseil de l'agence de M'sila serait impliqué dans les malversations qui ont touché le volet transport par ambulance. Il aurait perçu des deux principaux ambulanciers trois voitures de luxe et une villa haut standing à M'sila.Aussi parmi les malversations, le paiement en espèces des frais de transport atteignant les 50%, une proportion qui échappe totalement au Fisc.Pour la seule année 2004, pas moins de 27 613 094,29 DA, représentant la part de frais de transport que l'agence M'sila a payé en espèces aux ambulanciers sur un total de 62 702 744,64 DA, n'ont finalement pas été soumis à la taxe de l'activité professionnelle (TAP) et à l'IRG. Rapporté aux cinq dernières années, le manque à gagner en termes de fiscalité provenait de l'activité de transport depuis son démarrage en 2000. Les ambulanciers sont payés en espèces à partir de la caisse consacrée aux remboursements des frais médicaux. L'autre série de malversations, qui s'apparente à un véritable détournement, émane de la gestion frauduleuse précisément de cette caisse consacrée aux remboursements des frais médicaux. Celle-ci est devenue, par le biais de la méthode du volet blanc, une source d'enrichissement pour la majorité des responsables de cette agence. Lesquels, nous a-ton expliqué, avec la complicité de simples agents, se servent systématiquement. Ils ont fait fortune en se dotant de situations matérielles enviables, villas, voitures de luxe, fonds de commerce, entreprises... Cette méthode du volet blanc, nous a-t-on expliqué, consiste en la reprise des ordonnances réglées et archivées, dont on efface le nom du titulaire de l'ordonnance et de la feuille de maladie pour le remplacer par un autre, dont le nom et le numéro d'immatriculation sont tirés du fichier. La nouvelle ordonnance falsifiée, avec un nouveau volet blanc indiquant le nom de l'assuré tiré du fichier, est présentée au caissier pour paiement. L'opération, qui se répète indéfiniment pour un nombre indéterminé d'ordonnances « revisitées », a engendré des sommes qui se chiffrent à des centaines de millions détournés en toute impunité sans que le ministère et encore moins la DG de le la CNAS réagissent pour mettre un terme à cette situation.Au-delà du limogeage de l'ex-directeur de l'agence, la situation en termes de fonctionnement n'a aucunement changé, laissant même supposer qu'il y aurait complicité des structures centrales pour le maintien de cette gestion frauduleuse dans cette agence.