Piquet de grève, sourires aux lèvres mais aussi beaucoup de colère face au silence des autorités interpellées. Les médecins résidents sont d'autant plus déterminés à aller au bout de la contestation qu'ils ont enclenchée depuis plus d'une semaine. En grève de deux jours depuis hier, ils ont été nombreux à se mobiliser autour des mots d'ordre lancés par le Collectif autonome national des médecins résidents algériens créé il y a moins d'un mois. Un taux de suivi de plus de 90% a été enregistré, selon les organisateurs. Ces jeunes médecins précisent leurs revendications et se mobilisent pour maintenir la pression sur la tutelle. Après des sit-in tenus à l'hôpital Mustapha Pacha et dans plusieurs autres villes du pays (Sétif, Oran, Tizi Ouzou, Tlemcen, Sidi Bel Abbès, entre autres), les médecins résidents, plus de 3500 à adhérer à ce mouvement (3500 sur 6400 résidents algériens répertoriés, incluant médecins, pharmaciens et chirurgiens dentistes) sont passés à l'étape supérieure. Que des promesses ! Une grève nationale de deux jours entamée hier, accompagnée d'une menace de recourir à une autre grève de trois jours, cette fois-ci à partir de lundi prochain, si le ministère ne répond pas à leur première revendication : l'abrogation du service civil obligatoire. «Deux réunions informelles ont eu lieu avec le secrétaire général du ministère de la Santé qui n'a ouvert aucune voie favorable pour une sortie de crise. On a eu droit à des promesses non écrites sur un ton menaçant, à des insultes également. Les médecins spécialistes en service civil ont été traités de cancres, ce qui est inadmissible», note le Dr Yelles Toufik, délégué de l'hôpital Mustapha Pacha. Ils étaient justement plus de 800 médecins mobilisés dans les jardins de cet hôpital de la capitale hier. Un taux de suivi de 91% y a été enregistré, toujours selon les organisateurs. La mobilisation a été marquée par des discussions animées et des inquiétudes largement partagées : «Le service civil est un véritable échec et une injustice», explique le Dr Zerigar. Et d'ajouter : «Notre souci majeur est d'améliorer la qualité de prise en charge de nos patients et le service civil bloque toutes les perspectives pour y parvenir.» «Le service civil est une perte de temps. J'ai effectué mon service civil dans une ville du Sud et je ne n'avais même pas un échocardiographe à ma disposition pour me rendre utile. Durant deux ans, je me suis affairé à des tâches qui n'avaient aucun rapport avec ma spécialité», explique un cardiologue qui vient tout juste de finir son service civil. Le pire redouté Le pire, tient-il à signaler, «est que depuis mon retour, je suis sans travail et sans salaire depuis 10 mois ! Le service civil m'a pris en otage», conclut-il amèrement. La même colère était perceptible à l'entrée de l'hôpital de Kouba. Une centaine de médecins résidents y étaient rassemblés hier en matinée. Les six services de l'hôpital fonctionnaient au ralenti, le personnel hospitalier ayant soutenu cette grève. Seul les urgences et le service minimum y ont été assurés comme dans la plupart des autres services hospitaliers. Les blocs opératoires étaient fermés et les consultations n'étaient pas prises en charge par les maîtres-assistants. Même constat du côté de l'hôpital Salim Zemirli, où 106 résidents ont répondu à l'appel de grève du collectif, ce qui équivaut à plus de 97% de taux de suivi. Dans le reste du pays, les délégués ont fait écho d'une réussite totale de la grève : 88% de taux de suivi à Tlemcen, 95 à Oran, notamment. Les internes, les externes et les médecins généralistes fraîchement diplômés, qui ont rejoint le mouvement en exprimant eux aussi leurs revendications, se sont engagés à soutenir cette grève à laquelle se sont joints aussi des résidents d'autres disciplines : chirurgie dentaire et pharmacie.