Depuis que le gel de Hassi Messaoud a été décidé par les pouvoirs publics en 2004, la débrouillardise et l'informel ont élu domicile dans cette ville du sud du pays et, par ricochet, à Ouargla, le chef-lieu de la wilaya, dont les communes périphériques sont devenues le terrain de domiciliation commerciale privilégié des investisseurs et commerçants venus de tout le territoire algérien. - Pouvez-vous d'abord nous parler du cas des marins sans salaire, car n'ayant pas pu embarquer depuis plusieurs mois ? Où se situe exactement le problème ? Peut-on savoir à quoi a abouti la réunion que vous avez tenue avec les marins protestataires ? Il faut savoir que nos marins embarquent en moyenne pour une période de 6 mois et restent à terre pour une même période. Le cas de certains marins qui ont dépassé cette période est dû aux difficultés de relève des équipages dans certains pays et des durées d'escales des navires. Cet état de fait est totalement indépendant de notre volonté puisque c'est l'affréteur en «coque nue» qui exploite commercialement les navires, et du coup c'est les deux équipages qui sont pénalisés, puisque celui qui est à bord aussi doit prendre ses congés. Quant à la réunion de jeudi, à la demande légitime des marins et officiers, il a été décidé de créer un syndicat des marins, et c'est dans ce contexte que nous avons provoqué une assemblée générale des travailleurs, d'où s'est dégagée la mise en place d'une commission de préparation des élections des membres représentants du personnel navigant. Cette initiative permettra la prise en charge des problèmes socioprofessionnels de ces derniers. - Dans le contrat de partenariat conclu entre CNAN Group et le groupe jordano-saoudien Pharaon qui contrôle votre compagnie à hauteur de 51%, il était prévu le maintien en poste des 360 employés. Aujourd'hui, vos effectifs sont au nombre de 260. La pérennité de l'emploi n'était-elle pas l'un des engagements pris par le partenaire étranger lors du rachat de la CNAN Sud ? En effet, à la création d'IBC, en 2007, l'effectif était de 360 marins et officiers. Entre temps une centaine d'entre eux sont partis en retraite ou revenu vers CNAN GROUP pour un départ volontaire moyennant un bonus. Le problème des effectifs est un problème de catégorie professionnelle. Nous avons une pléthore de personnel navigant subalterne et un immense déficit en personnel officiers. Aujourd'hui pour armer les huit navires, il nous manque 85 Officiers. - Pharaon s'était également engagé à rénover les huit navires et à en acquérir d'autres, c'est-à-dire le renouvellement de la flotte à court terme… La maintenance à niveau périodique des navires est obligatoire pour l'obtention des certificats de navigation et donc l'affréteur n'a d'autre alternative que de procéder à cette maintenance et à cette mise à niveau. Il y a eu certes des projets d'acquisition et de vente de certains navires, mais ceux-ci n'ont pas abouti à cause de divergence de point de vu entre les associés. - Cnan Group a ouvert le capital de cette filiale à hauteur de 18 millions de dollars. La participation des trois nouveaux partenaires ? Les investissements consentis ? Le groupe Pharaon/CTI/ Laradji a pas injecté 9 486 000 US$, représentant 51% du capital qui était de 18 600 000 US$. Outre ce paiement, le partenaire a consenti, dans le cadre du contrat de cession des actions, un prêt de 5 millions de US$ à la société remboursable sur 5 ans. - Etes-vous parvenus à un terrain d'entente sur les 12 millions de dollars que vous réclame CTI en contrepartie du retour des trois bateaux, Djebel Onk, Rafaa et Ksel, de l'IBC bloqués en Grèce depuis 2008 ? Les 12 millions de US$ que réclame CTI seraient du au titre de la remise en état de trois navires appartenant à IBC par CTI. Nous avons estimé que ces montants ne correspondaient pas aux standards généralement admis dans la profession. Ce contentieux est actuellement en arbitrage à la Chambre de commerce international de Paris. Quant aux 3 navires que vous citez, ils sont, à l'instar des 05 autres, affrétés à Lead Arrow, filiale de CTI. Cet affréteur a choisi de mettre en «Lay Up» ces 3 navires. C'est-à-dire, arrêter de les exploiter commercialement pour un problème de rentabilité. Ceci ne regarde que l'affréteur du moment que notre société continue de lui facturer la location des navires. - La même année, 2008, vos partenaires ont décidé d'interrompre le transfert du produit de fret. Pourquoi ? Est-ce toujours le cas ? C'est CTI qui a interrompu le transfert du produit de la location des navires (et non du fret) suite au contentieux cité précédemment. Le litige comme nous l'avons dit est au niveau de l'arbitrage. Cet état de fait pèse effectivement sur les états de trésorerie de la société, puisqu'elle est privée de sa seule source de revenus, en attendant la décision de l'arbitrage. - Quel bilan faites-vous des trois années de partenariat avec Pharaon/CTI/Laradji ? CNAN Group avait-il vu juste en ouvrant le boulevard aux capitaux étrangers ? Le partenariat, mis à part le maintien de quelques postes d'emploi et le maintien de 08 navires sous pavillon algérien, a très peu rapporté. Nous nous sommes contentés de louer les navires en «coque nue» et d'encaisser le produit de la location de ces navires. La gestion et l'exploitation des navires étant du ressort de l'affréteur et donc du partenaire, nous n'avons pas pu profiter de son savoir-faire ni de son expérience. Quant au choix de CNAN Group concernant l'ouverture des capitaux de ses filiales aux étrangers, il faut savoir que dans le contexte qui prévalait à cette époque, CNAN Group devait soit ouvrir les capitaux, soit vendre ce qui restait de la flotte et disparaître. La première option, avalisée par le C P E en ce temps là, avait été choisie. - Le secteur du transport maritime national et international a-t-il, lui aussi, pâti des prolongements de la crise économique mondiale ? Le secteur du transport maritime international peine à se relever de la récente crise financière et économique. Plusieurs armateurs avertis subissent, à ce jour, de plein fouet cette crise. Le marché national du transport maritime profite malheureusement aux armateurs étrangers. Mis à part le transport des hydrocarbures assuré par l'Hyproc (filiale de Sonatrach), l'armement national a disparu. Combien même l'état investirait dans l'acquisition d'unités marchandes, le problème des ressources humaines reste à résoudre. Le personnel d'encadrement à terre pour une exploitation commerciale et technique performante au niveau international (la concurrence est rude) n'existe pas et devra donc être formé. En ce qui concerne le personnel navigant, le personnel qualifié disponible aujourd'hui est très en deçà de la demande, sa moyenne d'âge variant entre 50 et 55 ans. Il faut au moins 10 ans pour former un Capitaine, et au moins 02 ans pour un simple matelot de quart. - Les dix-sept marins algériens détenus en otages par des pirates somaliens depuis le 1er janvier dernier sont à leur cinquième mois de détention. Pour le moment, rien n'a filtré sur le niveau ni la teneur des négociations engagées par l'affréteur du Blida. Du nouveau ? Comme vous le dites, rien n'a filtré sur la teneur des discussions engagées par l'affréteur. Tout ce que l'on sait est que les marins sont sains et saufs, que le navire est au mouillage à 500 m des côtes somaliennes et que le dialogue avec les pirates n'est pas interrompu. Nous sommes constamment en contact avec l'affréteur et faisons régulièrement des points de situation avec les familles des marins. Nous rapportons toute information pertinente à la cellule de crise installée au niveau du Ministère des Affaires étrangères qui suit avec attention et de manière régulière le développement de cette affaire.