Il est 18h30. Le seul restaurant opérationnel pendant les vacances d'hiver à la résidence universitaire garçons de Hasnaoua n'a pas encore ouvert. Les étudiants qui ont formé deux files d'attente à l'extérieur s'impatientent et commencent à taper fort sur la porte d'entrée en appelant les travailleurs à entamer le service. A l'intérieur du restaurant, deux autres files se sont déjà formées depuis une demi-heure. Ce sont des étudiants qui bénéficient du privilège de l'accès direct à la restauration sous prétexte qu'ils sont en fin de cycle ou en post-graduation. A l'intérieur de la cuisine, il règne une véritable anarchie. Des personnes étrangères au service et qui se font passer pour des travailleurs remplissent leur sac en pain, boîtes de yaourt et de fromage, un menu destiné aux résidants suite à une interruption de l'alimentation en gaz de ville. La plupart d'entre eux sont des ouvriers du bâtiment jouxtant l'UMMTO, ou viennent carrément des différents quartiers de la nouvelle-ville de Tizi Ouzou. Les responsables du restaurant de Hasnaoua sont dépassés, remarque-t-on. Au milieu d'une chaîne, une bagarre éclate. Ce sont deux extra-universitaires qui ont tenté de rejoindre leurs amis, sans demander l'avis des étudiants. L'intervention des agents de sécurité n'a pas dissuadé ces extra-universitaires qui les ont menacé avec des couteaux. « Ce genre d'actes d'agression et de menace à l'encontre des travailleurs et des étudiants fait partie de notre quotidien depuis l'année 2001. Nous avons alerté tous les responsables qui sont restés sourds à nos problèmes », dénonce un cuisinier recruté dans le cadre de l'emploi des jeunes, se désolant de la passivité des responsables de l'université. Ces scènes au restaurant universitaire de Hasnaoua ne reflètent qu'un aspect de l'amère réalité dans laquelle baignent les étudiants et travailleurs de l'UMMTO, confrontés aussi à d'autres difficultés, comme la saleté des pavillons, le manque flagrant en eau, l'absence de chauffage dans la plupart des chambres et les coupures fréquentes du courant électrique, notamment en période d'examen. Selon nos interlocuteurs, la dégradation des conditions de vie des étudiants touche la quasi-totalité des résidences universitaires de l'université de Tizi Ouzou. La communauté estudiantine et le collectif des travailleurs envisagent de lancer un large mouvement de protestation dans les prochains jours.