«Je ne suis pas au courant. Un agent de nos services et une assistante sociale visitent régulièrement les lieux, et personne ne m'a jamais rapporté un fait pareil.» Les enfants attachés à une corde dans la maternité de la ville, le docteur Bada, directeur de l'Action sociale de la wilaya de Djelfa, n'en a jamais entendu parler. Curieux. Car même le directeur de la santé de la wilaya et le directeur de l'hôpital n'ont pas nié. Pour le premier, Chibane Khaled, «ce n'est pas notre rôle de nous occuper de ces enfants. Ils dépendent de la Direction de l'action sociale.» Le second, Bouameur Brahim qui vient d'être relevé de ses fonctions, aurait bien, de ses aveux, essayé de déplacer les bébés dans une autre salle et d'inciter les médecins à les visiter. «Mais le directeur de la santé me l'a interdit», accuse-t-il. Accusé, le docteur Bada renvoie la faute au directeur de l'hôpital. «La salle est au niveau de l'hôpital, donc elle est sous sa responsabilité. On ne peut interférer dans leur travail.» Quant au décès des douze bébés abandonnés, survenu à la suite d'une déshydratation, il est aussi rejeté par chaque responsable, et chacun y va de son explication. «Ils sont arrivés trop tard à la pédiatrie», affirme le directeur de la santé. «Je suis médecin, et aujourd'hui on ne peut mourir dans un hôpital par déshydratation (et dans ce cas, on se demande de quoi sont décédés ces bébés, ndlr). De plus, lorsqu'on constate une négligence, on la signale sur les certificats de décès. Ce qui n'est pas le cas pour ces douze nourrissons», insiste le directeur de la DAS en accusant clairement l'hôpital de négligence. Face à ces accusations, le directeur de l'hôpital, lui, ne sait que répondre. On comprend à demi-mots qu'il ne décide, en réalité, de rien dans son établissement.