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Les reniements de l'Exécutif sur fond d'opportunisme politique Passeport biométrique, permis de conduire, lutte contre l'informel, limitation du mandat présidentiel
Recul sur le certificat de nationalité pour le renouvellement de la carte d'identité nationale et du passeport. Recul sur la lutte contre l'informel et l'obligation du paiement par chèque au-delà de 500 000 DA. Recul sur le 12 «S» après en avoir fait la panacée du bonheur «biométrique». Recul sur le durcissement des mesures de retrait de permis avant de revenir à une démarche répressive à l'égard de la délinquance automobile. Recul sur la hausse des prix de l'huile et du sucre en réponse aux émeutes de janvier. Dernier fait en date de la série : le RND, et par ricochet, son secrétaire général et par ailleurs Premier ministre, Ahmed Ouyahia, vient d'annoncer dans la foulée des consultations présidentielles, son recul sur le principe des mandats illimités à la magistrature suprême en appelant à «une organisation du pouvoir exécutif favorisant la consolidation du pluralisme politique à travers une fonction présidentielle avec un mandat de 5 ans renouvelable une seule fois». Voilà un net progrès démocratique par rapport à l'attitude de ce même parti, et de la majorité présidentielle dans son ensemble, qui cautionna l'amendement constitutionnel du 12 novembre 2008 qui avait mis Abdelaziz Bouteflika sur le chemin de la présidence à vie. A cette liste qui est loin d'être exhaustive, on pourrait peut-être adjoindre cette déclaration de Daho Ould Kablia à propos des partis politiques : «Le ministère de l'Intérieur aurait pu geler les activités de 50% des partis politiques agréés. Mais nous n'appliquons pas la loi dans toute sa rigueur.» Si nos concitoyens ont montré des signes de soulagement sur nombre de ces «volte-face» tant le caractère inique de ces lois était de nature à susciter l'indignation davantage que l'adhésion, il faut convenir que cela ne rassure guère quant à l'assise philosophique qui sous-tend ce dispositif de gouvernance. Il n'y a qu'à voir la cacophonie qui caractérise l'environnement économique, et que n'ont de cesse de déplorer nos capitaines d'industrie en pointant à chaque fois du doigt l'inconstance du cadre juridique régissant l'investissement dans notre pays comme l'illustre toute l'incompréhension soulevée par la loi de finances complémentaires de 2009. Selon un rapport de la Banque mondiale, l'Algérie est classée à la 136e place sur 183 pays sous le critère du climat des affaires, et la confusion qui caractérise notre système bureaucratico-légal n'est sans doute pas étrangère à ce classement. Il faut le dire une fois pour toutes : les lois sous nos latitudes sont faites pour être piétinées, détournées, mises sous le boisseau. On leur tord le cou à la guise des puissants, et quand il n'y a plus moyen de s'en accommoder, on les remet dans le tiroir, tout simplement, sans crier gare. En témoigne la loi sur les hydrocarbures qui fut votée au pas de charge sous la conduite de Chakib Khelil, avant qu'elle ne soit déclarée… antinationale, et son promoteur chassé du sérail sans autre forme de procès. Annonce s croustillantes L'on n'a que trop insisté sur le caractère inhibiteur des «sautes d'humeur» du Président, et l'effet «nocif» de ses états d'âme sur ses plus proches collaborateurs. De là à suggérer que ce climat psychologique influe jusque sur le contenu imprimé aux lois du pays et les tâtonnements de l'Exécutif, il n'y a qu'un pas. L'acte de gouvernance, et plus généralement, l'acte de gestion, n'en sort pas épanoui en tout cas, surtout pas face à un président autoritaire et ombrageux connu pour ses foucades. Nos gestionnaires n'ont que trop souffert de se voir, en gros, coincés, entre deux institutions «castratrices» : la présidence de la République et le DRS. Entre les deux : Ouyahia, l'homme dont l'histoire de l'Algérie contemporaine retiendra qu'il a jeté injustement des centaines de cadres en prison. D'ailleurs, nous ne pouvons que nous féliciter de la dépénalisation de l'acte de gestion après que des milliers de managers eurent fait les frais de politiques dont ils ne sont pas toujours comptables. Force est de constater, par ailleurs, que nos lois sont rarement l'objet d'un contrat social effectif entre la société et ses gouvernants. Nous avons trop pris l'habitude, en définitive, de voir nos gouvernements s'ériger sur des arrangements de clans, jamais sur une base élective ou même doctrinale. La seule source de légitimité de nos dirigeants, c'est l'attrait du pouvoir, le pouvoir pour le pouvoir, sans grande idée morale ni projet. Sans foi ni loi, somme-nous tentés d'ajouter. A défaut d'être guidées par des principes supérieurs, les lois auraient gagné à trouver leur inspiration première dans les préoccupations du peuple comme dépositaire de la souveraineté, et les intérêts de la nation comme source privilégiée de l'action publique. C'est en effet le processus même ayant présidé à la promulgation des lois qui est en cause. Il y a lieu d'observer, en l'espèce, que l'acte législatif a eu à pâtir considérablement de l'affaiblissement de l'institution parlementaire. L'APN aussi bien que le Sénat se contentent de la formalité de validation des projets de loi à la quasi-unanimité des députés et autres sénateurs de la République, avec, à la clé, des «oui» massifs. Il est inutile de préciser que l'action du gouvernement échappe totalement à leur contrôle. Dans son dernier discours à la nation, le président Bouteflika avait fait force annonces croustillantes assorties de révisions imminentes des textes majeurs en vigueur, à commencer par la loi fondamentale. Et comme le soulignait à juste titre Abdelhamid Mehri en réponse à ces belles réformes sur le papier, ce ne sont pas tant les textes qui posent problème, car, dit-il : «Les défauts du système actuel résident beaucoup plus dans ses pratiques que dans les textes.» De fait, même quand les meilleures lois sont conçues, encore faut-il se donner la peine de les appliquer, faute de quoi, ce ne serait que purs sophismes juridiques qui ne feraient qu'ajouter du flou au flou…