La signature, mercredi soir, d'un accord entre le Hamas et le Fatah, au Caire, marque sans doute un tournant dans l'histoire du peuple palestinien. Au programme : l'organisation d'élections dans un an, la formation d'un gouvernement intérimaire et l'intégration du Hamas à l'OLP. Ce qui paraissait, il y a encore quarante-huit heures, quasiment impossible tellement leurs positions étaient éloignées – ou du moins semblaient l'être – vient de se réaliser. Le mouvement Hamas, qui contrôle la bande de Ghaza depuis juin 2007, suite à un putsch armé, et le mouvement Fatah, la colonne vertébrale de l'Organisation de libération de la Palestine (OLP) depuis plus de quarante ans, se sont entendus, mercredi 27 avril, au Caire, la capitale égyptienne, sur la formation d'un gouvernement transitoire. Sa principale mission : organiser des élections législatives et présidentielle d'ici un an. Cette évolution surprenante a été confirmée par des responsables des deux plus populaires factions palestiniennes. Peu de temps après la signature d'un accord préliminaire, Mahmoud Ezzahar, un des hauts responsables du Hamas à Ghaza, membre de la délégation du mouvement islamiste, a déclaré sur les écrans de la chaîne qatarie Al Jazeera que les deux parties se sont mises d'accord pour former un gouvernement intérimaire regroupant des personnalités indépendantes. Azzam El Ahmad, membre du comité central du Fatah et chef de sa délégation au Caire, a confirmé les propos du responsable hamsaoui. Au cours d'une conférence de presse commune avec Moussa Abou Marzouk, numéro deux du bureau politique du Hamas et chef de sa délégation, Al Ahmad a déclaré que la Ligue arabe supervisera l'application de l'accord de réconciliation qui, selon lui, a été le fruit de plusieurs rencontres ayant eu lieu loin des médias. Ou Israël, ou le Hamas Pour la rue palestinienne, qui avait perdu tout espoir de voir les frères ennemis arriver à un tel accord, la surprise était grande. Beaucoup de gens n'arrivent toujours pas à croire que l'accord conclu au Caire sera réellement appliqué sur le terrain, tellement leurs déceptions étaient douloureuses à l'occasion de l'annonce des multiples arrangements passés qui sont tous restés sans concrétisation. Car, effectivement, plus de deux ans de longues discussions entre les deux factions rivales n'avaient conduit qu'à approfondir les différends et les divisions interpalestiniennes au point de mettre en péril l'avenir de la cause palestinienne. L'annonce de cet accord de réconciliation semble toutefois gêner Benyamin Netanyahu : il a demandé à l'Autorité palestinienne et à son président, Mahmoud Abbas, de choisir entre la paix avec Israël ou la paix avec le Hamas. «L'Autorité palestinienne doit choisir entre la paix avec Israël ou la paix avec le Hamas. La paix avec les deux n'est pas possible. Le Hamas veut la destruction d'Israël et tire des roquettes sur nos villes, sur nos enfants», a déclaré le Premier ministre israélien à la télévision. Depuis son accession à son poste, en février 2009, Netanyahu a utilisé la division palestinienne comme prétexte pour échapper aux obligations du processus de paix. Mettant en doute la représentativité du président Mahmoud Abbas, il répétait à l'envi qu'il n'avait aucun pouvoir dans la bande de Ghaza où vivent plus d'un million et demi de Palestiniens. Le porte-parole de la présidence palestinienne, Nabil Abou Roudeina, a déclaré de son côté : «L'accord a fait tomber le prétexte de la division des mains des Israéliens qui l'utilisaient pour se soustraire des obligations du processus de paix.» Al Qods, capitale Et d'ajouter : «L'accord entre les mouvements Fatah et Hamas est une affaire interne qui ne concerne pas Israël, qui consolidera l'unité du peuple palestinien et sa juste lutte pour son droit à établir son Etat palestinien avec Al Qods comme capitale.» Répondant à Netanyahu quant au choix que doit faire l'Autorité palestinienne, le porte-parole a demandé au Premier ministre israélien de «choisir entre la paix avec le peuple palestinien unifié et son représentant unique et légitime (faisant référence à l'OLP, ndlr) et la colonisation». La Maison-Blanche a rappelé qu'elle tenait le Hamas pour «une organisation terroriste» et ajouté que tout gouvernement palestinien devrait renoncer à la violence. Un responsable américain a noté qu'il devrait aussi respecter les accords de paix passés et reconnaître le droit d'Israël à l'existence. En fin de compte, quelles que soient les véritables causes ayant conduit à cet accord – chamboulements dans les pays arabes et surtout changement du régime en Egypte et révolution populaire en Syrie où se trouve le siège du bureau politique du Hamas – la signature, dans une semaine, de l'accord final de réconciliation en présence du président palestinien, Mahmoud Abbas, et du chef du bureau politique du Hamas, Khaled Mechaal, en présence des représentants de toutes les factions palestiniennes, sera un tournant dans l'histoire du peuple palestinien qui aspire depuis plus de soixante ans à un Etat libre et indépendant, dans lequel il peut réaliser ses ambitions, à l'image de tous les peuples de la planète.