L'ancien secrétaire général du ministère des Travaux publics, Mohamed Bouchama, a été libéré hier après une détention de près d'une année dans le cadre du scandale lié à la réalisation de l'autoroute Est-Ouest. Poursuivi par le juge du pôle judiciaire spécialisé près la cour d'Alger pour son implication présumée dans l'affaire de corruption liée aux travaux de réalisation de l'autoroute Est-Ouest, l'ancien secrétaire général du ministère des Travaux publics, Mohamed Bouchama, a bénéficié hier de la liberté provisoire. Cette mesure a été prise par le juge en réponse à une demande dans ce sens introduite par ses avocats le 26 septembre. Bouchama est le premier des sept prévenus à avoir quitté Serkadji, pour retrouver sa famille, et ce, en attendant que l'instruction prenne fin et que le dossier soit renvoyé devant le tribunal. L'information a circulé comme une traînée de poudre, d'autant que le même juge avait rejeté une première demande de mise en liberté, confirmée d'ailleurs par la chambre d'accusation, avant qu'il ne décide de répondre favorablement. La défense avait argumenté sa requête en affirmant que les griefs retenus contre Bouchama «ne reposaient sur aucune preuve, mais uniquement sur des déclarations d'un prévenu, sur lesquelles, il est revenu par la suite». Il est à rappeler que Bouchama était le troisième cadre à être poursuivi dans le cadre de cette affaire, Belkacem Ferrachi, chef de cabinet du ministre des Travaux publics, et le deuxième a être placé sous mandat de dépôt (Hamdane, directeur de la planification du ministère des Transports). Sept prévenus devant le juge En tout, sept prévenus avaient été placés sous mandat de dépôt en cette journée du 7 octobre 2009, lorsqu'ils ont été présentés au parquet d'Alger. L'instruction autour de ce qui est qualifié comme étant la plus grande affaire de corruption impliquant aussi bien des personnalités politiques que militaires (trois colonels et un général mis à la retraite d'office, mais non concernés par les poursuites judiciaires), avance lentement. L'enquête préliminaire menée par les officiers de la police judiciaire du DRS (Département de renseignement et de sécurité) n'a pas beaucoup évolué en dépit des noms de hautes personnalités cités dans le dossier. Même filtré, ce résultat montre à quel point la corruption gangrène les institutions de l'Etat et comment des lobbys étrangers, notamment français, aidés par de hauts responsables de l'Etat, ont pu avoir le monopole sur de nombreux secteurs du marché algérien. De hauts cadres de l'Etat soudoyés à coups de commissions par des sociétés chinoises, espagnoles, italiennes et françaises en contrepartie de facilités pour l'octroi de marchés de tramways, de réalisation d'autoroute et de barrages. Un vrai panier à crabes où s'est mêlé l'espionnage économique au trafic d'influence, à la corruption et aux passe-droits. Les premières personnes interrogées ne sont en réalité que des intermédiaires entre les sociétés corruptrices et les hauts fonctionnaires de l'Etat. Les noms qu'elles ont cités vont des ministres comme Mohamed Bedjaoui, ancien ministre des Affaires étrangères, Chakib Khelil, ministre de l'Energie et des Mines, Abdelatif Benachenhou, ex-ministre des Finances, jusqu'aux officiers supérieurs des services de sécurité, comme le colonel Khaled, conseiller du ministre de la Justice, deux autres colonels et un général à la retraite, en passant par le chef de cabinet et homme de confiance de Amar Ghoul, son secrétaire général, le directeur général de l'Agence nationale des autoroutes, directeur général de l'Algérienne de gestion des autoroutes, et le directeur de la planification au ministère des Transports. De tout ce monde, seuls le secrétaire général des Travaux publics et le directeur de la planification des Transports, sont mis sous mandat de dépôt. Pourtant, ces grands marchés passent par des commissions nationales, présidées par les ministres des secteurs concernés. Mieux encore. Ils font partie des grands projets que le président de la République suit avec une attention particulière de part l'importance de la manne financière qui leur est allouée. De ce fait, s'il y a corruption ñ et il y en a ñ elle ne pouvait se limiter uniquement aux cadres mis en cause. Telle qu'elle se présente aujourd'hui et sans préjuger du cours de l'instruction, il y a comme une volonté délibérée (ou non) de limiter les responsabilités de cette grave affaire aux seuls cadres incriminés.