Profitant de la mondialisation et du libre- échange, la contrefaçon et les produits non conformes aux normes nationales et internationales se propagent de façon exponentielle, n'épargnant aucun pays ni aucun secteur d'activité, mettant ainsi en danger la vie des consommateurs. Des chiffres alarmants font état de la croissance vertigineuse de ce phénomène. Aujourd'hui, les produits de la contrefaçon représentent entre 25 et 30% du marché national, et entre 7% et 10% du commerce international. Alors qu'elle s'est longtemps limitée aux produits de luxe (maroquinerie, bijoux, horlogerie, mode vestimentaire, etc.), la contrefaçon vise maintenant les nouvelles technologies, les logiciels informatiques, les jouets, les médicaments, les pièces de rechange automobiles ou encore les produits de construction. En Algérie, ce fléau touche 60% du marché de la cigarette, plus de 50% du marché de la pièce de rechange, 40% des produits de beauté, 30% de l'habillement, et 12% des produits électroménagers. Autant de produits nocifs et dangereux pour la santé des consommateurs qui, non seulement se vendent au marché parallèle, mais aussi dans des magasins des grandes villes. Ces produits de mauvaise qualité, telle que les pièces détachées pour automobiles dont la durée de vie est très limitée, sont responsables d'un grand nombre d'accidents. Selon les statistiques, au moins 10 à 20%, des accidents de la route sont imputables à ces pièces. En 2009, le marché de la pièce de rechange a été consolidé par de nouvelles dispositions établies par le ministère du Commerce. Elles obligent les concessionnaires «de réorganiser leurs réseaux d'importation et de distribution de la pièce de rechange en Algérie. Les pièces non importées depuis les pays constructeurs ne seront plus autorisées en Algérie ». Le produit contrefait n'est malheureusement pas l'unique menace pour la santé publique. Les produits de grande consommation alimentaire et non alimentaire non contrôlés ou ne répondant pas aux normes, telles que le lait et les viandes, les eaux minérales, les œufs, les confiseries et les produits pharmaceutiques, sont réellement nuisibles et pourraient causer de graves préjudices. Il est donc plus que nécessaire, d'adopter une politique stricte quant au contrôle de ces produits. Les cosmétiques ainsi que les vêtements, peuvent eux aussi provoquer des dommages irréversibles. D'ailleurs, les dermatologues sont unanimes à ce propos. Ils mettent en garde les utilisateurs contre les risques de cancer de la peau, les allergies et les eczémas. 11 000 tonnes de produits non-conformes Consciente des dangers que peut engendrer la commercialisation des produits contrefaits ou non conformes, l'Algérie a mis en place une série de mesures par le biais du ministère du Commerce, pour tenter de réduire ce fléau et protéger les consommateurs. En 2010, plus de 1,6 million d'articles contrefaits ont été saisis par les services des douanes algériennes. Quelque 11 000 tonnes de produits non conformes, d'un montant de 280 millions de dinars, ont été également saisis au niveau des frontières du pays par ses services de contrôle durant la même année, selon le ministre du Commerce, Mustapha Benbada. Ce dernier a précisé, par ailleurs, que 480 000 interventions de ses services ont permis de soumettre au contrôle 6 500 échantillons, de constater 74 000 infractions et de délivrer 71 000 Procès-verbaux. A noter que chaque année entre 7 000 et 9 000 faux importateurs sont découverts et pas moins de 400 cas de fraude commerciale sont enregistrés régulièrement au niveau des services portuaires et aéroportuaires. En mars dernier, la Banque d'Algérie annonçait l'abrogation de la note n°16 du 16 février 2009 relative au contrôle des importations de biens réglées par crédit documentaire obligeant les importateurs à fournir un certificat phytosanitaire, un certificat de qualité et un certificat d'origine lors d'une opération commerciale. Néanmoins, la Banque d'Algérie a imposé aux banques agrées de veiller sur la conformité des opérations de commerce extérieur. Compte tenu du trouble que cette note avait suscité, le ministère de tutelle a confirmé les mesures existantes à savoir la nécessité pour les importateurs de présenter un certificat « d'autocontrôle » pour tous les produits importés, particulièrement ceux vendus en l'état, tout en précisant que ce document «n'exempte pas les produits concernés du contrôle de la qualité et de la répression de fraude relevant du ministère ». Cette démarche vise principalement à mieux cerner ce phénomène et à protéger le consommateur, mais le terme « d'autocontrôle » crée, d'une certaine façon, la confusion parmi les importateurs algériens qui se demandent comment les exportateurs pouvaient s'autocontrôler. A ce propos, le département du commerce explique que l'autocontrôle consiste «à soumettre les produits, avant embarquement à des tests pour s'assurer de leur conformité». Dissuader par la sanction Au travers de la loi de protection du consommateur de 2009, les autorités nationales, ont mis l'accent sur la nécessité de renforcer les services de contrôle à travers des moyens adaptés aussi bien matériels qu'humains. Ces contrôles se doivent être fiables, reproductibles et perpétrés quelle que soit l'origine. Le contrôle, effectué en accord avec les normes algériennes, dans les pays d'exportation permettrait de limiter l'arrivée de produits non désirés sur le sol algérien ; il se doit donc d'être réalisé en toute indépendance des fabricants et/ou exportateurs. De nombreux Etats ont mis en place un programme de contrôle dans le pays d'exportation défini conformément aux exigences et à la souveraineté du pays importateur. Ce programme s'est avéré très efficace et a permis la réduction de façon significative les imitations frauduleuses et la mise en vente des produits non conformes. Il est évident que le contrôle de qualité à lui seul ne suffit pas à enrayer à 100% les produits non conformes ou contrefaits sur le marché tant national qu'international. Néanmoins, l'exemple des autres pays en matière de lutte contre ce fléau, pourrait encourager l'Algérie dans ses démarches de protection des consommateurs. Enfin, la sanction se doit de dissuader la fraude. A cet effet, les sanctions prévues par la loi, consistent à la confiscation des produits, leur destruction et leur mise hors circuit commercial. De plus, les personnes impliquées dans l'imitation frauduleuse encourent des amendes égalant une fois la valeur du produit confisqué et une peine d'emprisonnement de deux à six mois, selon l'article 30 de l'ordonnance 66-57 du 19/3/66 relative aux marques de fabrique et de commerce. Face à une présence toujours aussi importante de produits non conformes et dangereux en Algérie, il est devenu indispensable, aujourd'hui, selon les autorités concernées, d'améliorer la compréhension et la prise de conscience des effets graves et néfastes que ces produits peuvent avoir sur la santé et la sécurité des consommateurs. - Sihem Touati. Journaliste spécialisée (Synapse com.)