C'est incontestablement WikiLeaks qui défraie la chronique dans le monde. Toutes les chaînes de télévision en parlent, commentent, organisent des débats, font appel à des spécialistes de la communication pour mieux comprendre les tenants et les aboutissants de ce phénomène «d'espionite» d'un genre nouveau, sauf la nôtre. Si ailleurs les révélations fracassantes qui circulent sont prises comme des sujets d'information pour le moins exploitables au regard de l'actualité, même si la vérité n'est souvent pas bonne à dire, nos médias lourds préfèrent les ignorer pour ne pas s'impliquer dans des réflexions de fond, notamment politiques, qui risquent de déborder si on n'a pas la capacité de les maîtriser. Et, apparemment, c'est cette idée qui vient en premier à l'esprit alors que l'opinion publique nationale est déjà mise au parfum, via Internet, sur toutes les élucubrations médiatiques qui accompagnent le flot ininterrompu des nouvelles, croustillantes mais néanmoins très pernicieuses, qui tombent en vrac et mettent à nu les petites notes secrètes des diplomates américains relevées aux quatre coins du monde. Au demeurant, si ces notes ne laissent pas indifférents les analystes et les responsables politiques au plus haut sommet, rares sont parmi ces derniers ceux qui approuvent l'action de WikiLeaks, considérée comme potentiellement dangereuse pour la mission des chancelleries, voire comme une opération de déstabilisation sur une vaste échelle aux conséquences inavouées. Il faut croire, selon d'éminents experts en communication, qu'au lieu de favoriser la transparence médiatique au nom du sacro-saint principe de liberté d'expression, le jeu de WikiLeaks instaure plutôt un climat de suspicion généralisée qui peut avoir des répercussions néfastes sur les relations entre les pays à cause, parfois, d'une pensée sortie de son contexte ou d'une réflexion personnelle exprimée en aparté – en off – qui ne devait jamais être rendue publique. Seulement voilà, les confidentialités les mieux gardées sont parfois les plus fragiles et de nombreuses voix parmi les experts conviés sur les plateaux des télés françaises se sont montrés, à juste titre d'ailleurs, très étonnés de la facilité avec laquelle les notes des diplomates américains ont volé en éclats, rendant le mystère de ces redoutables «fuites» encore plus incompréhensible alors que les Etats-Unis d'Amérique, avec l'armada de leurs institutions, leurs services de renseignement, leur technologie informatique, passent pour être le pays le mieux protégé de la planète contre ce genre d'invasion. On sait que les génies en informatique qui passent leur temps à chercher à transpercer les sites les plus hermétiques existent et sont de plus en plus nombreux à s'exercer dans ce type de compétition, mais là, la «performance» du jeune Australien Julian Assange, co-fondateur avec six partenaires du site WikiLeaks qui s'est spécialisé dans la divulgation des documents secret-défense, dépasse toutes les limites de l'entendement. Si certains vont jusqu'à parler de machination américaine concertée pour mieux cerner l'équilibre sécuritaire du monde, autrement dit d'une opération contrôlée qui les sert en premier, la grande majorité des spécialistes pensent, au contraire, que, finalement, les USA, dans le domaine de la guerre informatique, restent malgré les apparences extrêmement vulnérables. Mais, maintenant que les scandales diplomatiques sont dans la rue, comment faire pour se prémunir, à l'avenir, contre les terreurs du micro-ordinateur à l'affût de la moindre faille pour faire exploser les systèmes de pensée, sachant que la première puissance du monde a été elle-même mise dans la tourmente ? Faut-il interdire à l'avenir aux ambassadeurs de trop ouvrir leurs g… ? A quoi rimerait alors le travail d'un diplomate s'il ne récoltait pas les petits potins des réceptions mondaines qui, recoupés, donneraient des informations utiles. Avec l'affaire WikiLeaks, d'aucuns pensent que c'est la mission des chancelleries qui va prendre une nouvelle tournure. Face au phénomène du piratage informatique et surtout devant une réelle menace d'instrumentaliser la liberté d'expression à des fins de créer encore davantage de problèmes dans le monde, on aura bien du mal à trouver le bon tempo. Cela dit, les choses qu'on a apprises sur l'Algérie ne sont véritablement pas des scoops. Bien sûr que c'est Ouyahia qui demeure le mieux placé pour succéder à Bouteflika. Que notre Président ne soit pas en odeur de sainteté avec le roi du Maroc. Que l'Algérie soit un pays malheureux…