L'héritier du roi Idriss 1er, renversé par El Gueddafi il y a quarante-deux ans, se considère comme un point de ralliement possible, «une ombrelle pour tous les groupes d'opposition». De Londres, il regarde à la télévision les insurgés libyens brandir son drapeau, la bannière rouge, noire et verte frappée de l'étoile et du croissant, celle de la monarchie libyenne. Mohammed Al Sanusi, 51 ans, héritier du trône de Libye, souhaite le départ de celui qui, jeune capitaine, avait renversé son grand-oncle, le roi Idriss 1er, il y a quarante-deux ans. «Son combat pour rester au pouvoir ne sera pas de longue durée, en raison de la volonté de liberté du peuple libyen. Cette grande révolution populaire finira par être victorieuse grâce à l'unité du peuple libyen», dit-il dans un communiqué. Rêve-t-il de monter sur le trône ? Rencontrant Le Figaro à Paris, en décembre 2007, il laissait la porte entrouverte : «Je me bats d'abord pour l'histoire, pour faire respecter le nom de ma famille. Si dans l'avenir les Libyens choisissent la monarchie, je suis là. S'ils font un autre choix, je le respecterai.» Mohammed Al Sanusi s'était installé dans un hôtel parisien à 300 m de la tente d'El Gueddafi, alors en visite officielle à Paris. Comme à son habitude, l'héritier, un homme à la voix douce, portant une barbe courte et vêtu d'un costume sombre bien coupé, tentait de faire entendre sa voix là où l'on recevait en grande pompe le Guide de la révolution. Sans grand succès, à l'époque. Entre lui et le régime d'El Gueddafi, il n'y avait pas de place pour le pardon. Il disait avoir été menacé sur les Champs-Elysées par des sbires du Guide qui l'avaient reconnu.Il se souvenait d'avoir vu son père, Hassan Réda, signer à la télévision libyenne l'acte de décès de la monarchie, tandis que le roi Idriss 1er était à l'étranger. «Mon père m'a expliqué ensuite qu'on lui avait mis un pistolet sur la tempe», racontait-il.Après deux ans de prison, Hassan Réda et sa famille avaient vécu en résidence surveillée à Tripoli, jusqu'à cette nuit de 1984 où des militants des comités révolutionnaires les ont fait sortir pour brûler leur maison. Dans son exil de Londres, Mohammed Al Sanusi se considère comme un point de ralliement possible, «une ombrelle pour tous les groupes d'opposition». Il affirme discuter avec tous, sauf les islamistes armés. Il offre à ses visiteurs le texte de la première Constitution, celle de 1951, instaurant une monarchie constitutionnelle. Quel est aujourd'hui son impact en Libye ? La résurgence du drapeau ne signifie pas l'adhésion à la royauté, mais plus simplement le désir de remplacer celui d'El Gueddafi, entièrement vert. L'absence de toute vie politique depuis quarante-deux ans rend difficile la mesure de la popularité de l'idée monarchique. Le prestige des Sanusi reste pourtant encore vivace, surtout dans les régions libérées de l'Est, car la maison royale était aussi à la tête d'une confrérie religieuse et combattante, les Senousis. Il faudra sans doute attendre la libération de toute la Libye pour savoir si la nostalgie y a un avenir.