La Russie et l'OTAN sont toujours en désaccord sur l'interprétation de la résolution 1973 de l'ONU qui a autorisé les raids aériens contre le régime du Mouammar El Gueddafi. «Pour l'instant, nous n'avons pas la même vision que l'OTAN sur la manière de mettre en œuvre cette résolution», a déclaré, hier, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, lors d'une conférence de presse animée à Sotchi. Cette déclaration a été faite en marge d'une réunion du conseil OTAN-Russie. Bien qu'important, ce désaccord n'empêche toutefois pas l'OTAN de poursuivre ses frappes contre les installations des forces loyales au colonel El Gueddafi et d'alimenter en armes les insurgés libyens. Et tout porte à croire que la chute du guide libyen est proche. Et les vraies-fausses remontrances des Russes n'y changeront rien. Mais pour donner certainement l'illusion que Moscou se préoccupe du sort des Libyens, le président russe, Dmitri Medvedev, a accepté de rencontrer le même jour – dans la ville où se tenait la rencontre Russie-OTAN – son homologue sud-africain, Jacob Zuma. Le chef de l'Etat sud-africain s'est, bien entendu, rendu en Russie dans le but de tenter de convaincre ses «amis» russes d'user d'un peu plus de leur influence pour donner la chance à une solution politique d'aboutir en Libye. De nombreux observateurs avaient misé sur le fait que MM. Zuma et Medvedev allaient faire une déclaration commune, appelant l'OTAN à cesser ses raids aériens contre le régime El Gueddafi. Mais jusqu'à hier, tard dans la soirée, aucune déclaration allant dans ce sens n'avait été rendue publique. Ce qui confirme quelque peu que la politique des Russes consiste à ménager le chou et la chèvre dans le cas du dossier libyen. L'Afrique du Sud avait, rappelle-t-on, annoncé dimanche, la visite en Russie de son président. Ce déplacement intervenait au lendemain de la tenue du 17e sommet de l'Union africaine durant lequel l'organisation a adopté un texte qui doit servir de base à des négociations futures entre les parties libyennes. Ce texte prévoit d'écarter le colonel Mouammar El Gueddafi des négociations tout en refusant d'appliquer le mandat d'arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) contre le dirigeant libyen pour crimes contre l'humanité. En outre, le document n'appelle pas explicitement le colonel El Gueddafi à céder le pouvoir. Il prévoit par ailleurs le déploiement d'une «force de maintien de la paix». Peu de chances, néanmoins, pour que ce texte de sortie de crise fasse long feu. Aussitôt rendu public, les rebelles libyens se sont empressés en effet de le rejeter. Pas plus loin qu'hier encore, le chef du Conseil national de transition (CNT) a rappelé qu'il n'y avait «aucune chance, actuellement ou dans l'avenir, pour qu'El Gueddafi reste en Libye», tout en reconnaissant qu'une telle offre lui avait auparavant été soumise. De son côté, Mouammar El Gueddafi, au pouvoir depuis 42 ans, répète à l'envi qu'il ne cédera pas à la pression militaro-diplomatique. Son fils aîné, Mohamed El Gueddafi, a accusé hier des pays occidentaux d'avoir envoyé des commandos à Tripoli pour «éliminer physiquement» le colonel. Ces derniers développements démontrent qu'une solution politique, susceptible d'agréer les deux parties, n'est pas pour demain. La seule logique qui continue à s'imposer est celle des armes. La preuve : le port de Zouara et des points de contrôle civils dans cette ville située à 120 km à l'ouest de Tripoli, ont été une nouvelle fois bombardés, hier à l'aube, par les avions de l'OTAN. L'information a été donnée par la télévision d'Etat libyenne, qui a fait également état de morts et de blessés. «La coalition atlantique, croisés colonialistes, a bombardé des sites civils, notamment le port de Zouara et des points de contrôle sur la route côtière de cette ville, faisant des martyrs et des blessés», a indiqué la même source. L'agence officielle libyenne Jana a indiqué pour sa part qu'un raid «croisé» avait visé, lundi matin, des points de contrôle à Bani Walid, à 180 km au sud-est de la capitale libyenne, «faisant plusieurs morts et blessés». La télévision libyenne a dénoncé une «guerre d'extermination» et des «crimes contre l'humanité» commis par l'OTAN en Libye. L'OTAN a indiqué, de son côté, avoir visé, la veille, trois véhicules armés dans la zone de Zouara.