Plus de 600 travailleurs de l'entreprise publique Infrafer ont marché, hier, dans la zone industrielle de Rouiba pour réclamer le versement de leurs salaires des cinq derniers mois. Les employés de cette importante entreprise, spécialisée dans la réalisation d'infrastructures ferroviaires, se sont rassemblés devant le siège de l'Anserif. Ils expliquent le blocage de leurs salaires par la non-perception des créances (plus de 3 milliards de dinars) que leur doit l'Anserif depuis plus d'une année. La marche s'est ébranlée à partir de la direction générale d'Infrafer. Les travailleurs, dont certains sont venus des wilayas d'Oran, M'sila, Souk Ahras, Oum El Bouaghi, Sidi Bel Abbès ... ont arpenté le principal boulevard de la zone industrielle en brandissant des pancartes réitérant leurs revendications. Ils ont également scandé des slogans qui rappellent leur attachement à leur entreprise, considérée comme l'un des fleurons de l'économie nationale. «Barakat, quatre mois barakat. Infrafer est une entreprise nationale et ses travailleurs sont des pauvres. Y en a marre de l'embargo... rendez-nous nos créances. Anserif Anserif, l'Infrafer a du nif (dignité)», n'ont-ils cessé de scander. La marche s'est déroulée dans le calme et sans qu'aucun incident ne soit signalé. Après près d'une heure d'attente devant le siège de l'Anserif, les travailleurs, épuisés, ont rejoint le siège de leur entreprise pour décider des actions à mener à l'avenir pour résoudre le problème des salaires et sauver leur entreprise. «Aujourd'hui, nous avons réussi à organiser cette marche sans aucun problème et transmis nos doléances aux responsables de l'Anserif. Maintenant, nous leur accordons un peu de temps et s'il n'y aura pas de réponse concrète et favorable à vos revendications, ce sont tous les travailleurs de la zone qui seront avec vous», a déclaré le SG des syndicats des entreprises de la zone, M. Messaoudi, à l'adresse des employés d'Infrafer. Il précise que ce n'est pas facile pour des travailleurs qui n'ont pas été payés depuis cinq mois d'être là aujourd'hui. «Ils ont passé le Ramadhan, l'Aïd et la rentrée scolaire sans le sou, mais ils n'ont pas hésité un instant pour répondre à l'appel qui a pour principal objectif la sauvegarde de leur entreprise», a-t-il expliqué. «Veut-on rééditer le scénario de Sonatro ?» Et d'enchaîner : «Aujourd'hui, nous sommes des pacifistes, parfois on nous oblige à recourir à ce genre d'action, car il y a des gens qui cherchent le pourrissement.» L'orateur explique que le problème «n'est plus une question de salaire uniquement», soupçonnant l'existence d'une «volonté préméditée de saboter Infrafer et rééditer le scénario de Sonatro». «Votre cause est celle de tous les travailleurs de la zone. Et le règlement de vos salaires peut se faire aisément avec un chèque signé et transmis par les responsables de l'Anserif à la banque», a-t-il encore appuyé. Poursuivant, M. Messaoudi n'a pas manqué de relever les anomalies constatées dans l'octroi des marchés aux entreprises qui commissionnent pour la réalisation des projets ferroviaires. «Certaines entreprises ayant obtenu des marchés auprès de l'Anserif n'ont même pas réalisé 100 km de rails. L'une d'entre elles n'en a réalisé que 20», a-t-il noté. Intervenant dans ce cadre, certains syndicalistes estiment qu'il y a des gens qui bloquent la mise en application des directives du Premier ministre et du président de la République qui consistent à soutenir les entreprises nationales. «Sinon, comment expliquer le fait de lancer un avis d'appel d'offres national et international pour des projets, alors que nous sommes spécialisés dans ce domaine ?», s'interrogent-ils, avant d'ajouter que certains projets qui leur ont été octroyés ont été réattribués à des entreprises privées qui étaient hors course lors de la soumission. «M. Ouyahia parle de la nécessité de favoriser les entreprises publiques avant toute chose, mais sur le terrain c'est le contraire qui se produit. Aujourd'hui, ce sont les sociétés privées qui bénéficient des faveurs du maître de l'ouvrage en leur octroyant des projets situés dans des zones urbaines alors qu'Infrafer obtient des projets au niveau des zones où elle doit mobiliser d'énormes moyens pour leur réalisation», note M. Haroudi, membre du syndicat d'Infrafer, avant de rappeler les efforts fournis par leur entreprise durant la décennie noire pour assurer la protection des vois ferrées. M. Haroudi dit avoir sollicité toutes les autorités concernées pour mettre un terme à ces anomalies et octroyer un plan de charge pour leur entreprise. En vain. «Nous avons réalisé la voie ferrée Melila-Tébessa (128 km), celle reliant Oran à Béchar (140 km) sur nos propres fonds avec plus de 3 milliards de dinars, mais l'Anserif ne nous a rien versé. Cette situation a causé des retards et des blocages au niveau de plusieurs projets», a-t-il conclu.