C'est comme ça que se termine ma vie, par un suicide. Un fils de chahid sans travail et sans logement. J'aime ma femme et mes enfants, malheureusement ma situation est très précaire», tels sont les mots rédigés sur une feuille par Nador Youcef (54 ans), père de 3 enfants, qui s'était pendu à l'intérieur de son gourbi au douar «Radar» à Koléa, la semaine dernière. Les membres de l'Association du quartier Radar, une région rurale où sont érigées des constructions illicites et des habitations précaires. «300 familles sont entassées dans ce ‘‘haï'', et elles sont toutes venues aujourd'hui voir le wali de Tipasa pour qu'il prenne des dispositions», nous déclare Bennaïdji Mohamed, président de l'Association de ce quartier. «Nous nous sommes déplacés au siège de la wilaya pour le rencontrer pacifiquement, et lui remettre une lettre de revendications. Malheureusement, le wali ne nous a pas respectés, alors que parmi nous se trouvaient beaucoup de femmes accompagnées de leurs enfants», ajoute-t-il. «Nous avons enregistré toute la scène à l'aide de téléphone portable et du caméscope de ce qui s'est passé à l'intérieur de la salle de l'APW, et nous comptons remettre ces images aux autorités centrales du pays», poursuit-il. «Pourtant tout avait commencé par des applaudissements, quand le premier représentant de l'Etat a pris la parole», conclut-il. Le début de cette rencontre entre les familles de haï Radar avec le chef de l'exécutif de la wilaya de Tipasa s'est rapidement envenimé dans une ambiance électrique. L'anarchie s'est installée. Cela a failli dégénérer. Les familles ont été évacuées de la salle de réunion. Le renfort des éléments de la sûreté de wilaya était impressionnant. Leur présence autour du bâtiment administratif du wali aura dissuadé les familles en colère. «Nous refusons que nos manifestations soient récupérées par des partis politiques», déclare Abdessalam Belkhiri, un ex-militaire enveloppé d'un grand emblème national. «Nous ne sommes pas des gens violents. Nous exigeons une enquête sur la gestion du P/APC de Koléa, et souhaitons la régularisation des maisons construites sans permis», ajoute-t-il. «Nous n'avons ni eau potable, ni électricité, ni route. Un enfant atteint de typhoïde est décédé par le passé dans ce haï, et nous enregistrons beaucoup de maladies respiratoires dans notre quartier à cause de la présence de la décharge qui se trouve à proximité de nos maisons. Même notre voisin Nador Youcef vient de se suicider à cause de sa situation sociale. Nous restons là, à Tipasa, jusqu'à l'arrivée de la télévision», affirme-t-il. «C'est un wali, il ne doit pas nous diviser en nous demandant de quelle wilaya nous venons», s'exclame une femme au milieu du groupe qui nous entourait. Il y a lieu de préciser que le wali de Tipasa, depuis son installation à la tête de la wilaya, s'est déplacé au niveau de plusieurs quartiers des localités de sa wilaya pour s'enquérir personnellement de la situation et discuter avec les familles. Il avait déjà effectué une visite à haï Radar à Koléa et avait discuté avec les habitants de ce quartier. Selon un responsable de la wilaya, «les difficultés de ces populations sont déjà connues, et des mesures seront prises selon les priorités. Néanmoins nous avons réalisé le recensement des habitations précaires en 2007, les familles recensées en 2007 seront relogées, mais il y a d'autres maisons précaires qui se sont greffées illégalement sur le site après 2007. Nous sommes tenus de respecter la réglementation. Cependant, la situation des familles qui prétendent vivre dans la précarité sera étudiée au cas par cas, car certains éléments veulent en profiter pour bénéficier des avantages sociaux alloués par l'Etat, au profit des vraies familles en situation précaire», conclut-il.