Les étudiants ne décolèrent toujours pas. Les médecins résidents lancent un défi à Ould Abbès. Les gardes communaux menacent d'«encercler» la Présidence. Les paramédicaux reprennent leur grève. La contestation sociale, qui persiste depuis plusieurs semaines, ne cesse de s'amplifier et de s'accentuer. Aucun secteur n'est désormais épargné. Le travail de la majorité des ministères de la République est remis en cause. La quasi-totalité des ministères du gouvernement Ouyahia ont perdu leur crédibilité.Et c'est loin d'être fini pour les quelques départements qui ont fait des concessions pour les protestataires. C'est le cas de ceux de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, de la Santé, de l'Intérieur et des Collectivités locales. Cette situation d'agitation ne profite qu'aux organisations syndicales, notamment autonomes, qui s'adonnent à des démonstrations de force. Ces mouvements de contestation ont donné la preuve aux Algériens que la lutte, la résistance et la persévérance dans la défense de leurs droits suffisent pour faire plier le pouvoir. Après un mois de mars époustouflant, le mois d'avril s'annonce encore plus «chaud». Dès sa première semaine déjà, plusieurs actions de protestation dans des différents secteurs sont prévues. Encouragés par un exemple concret du militantisme réaliste jusqu'à pleine satisfaction des revendications, les divers mouvements syndicaux veulent rééditer l'exploit des enseignants contractuels qui ont arraché leur intégration après dix jours de sit-in devant le palais présidentiel, à El Mouradia. Ces derniers, d'ailleurs, n'ont pas mis complètement fin à leur expression de colère. Ils sont prêts à reprendre, de la plus forte manière, leur contestation en cas de quelconque marche arrière de la tutelle. «Nous n'hésiterons pas à reconquérir la place si notre intégration s'avère non effective», a menacé Myriem Maârouf, présidente du Conseil national des enseignants contractuels (CNEC). La lutte estudiantine reprend A partir de la rentrée des classes d'aujourd'hui, la décision d'intégration des enseignants contractuels devrait prendre effet. «Les consignes et les décisions de titularisation des enseignants contractuels en poste devraient être exécutées dimanche et lundi», a indiqué Mme Maârouf. Et de préciser : «Quant aux ingénieurs, le ministre de l'Education nationale a promis de tous les aider dans une réorientation professionnelle vers leurs domaines de spécialité.» Pour leur part, les adjoints de l'éducation maintiennent la pression sur le département de Benbouzid. Dans le même sens, les étudiants décideront aujourd'hui des suites à donner à leur mouvement de grève. Après quinze jours de vacances, la rentrée est-elle envisageable ? Un membre de la Coordination nationale autonome des étudiants (CNAE) nous répond : «Nous tiendrons les assemblées générales prévues dans chaque faculté afin de décider de la façon dont il faut procéder avec le retard enregistré et les examens ratés. Toutefois, il n'est pas question de renoncer à notre démarche nationale de contestation.» «Nous refusons les résolutions de la conférence nationale. Toutes nos aspirations ont été trahies par la tutelle. D'ailleurs, plusieurs délégués ont regretté leur participation à cette réunion protocolaire et refusé de signer ses PV», a-t-il soutenu. Et d'ajouter : «La CNAE appelle l'ensemble des comités autonomes de toutes les facultés et grandes écoles, notamment celles de Boumerdès, à soutenir la marche du 12 avril prochain et maintenir la pression sur la tutelle jusqu'à la satisfaction de la plateforme nationale de revendications.» Sur le même volet, les médecins résidents n'ont pas lâché du lest. Ils sont déterminés à poursuivre leur débrayage jusqu'à ce que le ministère de la Santé «s'assoie réellement à la table du dialogue» pour régler les problèmes qui rongent ce corps sensible. Après plusieurs grèves cycliques, ces médecins en formation sont en grève illimitée depuis près d'une semaine. «La dernière réunion avec Ould Abbès a été un échec total», affirment-ils. Selon le Collectif autonome des médecins résidents, leurs revendications sont ignorées par les ministères de la Santé et de l'Enseignement supérieur, à savoir l'abrogation du service civil, la révision du statut particulier et la revalorisation des salaires. Le ministre de la Santé n'est pas au bout de ses peines : les paramédicaux reviennent à la charge. Organisé sous la chapelle du Syndicat algérien des paramédicaux (SAP), ce personnel paramédical entamera une grève illimitée à partir d'aujourd'hui. Le SAP reproche à sa tutelle de ne pas répondre aux revendications des paramédicaux comme le classement du diplômé (bac+3) à la catégorie 11 et la mise en œuvre de leur statut particulier. Ce deuxième débrayage risque de paralyser complètement les enceintes hospitalières à travers le pays, au grand malheur des citoyens qui devront éviter de tomber malades ces jours-ci ! Le département d'Ould Kablia ne peut pas, non plus, se «procurer» le moindre bout de tranquillité. Les gardes communaux menacent d'«encercler» la Présidence. Ils regrettent que «le ministère n'ait pas satisfait convenablement les revendications exprimées lors du rassemblement à Alger, le 7 mars dernier». Les gardes communaux chez le Président Le ministère de l'Intérieur devra faire face également à un nouveau mouvement de protestation des travailleurs communaux. Les fonctionnaires des communes menacent de paralyser l'administration pendant cinq jours et d'organiser un sit-in à Alger le 14 avril prochain. Dans cette perspective de mécontentement national, nul n'est ménagé. Le ministère de la Défense nationale est interpellé par les «radiés de l'armée pour des raisons disciplinaires». Ces ex-militaires ont observé une grève de la faim, la semaine passée, pour réclamer des indemnités pour certains et une réintégration pour d'autres. Restent aussi en suspens les mouvements de contestation dans les deux corps des finances et du commerce.