La boulimie des uns et des autres, la canicule et le spleen culturel, tels sont les faits saillants du Ramadhan du côté d'Aïn El Fouara, où l'activité économique, sociale et culturelle fonctionne au ralenti. A l'instar des autres régions du pays, la cherté de la vie a, durant les premiers jours du jeûne, atteint des pics. La flambée des prix des fruits et légumes a porté un sacré coup au budget des petites bourses qui ne savent où donner de la tête. Produit de base pour la confection de l'incontournable chorba frik, le prix de la tomate a frisé les 100 dinars le kilogramme. Le sachet de lait qui se fait désirer est cédé à plus de 30 dinars le sachet. Ces exemples ne sont en vérité que des échantillons d'une situation pas facile à gérer pour des ménagères déboussolées. Pour concocter un petit f'tour, les petites et moyennes bourses doivent le plus souvent faire avec le système «D». «En plus de nos économies, nous sommes parfois obligés de nous endetter pour boucler le mois de Ramadhan qui intervient juste avant la rentrée scolaire à l'origine d'autres grandes dépenses. La voracité de ces marchands, ne se souciant guère de la situation financière de leurs concitoyens à bout, n'a apparemment pas de limites. L'incapacité des services de contrôle à atténuer la boulimie de ces commerçants mettant à profit ce mois de piété pour augmenter leurs gains, accentue la galère des démunis se contentant dans le meilleur des cas d'une chorba avec des miettes d'un poulet payé à 300 dinars le kilo», diront en chœur de nombreux citoyens rencontrés au niveau du marché des 1014 logements où l'informel et les gardiens de virtuels parkings font la loi. Prévenus pourtant sur les dangers encourus, certains consommateurs se rabattent sur le poisson, la viande et la viande hachée congelée conservée dans des conditions qui laissent à désirer. Faisant en pareille période de bonnes affaires les pâtisseries et marchands de zlabia grincent quelque peu les dents : «Par rapport à l'année dernière, nos ventes ont baissé de plus de 40%. L'affluence de ces dernières années n'est plus d'actualité. La crise pousse les gens à modérer leurs dépenses», dira un pâtissier du centre-ville déserté durant la journée. Animation nocturne La dégradation du pouvoir d'achat d'une partie de la population influe sur le mouvement en ville «altéré» en outre par une chaleur torride. Le mercure qui oscille entre 30 et 35° C oblige les gens à se terrer chez eux durant la journée. Ce facteur qui s'ajoute à la soif et la faim, augmente la nervosité du Sétifien près à en découdre à tout moment. D'ailleurs, il ne se passe pas un jour sans son lot de bagarres au marché et dans la rue. Pour un oui ou un non, un combat de boxe éclate au milieu de la chaussée. A cause de la mauvaise humeur de ces faux jeûneurs, la circulation routière est tout bonnement bloquée. A la tombée de la nuit, la cité retrouve une certaine effervescence. Après le f'tour les rues des divers coins de l'agglomération sont bondées de monde et de véhicules. Le stationnement devient impossible en de nombreux endroits, tout comme la circulation automobile sur un réseau congestionné. Ce problème, qui n'offusque pas outre mesure la commune et la direction du transport qui ne font rien pour concocter un nouveau plan de circulation de la ville, indispose les «Mig» de la cité. Prenant leur mal en patience, ces derniers mettent du temps pour parcourir des centaines de mètres. Après les taraouih, la circulation atteint son pic. Les embouteillages se forment ici et là. A défaut de soirées culturelles et artistiques pour meubler les soirées du mois sacré, les fêtards souhaitant passer une bonne partie de la nuit dans un café à discuter ou disputer des parties de jeu de cartes ou de dominos sont obligés à faire la ronde pour pouvoir garer leurs véhicules. Une fois à table, le premier sujet de discussion tourne autour des dernières nouvelles de l'Entente, qui demeure l'une des principales attractions d'une grande partie des Sétifiens à l'affût de la moindre information relative à leur équipe qui a subi une grande saignée cet été. La chaleur du jour, la flambée des prix, la dégradation du cadre de vie de la cité, la question relative au lancement du nouveau programme du LPA (logement promotionnel aidé) en vogue du côté d'Aïn El Fouara, sont les autres principaux sujets de discussion des noctambules de l'antique Sitifis déparée par ces restaurants à ciel ouvert. Le silence radio des gestionnaires de la cité faisant mine de ne rien voir ou sentir, a donné des ailes à certains «restaurateurs» installant à chaque coin de rue des barbecues où l'on propose des grillades n'ayant, faut-il le rappeler fait l'objet d'aucun contrôle. En plus de la fumée dégagée et de la perturbation de la circulation, la santé des insoucieux consommateurs est le moins qu'on puisse dire menacée. Aidé par l'impunité, ce «commerce» se transforme en rituel depuis trois ou quatre Ramadhan. Il est caractérisé cette année par une morosité culturelle, la cherté de la vie et la sortie de la municipalité qui a exigé des bénéficiaires des 3300 dinars du couffin du Ramadhan une montagne de documents …