Le pessimisme dominera, pour quelques années encore, les économies des pays arabes qui se sont mis à valser depuis environ six mois déjà au rythme de la révolution. Certes, les retombées des événements que connaît le monde arabophone «seront positives sur le moyen et long termes en raison de l'instauration de règles démocratiques dans les sphères économiques et sociales», mais à court terme, les inquiétudes sont sérieuses. La Tunisie, l'Egypte ou encore la Libye auront une réelle épée de Damoclès au-dessus de leur tête avec, sur le tableau du bord, des voyants carrément au rouge : «Baisse de la croissance et hausse du chômage», une crainte parfaite, selon Camille Sari, expert financier international. Les premiers signaux de la crise sont déjà là, d'après le même analyste, contacté par nos soins. «Les révolutions tunisienne et égyptienne et les manifestations dans les autres pays du Maghreb sont à l'origine de la dégringolade de l'afflux des touristes français en Tunisie, au Maroc et en Egypte de respectivement 80%, 40% et 88%.» Ces pays vont encore devoir boire le calice jusqu'à la lie, du moins pour les quelques années à venir. Pour le cas de la Tunisie, à titre d'exemple, le gouverneur de la Banque centrale de ce pays avait prédit que le taux de croissance du PIB devrait se situer entre 0 et 2%. Des pays lourdement endettés Le nombre de demandeurs d'emploi a dépassé déjà 700 000 contre 500 000 il y a quelques mois. La nouvelle patronne du FMI, Christine Lagarde, aura à gérer, entre autres, ce coût très onéreux de la révolution arabe, dont les premiers besoins exprimés par la Tunisie et l'Egypte flirtent déjà avec les 45 milliards de dollars. La situation paraît beaucoup plus complexe pour la Libye, dont l'économie tient à la seule mamelle du pétrole, à l'image de la structure économique algérienne qui branle lamentablement dans le manche. «Les émeutes dans plusieurs villes algériennes et la crainte d'un remake d'Octobre 1988 ont incité les autorités algériennes à injecter près de 45 milliards de dollars sous forme d'augmentation de salaires, de subventions à l'Ansej (dont les résultats seront fort maigres) et différents dispositifs de soutien aux prix de base», fait remarquer Camille Sari. Ces mesures, d'après l'expert, sont semblables à des «dérapages nuisibles à long terme et qui ne feront que retarder une explosion sociale». Même si le pays dispose d'un matelas financier confortable et d'une dette externe non pesante, «l'épuisement prévisible et certain des ressources minières, gazières et pétrolières pourrait, néanmoins, faire rechuter l'Algérie avec des conséquences dramatiques si des réformes profondes ne sont pas prises», avertit Camille Sari. Mais le coût de la révolution arabe ne semble être qu'une goutte d'eau pour la nouvelle patronne du FMI. Pour Camille Sari, Mme La grande «ne fera pas mieux» que Dominique Strauss-Kahn. «Sa marge de manœuvre sera réduite», pense-t-il. Selon lui, les trois dossiers qui marqueront le mandat de Christine Lagarde sont la réforme du système monétaire international, la régulation de la finance internationale et l'accompagnement des pays lourdement endettés. Elle a du pain sur la planche.