A un an de la présidentielle, Nicolas Sarkozy revient aux fondamentaux de la droite conservatrice. Pour éviter de présenter son bilan, il laisse ses ministres se lancer dans une surenchère censée contrer la remontée du Front national. Paris. De notre correspondant Brice Hortefeux et ses saillies humoristiques douteuses vous manquent ? Claude Guéant promet de faire oublier son prédécesseur, le cynisme en plus. Ses déclarations, cette semaine, participent au tsunami contre les étrangers, particulièrement les musulmans : «Les Français à force d'immigration incontrôlée ont parfois le sentiment de ne plus être chez eux», «Les Français veulent que la France reste la France». Et qui menacerait l'identité française ? «Nos compatriotes veulent choisir leur mode de vie, ils ne veulent pas qu'on (le) leur impose.» En français politique, cela signifie : les musulmans cherchent à imposer la chari'a. Et de relancer le débat sur l'Islam, sous couvert de la laïcité. Cette course contre l'extrême droite a trouvé une supportrice. Marine Le Pen, la fille de Jean-Marie Le Pen, lui décerne une médaille du mérite : «Comme il y a un début à tout, et que ça part d'une bonne intention, j'ai fait faire à M. Guéant sa carte d'adhérent de prestige. Il mérite d'être adhérent d'honneur et de prestige du FN», a ironisé la présidente du Front national. Ceux qui ne sont pas à la fête ne cachent pas leur colère. Le Conseil français du culte musulman (CFCM) a exprimé l'inquiétude et l'exaspération des musulmans qui se sentent «traités comme les boucs émissaires» des problèmes de la société française. «Les musulmans de France en ont marre d'être les boucs émissaires des problèmes de la société. Ils veulent être traités comme des citoyens à part entière, et non comme des citoyens entièrement à part», s'irrite Anouar Kbilech, secrétaire général du CFCM. Et d'annoncer le boycott du débat de l'UMP, le 5 avril. Le débat sur la laïcité, qui suscite les critiques à gauche et des réserves à droite, a déjà fait une victime en la personne de Abderrahmane Dahmane, le conseiller technique chargé de la diversité à l'Elysée, limogé en quelques heures. Le revirement de Boubakeur Le ministre de l'Intérieur, Claude Guéant, s'est employé, cette semaine, à rassurer les musulmans et à cadrer le débat de l'UMP sur la laïcité et l'Islam en excluant l'interdiction de l'arabe dans les prêches et en répétant que la loi de 1905 ne serait pas touchée. Le débat devrait porter sur les lieux de prière, la formation des imams, le port du foulard par les mères accompagnant les sorties scolaires, certaines pratiques à l'hôpital ou dans les salles de sport ou la viande halal dans les cantines scolaires. Le recteur de la Grande Mosquée de Paris, qui avait demandé l'annulation du débat avant de se raviser après une rencontre avec Jean François Coppé, patron de l'UMP, ne cachait pas sa satisfaction à la suite de la mise au point du ministre de l'Intérieur. «Nous sommes à 200% avec le ministre : il a vidé le débat de ses questions épineuses ou qui pouvaient prêter à polémique. Il a fixé les lignes rouges entre le religieux et le politique», s'est réjoui Dalil Boubakeur. Cette position lui a attiré les foudres du collectif Banlieues Respect, qui se déclare «totalement surpris et écœuré de ce revirement indigne et à 180 degrés de Dalil Boubakeur». Pour Banlieues Respect, «la Grande Mosquée de Paris a perdu toute crédibilité auprès d'une large majorité de Français musulmans».