Le gouvernement chérifien se mure dans un silence inquiétant quant au sort des Algériens emprisonnés dans les geôles du royaume. Selon des informations publiées par le quotidien arabophone marocain Assabah (samedi-dimanche 15/16 janvier 2011) basées sur des chiffres officiels, 467 Algériens ont été arrêtés en 2010 et seraient actuellement toujours détenus dans les prisons marocaines, même si le gouvernement chérifien se mure dans un silence inquiétant quant à leur sort. Les mêmes sources indiquent que ces «personnes, arrêtées dans différentes opérations, tentaient de traverser les frontières entre Nador et Melilla et Tanger et Ceuta», deux enclaves occupées par l'Espagne. Ce nombre impressionnant d'arrestations est survenu durant l'année 2010, précisent les mêmes sources, qui ajoutent que «ces personnes, dont des femmes, avaient opté pour la harga terrestre entre l'Algérie et le Maroc (à partir de Maghnia et Boukanoun) avant de continuer sur la ville rifaine de Nador, à 100 km de la frontière algéro-marocaine. Dans un passé récent, les Algériens payaient pour avoir une carte d'identité marocaine provisoire pour passer de l'autre côté, quelques mètres plus loin, pour fouler le sol de Melilla et les polices des frontières n'y voyaient que du feu, même s'il ne faut pas écarter des complicités à tous les niveaux pour laisser agir ce réseau. A Beni N'sar, localité chérifienne frontalière, les passeurs n'ont que cinq minutes pour être de l'autre côté», raconte un habitué des lieux, en fait «un guide» comme il se qualifie. Auparavant, une fois échoués à Melilla, les clandestins sont orientés vers un camp de réfugiés avant qu'il ne soit démantelé par les autorités espagnoles, ces dernières années. «Cet itinéraire était fortement prisé dans les années 1980 et 1990, avant que les harraga n'optent pour la mer dans des ‘pateras', en raison de la fermeté des autorités espagnoles à durcir les lois sur l'immigration clandestine et la consolidation des contrôles sur les points de passage entre le Maroc et le territoire ibérique». Il faut préciser que les habitants du Rif (Nador, entre autres) n'ont besoin que de présenter leur carte d'identité pour passer à Melilla. Il faut savoir également que d'habitude, quand la police et la gendarmerie royale marocaine interceptaient des clandestins algériens sur leur sol, elles les «jetaient» automatiquement de nuit sur la frontière entre les deux pays. En revanche, certains Algériens ont été jugés et condamnés à un mois de prison avant d'être lâchés sur la bande frontalière, et ce, en contradiction avec les lois internationales qui exigent la remise officielle des clandestins à leur pays d'origine. «Cette manière de faire est compréhensible. Une expulsion en bonne et due forme a un coût, d'où le recours à cette méthode illégale de refoulement.» C'est un peu le jeu trouble que se livrent les autorités des deux pays quand il s'agit de subsahariens clandestins : chaque pays «fourgue» de nuit son lot de clandestins à l'autre. Par ailleurs, il y a quelques mois, Maroc Hebdo dénonçait le «mutisme de l'administration pénitentiaire à Rabat (concernant le nombre de détenus étrangers, notamment algériens et subsahariens) ce qui n'est pas pour arranger l'image du Maroc des droits de l'homme et d'ouverture». Au Maroc, il existe 65 établissements pénitentiaires qui abritent entre leurs murs quelque 62 000 prisonniers dont près de 1500 femmes.