Le vrai problème de notre pays dans ce domaine est sa dépendance insoutenable vis-à-vis de la poudre de lait. La pénurie de lait perturbe régulièrement le marché et prive les citoyens aux revenus modestes du sachet de lait à 25 DA. La crise devenue récurrente met en scène, encore une fois, les principaux acteurs de la filière dans un échange d'accusations et de remontrances interminables. Les mêmes postures et les mêmes répliques qui posent en fait, en toile de fond, le vrai problème de notre pays dans ce domaine, sa dépendance insoutenable vis-à-vis de la poudre de lait… La polémique à laquelle on assiste, ces jours-ci, met face à face le Comité interprofessionnel de la filière lait et certains producteurs. Pour le premier, représenté par Mahmoud Benchekour, «il ne s'agit pas d'une réelle pénurie mais plutôt d'un dysfonctionnement et d'un problème de distribution puisque la quantité de poudre de lait importée cette année est supérieure à celle de l'année dernière et que la consommation n'a pas augmenté en dehors de la période du Ramadhan». Dans une déclaration sur les ondes de la Chaîne III, M. Bouchakour note que «l'Office a importé 135 000 tonnes de poudre de lait en 2010 contre 121 000 en 2009». Pour le responsable, l'explication du manque de sachets de lait est à lier au fait que la poudre de lait n'est pas toujours destinée à la production de lait, mais plutôt orientée vers celle d'autres produits, c'est-à-dire les fromages et les yaourts, semble dire le responsable. Des producteurs de lait interrogés par El Watan estiment pour leur part que «la pénurie de lait est bel et bien là». «Nous faisons de notre mieux pour exploiter toutes nos capacités. Tout le lait collecté, nous le transformons en lait pasteurisé en sachet. Il n'en demeure pas moins que nous couvrons uniquement 50% du marché national. Et force est de constater que la demande est nettement plus élevée que l'offre», confie notamment un haut responsable du groupe public Giplait sous couvert de l'anonymat. Un responsable de la laiterie privée Bettouche estime qu'il y a «une grave rupture de stocks de poudre de lait depuis des années. A notre niveau, nous n'avons produit aucun sachet de lait depuis début novembre. Alors que notre quota de poudre est de 500 tonnes par mois, nous n'avons reçu qu'une vingtaine de tonnes depuis le 20 octobre». Dans cette valse d'affirmations et de contradictions, on oublie souvent de poser un autre problème de taille, lié au fait que le lait cru peine à trouver sa place sur le marché. Le rôle des laiteries ne consiste-t-il plus qu'à réhydrater la poudre importée ? Pourquoi les laiteries ne prennent-elles pas en charge la collecte de lait cru qui est souvent jeté, à quelques encablures des usines, par les éleveurs faute de preneur ? Pourquoi, lorsque cette pénurie tant redoutée par les citoyens survient de temps à autre, les yaourts et autres fromages et boissons lactées aromatisées garnissent à profusion les étals ? Autant de questions qui mettent en cause aussi bien les producteurs que l'Office du lait. Les efforts de ce dernier pour réguler la filière restent timides et la lenteur est criante dans la prise en charge des vraies difficultés du secteur, notamment l'intégration du lait cru dans la production et la mise en place d'une réglementation stricte concernant l'utilisation de la poudre de lait importée. Il faut garder en tête que la finalité de l'importation à coups de millions de dollars est d'aider la population et non de faire fructifier les affaires des uns et des autres.