La célébration de l'Année internationale des handicapés en Algérie a permis de mettre le doigt sur une triste réalité qui prend de plus en plus les proportions d'un véritable fléau national. On dénombre en Algérie plus de 1,5 million de handicapés, selon l'Office national des statistiques. Selon l'ONS, ce chiffre est éligible à la hausse et devra atteindre 1 800 000 handicapés d'ici à l'horizon 2010. Le budget alloué par l'Etat à cette catégorie de la population, au titre de l'aide sociale, s'élève à près de 30 milliards de dinars. Dans l'absolu, cette enveloppe, ajoutée à l'aide consentie par le ministère de la Solidarité aux établissements spécialisés dans la prise en charge des handicapés et aux associations du secteur, peut paraître conséquente. Mais dans la réalité, cette mobilisation des ressources de l'Etat pour soulager la souffrance des handicapés apparaît en totale inadéquation avec les besoins réels exprimés. Que représente, en effet, la maigre pension servie aux handicapés et qui varie d'un cas à un autre, selon le taux d'invalidité, à côté des dépenses inestimables que génère le moindre handicap en termes de prise en charge médicale et sociale ? La saturation des établissements publics spécialisés, leur manque de moyens matériels et leur déficit en encadrement font que le recours aux structures de soins privées pour une radiologie, des séances de kiné ou pour d'autres soins spécialisés plus pointus, devient une nécessité quasi-quotidienne, dont dépend la survie du malade surtout lorsque sa pathologie est lourde. De nombreuses familles sont ainsi réduites à l'état de précarité sociale pour subvenir aux besoins de leurs malades. Les structures et les différents mécanismes mis en place par l'Etat pour venir en aide aux handicapés et leur faciliter l'accès aux soins et aux médicaments pour les handicapés ayant développé des maladies chroniques dans le sillage de leur handicap représentent une goutte d'espoir dans un océan de détresse et de désarroi pour les handicapés et leurs familles. A la détresse morale et psychologique à laquelle font face les handicapés, surtout pour les plus jeunes qui constituent la majorité - car il faudrait avoir la force morale d'affronter une société et un quotidien implacables où les personnes valides ont déjà beaucoup de mal à se frayer une place - s'ajoute ce difficile combat de tous les jours à mener contre la maladie qui ronge à petit feu le malade avec des moyens souvent dérisoires. Le problème de la prise en charge des handicapés relève d'abord de la responsabilité de l'Etat. Tout ce qui émanerait des citoyens et du mouvement associatif devrait venir en appoint. La solidarité citoyenne n'est pas faite et ne devrait pas être faite pour suppléer une carence ou une démission des structures publiques.