En 1973, le gouvernement marocain publiait une loi cousue spécifiquement pour la communauté algérienne, même si le dahir (la loi en question) du 2 mars 1973 est relatif au «transfert à l'Etat (marocain) des immeubles agricoles appartenant aux personnes physiques étrangères ou aux personnes morales». En réalité, ce texte n'a puni que les ressortissants algériens. En effet, plus de 14 000 propriétaires terriens algériens ont été spoliés sans aucune forme de procès dans plusieurs villes du royaume, notamment à Casablanca, Oujda, Taza, Agadir, Guercif, Berkane, Nador et Fès. Les autres étrangers, particulièrement les Français, ont été indemnisés. Selon Bousmaha Abdou, propriétaire de terres agricoles à Guercif et dont l'affaire est toujours en suspens devant la justice du Maroc oriental, «nos terres implantées en zone urbaine n'étaient légalement pas concernées par cette loi royale, mais la réalité est autre, elles nous ont été confisquées elles aussi et attribuées à d'autres personnes pour exploitation. D'autres parties à la périphérie de la ville sont toujours en jachère…». Pour le cas de la famille Bousmaha, même l'administration chérifienne est désabusée puisqu'elle reconnaît ne pas comprendre cette situation inexpliquée. «Cette parcelle se trouve dans le secteur urbain de la ville de Guercif, conformément au découpage administratif de l'année 1992. Ce cas est inexpliqué. Normalement, cette terre ne devrait pas être touchée par la loi de 1973», nous expliquait un responsable de la conservation foncière de Taza en 2005, lors d'un reportage sur le sujet. Un aveu qui confirme la reconnaissance de la mairie de Guercif en date du 10 juin 2003, dans une correspondance transmise à la famille concernée.Pour sa part, l'avocat des Bousmaha, un Marocain, avoue que le conflit est «purement politique». Même commentaire du consulat algérien à Oujda de l'époque. Notre ambassade à Rabat, à l'époque toujours, ne nous édifiera pas plus sur ce conflit, puisqu'on tentera de nous apaiser en ces termes : «L'affaire est entre les mains de notre ministère des Affaires étrangères.» La dernière visite au Maroc oriental du secrétaire d'Etat chargé des affaires de nos communautés à l'étranger, en l'occurrence M. Atallah, a relancé, sommes-nous tentés de dire, l'idée de la création d'une association des Algériens spoliés au Maroc. Un des initiateurs de cette idée a déclaré : «Nous avons contacté nos concitoyens concernés par ce litige dont le nombre dépasse les 14 000. Actuellement, nous nous attelons aux démarches administratives pour la constitution du dossier qui sera déposé au niveau de la wilaya de Tlemcen pour l'obtention de l'agrément et pouvoir, ainsi, agir collectivement et pas séparément. Des correspondances en ce sens ont été également envoyées aux ministères algériens de l'Intérieur et des Collectivités locales et des Affaires étrangères.»