Une année après sa mise en application dans le cadre de la réforme de l'enseignement supérieur, le système LMD (licence, master, doctorat) a encore besoin d'une meilleure stratégie d'information. Le constat est fait à l'université Abderahmane Mira de Béjaïa à la lumière des travaux d'une rencontre internationale de deux jours organisée par la Faculté des lettres et des sciences humaines (FLSH) et qui a regroupé, au campus d'Aboudaou, des représentants des universités d'Oran, Constantine, Souk Ahras, Annaba, Mascara, Tizi Ouzou, Tlemcen et Béjaïa. Faut-il noter que le cachet « international » tient à la seule participation du docteur David Winterstein (USA), enseignant au département d'anglais à l'université de Béjaïa. Si ces deux journées ont permis certains éclaircissements, elles n'ont pas manqué, en revanche, de confronter des inquiétudes fortement exprimées par les étudiants à l'assurance appuyée de l'administration. La nouveauté du système et l'incertitude de ses résultats pour certains apprenants, encore dans le doute, sont des mobiles suffisants d'inquiétude. Au centre des débats, ce sont les nouveaux concepts de l'immobilité et de l'autonomie de l'étudiant, mais aussi de l'adaptation des mentalités à la réforme qui sont les mots-clés de la problématique. Le LMD est basé sur une architecture de trois paliers de formation (3, 5 et 8 ans) et permet un enseignement individualisé avec la nouvelle fonction de tutorat, une gestion pédagogique fondée sur la semestrialisation et les unités d'enseignement liées à un système de crédits capitalisables et transférables. D'où l'avantage de la mobilité de l'étudiant qui lui permet cette possibilité, soulignée par le recteur, de faire « ses S1 et S2 (semestre) à Béjaïa, son S3 à Paris VI, son S4 à Amiens, ... sans équivalence ». La mobilité est aussi vérifiable dans le retour au même palier d'études après un passage dans le monde du travail. A la FLSH, le système LMD est appliqué dans les départements de français et d'anglais. « Pour l'arabe et la langue et culture amazighes, ce sera pour l'année prochaine », selon Salah Derradji, doyen de la Faculté des lettres et des sciences humaines qui note aussi que « le LMD fonctionnera selon les besoins de la société ». Moyens insuffisants Des objectifs par quels moyens ? « Enseignement frontal généralisé (parler-écouter), style d'apprentissage basé sur la dépendance pédagogique, TIC (technologie d'information et communication) réduite, pédagogie obsolète... » c'est ce que relève en réalité le professeur Mohamed Miliani, de l'université d'Oran, qui s'est interrogé, en conclusion de son exposé, sur la praticabilité de l'autonomie de l'étudiant dans le fonctionnement actuel du LMD. Du côté des étudiants qui relèvent des obstacles sur le terrain, on regrette que le dispositif administratif ne puisse pas suivre avec les moyens nécessaires. « Il y a un manque de livres dans la bibliothèque », s'est plaint un étudiant en 2e année d'anglais, rejoint par un autre en 2e année de français, qui voit dans cette autonomie une façon de « faire partager la responsabilité d'un éventuel échec du système aux étudiants ». « A ce jour, nous n'avons eu que 3TD. Apportez-nous des profs », a réclamé un autre étudiant. Pour l'administration, les postes budgétaires existent, le problème réside dans « la rareté des profs » comme l'a déclaré le recteur, Djoudi Merabet, qui a été amené à préciser que « rien n'a été imposé à l'université de Béjaïa » en expliquant que l'application du système LMD répond à un cahier des charges et que « tous les outils de modernité sont mis en place ». « 40 licences professionnelles déjà lancées, 3000 prises Intranet et Internet, 30 km de fibres optiques, 4 milliards de centimes par année pour l'achat de livres, 4 labos dotés de 96 micro-ordinateurs... », énumère-t-il pour étayer sa conviction « d'être dans le processus de formation des compétences ». Pour la bibliothèque, il promet, tout convaincu d'être en face d'un problème de mentalités, « que cela va changer » en annonçant, entre autres, la possibilité des abonnements on line et l'inscription d'un projet d'informatisation de celle-ci avec une enveloppe de 300 000 euros. Visiblement encore sur leur faim, les étudiants qui gardent encore leur « peur bleue » se sont quittés avec le souhait d'être invités à d'autres rencontres similaires.