La Chine n'a pas fini d'étonner. Selon la dernière révision de ses statistiques, elle pèse désormais plus lourd que la France et l'Italie et devrait rapidement s'imposer comme la quatrième économie mondiale derrière les Etats-Unis, le Japon et l'Allemagne. La dernière mise à jour de ses statistiques, publiée mardi dernier, fait état d'une réévaluation du PIB chinois de l'année 2004 de l'ordre de 1971 milliards de dollars contre 1650 milliards de dollars publiés précédemment. La réévaluation est d'autant plus surprenante qu'elle voit le PIB chinois en 2004 grossir d'environ 17,5% d'un coup, supplantant ainsi l'Italie sur la sixième marche des pays les plus riches. Avec ces chiffres, la Chine révèle enfin ses richesses cachées et confirme les prévisions des économistes. Les statistiques publiées auparavant par Pékin étaient approximatives du fait qu'elles aient été établies sur des informations transmises par des autorités locales qui mettaient un point d'honneur à se faire bien voir, donc surévaluées. Le sachant et pour compenser, Pékin les sous-évaluait, mais manquait ainsi de fiabilité. Pékin a, par ailleurs, oublié de prendre en compte les millions de petits commerces et autres entreprises de services dont la croissance est exponentielle. Le secteur privé, qui représente maintenant un tiers de la richesse nationale, est, de fait, beaucoup plus difficile à estimer que le secteur public de l'époque de l'économie planifiée. Par souci de connaître les véritables évolutions du pays, les autorités chinoises ont donc lancé un grand recensement, opéré pendant une année par une équipe de plus de 10 millions de statisticiens et de volontaires. Durant plusieurs mois, ces enquêteurs ont fait du porte-à-porte auprès des PME du secteur privé, soutenus par une campagne de propagande intitulée « Le recensement économique est bon pour l'harmonie de la société ». « La statistique révisée montre que la structure économique chinoise est plus raisonnable et saine que le faisaient apparaître les chiffres précédents », a souligné aux journalistes le patron du bureau de la statistique, Li Deshui. La Banque mondiale, dont l'une des missions est de veiller à la compatibilité des statistiques nationales, a salué les nouveaux chiffres du BNS avec une prudente réserve. « Ils sont nettement meilleurs que les précédents », disait Bert Hofman, chef économiste de la banque à Pékin. Cette évolution signifie aussi que la Chine devrait, selon les spécialistes, avoir moins besoin d'une croissance industrielle effrénée - et de la demande toujours plus forte en matières premières et en énergie qui va avec - pour maintenir le taux de croissance global de son économie à plus de 9%, comme sur les trois dernières années. Le PIB chinois reste encore loin de celui des Etats-Unis (11 668 milliards de dollars) ou du Japon (4624 milliards de dollars), mais cela n'empêche pas des pays comme la France et la Grande-Bretagne de s'inquiéter. Les économistes français se consolent en disant que « le géant économique reste un nain en matière de justice sociale ». D'autant, soulignent-ils, que la croissance chinoise s'appuie essentiellement sur une main-d'œuvre peu qualifiée, mal payée et remplaçable à merci, constituée d'ouvriers migrants sans sécurité sociale, sans liberté syndicale, travaillant en moyenne 50 heures par semaine.