L'absence d'une stratégie de développement à long terme a toujours été le principal facteur de blocage auquel est confrontée la filière céréalière en Algérie. Les études menées et les différents travaux de recherche depuis des décennies ont toujours mis en évidence cette lacune dont les conséquences sont aisément reflétées à travers les rendements à l'hectare qui demeurent des plus faibles, ne dépassant pas les 20 quintaux/hectare dans les meilleurs des cas. Le professeur Abdelkader Djermoun du département d'agronomie de l'Université de l'université de Chlef met clairement en évidence ces contraintes dans son étude « la production céréalière en Algérie : Les principales caractéristiques » qui se penche sur cette filière stratégique depuis l'indépendance jusqu'aux dernières mesures de soutien mises en œuvre en 2008. il y est conclu en conséquence : «Malgré les efforts déployés en matière de développement de la céréaliculture, entre autres l'introduction de nouveaux facteurs de production et la tentative de mise en place d'une agriculture technique (intensification), la céréaliculture reste caractérisée par des variations notables liées au paramètre climatique qu'il est difficile à maitriser. La production céréalière en Algérie est fortement dépendante des conditions climatiques. Cela se traduit d'une année à l'autre par des variations importantes de la SAU, de la production et du rendement. Ainsi, le manque de précipitations, mais aussi la mauvaise répartition des pluies pendant l'année explique en grande partie la forte variation de la production céréalière. Le soutien systématique des prix des produits céréaliers a été, en ce sens, à l'origine de l'accroissement de la consommation et, partant, de la demande en ces produits. C'est au marché mondial que la demande, ainsi suscitée, a été adressée. Ces fluctuations se répercutent sur les importations, sur les finances de l'Etat (prix de soutien au blé tendre et subvention de la farine nationale de blé tendre, FNBT) et sur le revenu et les dépenses des agriculteurs. La valorisation des prix à la production au cours de la campagne écoulée (juin 2008), avec l'élévation des prix de blé dur à 4500 DA/q et le prix de blé tendre à 3500 DA/q pourrait mieux inciter les agriculteurs à fournir davantage d'efforts en matière d'augmentation de la production locale et de contribuer à l'amélioration du taux d'autosuffisance pour ces produits stratégiques. Néanmoins, le secteur céréalier suscite une attention particulière et une importance considérable en matière d'investissement, de vulgarisation, d'amélioration génétique et toutes autres actions susceptibles d'améliorer la productivité. Une stratégie claire s'impose avec acuité en vue de relever ce défi». Près de 1/3 des surfaces non récoltées Pour sa part, Mohamed Elyes Mesli, agronome et ancien ministre de l'Agriculture a saisi la problématique de la céréaliculture en Algérie avec une autre dimension. Il se penchera, en effet, sur l'écart entre les surfaces ensemencées et celles récoltées habituellement. « Les céréales s'étendent, selon les années, sur 3,2 et 4 millions d'hectares. La moyenne des surfaces ensemencées en céréales, calculée sur vingt années, est de 3,7 millions d'hectares tandis que celle des superficies récoltées sont de l'ordre de 2,7 millions d'hectares. Ainsi, près d'un million d'hectares ne sont pas récoltés, soit près de 27% ! », écrit-il dans son livre « l'agronome et la terre ». D'autre part, c'est la part de la jachère qui demeure importante. A cet égard, M. Mesli expliquera que «la non-culture d'une grande partie des terres est (due) aux conditions climatiques. Il existe une corrélation entre les ensemencements en céréales et les terres laissées en jachère. Les (terres ensemencées) sont plus élevées durant les années pluvieuses alors que les terres en jachère sont plus élevées pendant les années de sécheresse ». Compte tenu du caractère stratégique de cette filière, c'est une perception pour la céréaliculture qui est proposée : «Les données brutes relevées in fine (35% des surfaces cultivées réservées à la céréaliculture et 70% des besoins céréaliers importés, le faible degré d'autonomie pour le blé et les céréales fourragères (le maïs en particulier) font que la question de la céréaliculture ne saurait être traitée comme n'importe quelle autre production agricole. Il s'agit là d'un produit de sensibilité élevée».