Un agent de sécurité de la BDL a tenté de s'immoler par le feu avec sa fille, ce qui a embrasé la banque . Il a failli être le «Mohamed El Bouazizi de la BDL». Lui, c'est Lakhdar Malki, un agent de sécurité de la BDL qui a tenté de s'immoler par la feu hier matin en compagnie de sa fille de 10 ans, handicapée à 100% (lire portrait). Et le drame se serait fatalement produit n'était la prompte intervention de l'un de ses collègues qui l'a empêché in extremis d'actionner son briquet. Mais si Lakhdar a raté son suicide (Dieu merci), il n'empêche que sa tentative d'immolation a symboliquement mis le feu à la direction générale de la BDL, à Staoueli. De fait, ce sera la goutte «d'essence» qui fera déborder le vase. Car juste après l'évacuation de Lakhdar, c'est tout le personnel du siège qui est entré dans un débrayage sans précédent. Débrayage auquel vont bientôt se joindre plusieurs employés de BDL issus d'autres sites et structures. Et les langues de se délier, donnant lieu à un torrent de récriminations. De larges pancartes sont ainsi improvisées, et un véritable mouvement social de naître spontanément. Les slogans sont largement inspirés de la révolution tunisienne, comme l'illustrent ces deux pancartes : «PDG dégage !», «Non au régime militaire». «Oui, c'est le mot, Lakhdar est devenu notre ‘‘Bouazizi'', même si, hamdoullah, il l'a échappé belle», commente un de ses collègues. «Cela s'est passé vers 8h30, heure à laquelle commence à arriver le personnel de la banque. On a vu Lakhdar qui s'aspergeait d'essence et aspergeait sa fille aussi. Ils étaient tous les deux drapés de l'emblème national. Il criait : ‘Hagrouni ! Hagrouni !' Cela a permis de dire tout haut ce que tout le monde pensait tout bas. Tous les cadres et les employés de la BDL vous diront que ce PDG est un dictateur. Depuis son arrivée, il y a cinq ans, il a cassé l'entreprise. Il a marginalisé les anciens de la boîte et ramené d'anciens militaires à la retraite qu'il a intégrés dans son staff, et qui ont instauré un régime militaire. D'ailleurs, il y a eu des démissions en cascade.» Au terme de plusieurs heures de débrayage, des représentants des travailleurs ont été reçus par le PDG, Arselane Bachetarzi. Ils sont sortis de la réunion retrouver la foule de leurs collègues qui scandait : «PDG barra !», «Zoubiri dégage !», allusion au président du conseil syndical qui, lui aussi, est pris à partie et en prend pour son grade. Une liste de revendications est lue à l'assemblée par les délégués des travailleurs. Outre le départ du PDG et son équipe, l'accent est mis sur les revendications socioprofessionnelles : plan de carrière, promotion, régularisation des contractuels, revalorisation des primes et des frais de mission, accès au prêt administratif et aux œuvres sociales, promotion du personnel compétent, mettre fin aux «mutations abusives» et aux «sanctions déguisées». Nous avons pris attache avec la direction générale de la BDL afin d'avoir le «son de cloche» de son PDG. Nous avons été reçus par le secrétaire général, qui indique d'entrée que le cas de Lakhdar Malki sera suivi de près par la direction. «Le statut de CDD est aujourd'hui une réalité commune à beaucoup d'entreprises. C'est quelque chose de tout à fait réglementaire. Mais il est clair que nous allons œuvrer pour améliorer sa situation», dira-t-il, avant d'ajouter : «Les collègues ont saisi cette occasion pour faire un débrayage. Certaines insatisfactions peuvent être collectives, d'autres sont individuelles et il faudra les étudier au cas par cas.» Pour ce qui est des prêts dits administratifs, le SG a parlé d'une convention avec la CNEP pour permettre aux employés de la BDL de contracter des crédits à taux bonifiés. Et de conclure : «Il est certain que la banque aura une réaction intelligente à ce mouvement social.»