Le RCD est-il sorti vraiment grandi des dernières élections partielles en Kabylie ? Dans l'entourage de Saïd Sadi, c'est, en tout cas, cette impression de suffisance qui transpire des conclusions que le parti a tirées de sa campagne. Une participation considérée globalement comme « très positive » si l'on en croit les déclarations faites aussi bien par les dirigeants que par les militants. Le leader du Rassemblement a lui-même souligné que les résultats obtenus, malgré une adversité multiforme, sont plus qu'encourageants en ce sens qu'ils démontrent bien, selon lui, que la vitalité et l'influence du parti au niveau de cette région n'ont pas subi une érosion importante à un moment où ses adversaires préjugeaient, dans une projection très pessimiste, de son avenir immédiat, disant qu'il allait jouer une carte décisive pour sa survie. Le RCD, en fait, s'il a de bonnes raisons aujourd'hui d'afficher une certaine sérénité découlant du maintien, vaille que vaille, de sa position initiale de seconde force politique derrière le FFS, ne peut nier les profondes appréhensions qu'il avait nourries à la veille de cette élection et qui lui présentaient un horizon plutôt incertain. Le pire, c'était de se voir distancer par les partis du pouvoir qui, dans leur stratégie de « rééquilibrage » politico-idéologique de la région, avaient mis tout en œuvre pour s'assurer une prédominance qui leur avait été farouchement contestée jusque-là. Sur ce plan, on ne peut pas dire que les rouages anti-RCD n'ont pas fonctionné à fond. Si le parti du docteur Sadi n'a jamais cessé d'être dans le collimateur du pouvoir en raison de son obstination à vouloir rester l'un des segments les plus caractériels et les plus atypiques de l'opposition démocratique, les tentatives de l'affaiblir davantage dans le contexte de ces partielles ont été soutenues par une redoutable campagne de presse de la part de quelques titres pour qui la chute de Saïd Sadi ne faisait plus l'ombre d'un doute. La catastrophe annoncée n'a donc pas eu lieu, mais est-ce un motif convaincant pour croire que le RCD, qui est toujours impliqué dans le travail de refondation du mouvement démocratique au niveau national, se porte bien, n'a rien à se reprocher et voit le futur sous un angle éclairci ? Ce serait, selon les observateurs avertis, l'erreur d'appréciation fatale qu'il ne faut pas commettre. Car si le RCD a reconquis, à la force de ses convictions, et aussi grâce à une remobilisation salutaire de ses troupes, une place incontestable dans le débat politique à l'heure où le multipartisme a tendance à perdre ses valeurs essentielles dans une société algérienne de plus en plus verrouillée, ses ambitions seront limitées tant que l'autocritique reste, dans la maison, un principe volatil. Sadi ne doit pas ignorer que les méthodes de direction dites « staliniennes » qui lui sont attribuées, à tort ou à raison, constituent aujourd'hui la première menace de stagnation pour le parti. Le dirigisme qui y est appliqué, selon d'anciens militants qui ont changé de cap, a fait trop de mal au parti dont celui de laminer certaines têtes pensantes pour une question de leadership n'est pas des moindres. Le docteur est-il à ce point inconscient d'une telle critique qui n'est plus un secret pour personne ? Toujours est-il, ses ex-proches collaborateurs comme Khalida Toumi ou Amara Benyounès, qui ont fait un long chemin avec lui avant de partir, n'en pensent pas le contraire. Benyounès, qui a fondé un parti (non encore agréé), est même devenu (politiquement parlant) l'ennemi le plus acharné de Saïd Sadi. Avérées ou exagérées, les attaques contre le leader du RCD sont autant de signes qui ne trompent pas sur la nécessité, l'urgente nécessité pour ce dernier de revoir de l'intérieur les mécanismes de fonctionnement du parti qui a plus que jamais besoin de s'ouvrir et de se démocratiser s'il veut gagner les grandes batailles politiques.