Il est loin le temps où des quartiers offraient un décor verdoyant, fait de maisons éparses construites en pierres taillées et caractérisé par l'odeur du jasmin et du pin. La rue des Jardins, autrefois quartier huppé de la ville, perd de son éclat d'antan et se résigne à supporter les miasmes de toutes ces structures et instances officielles affectées par des maux où la contagion est encouragée par les tenants du «Que veux-tu que je fasse ?». Les gens qui y habitent sont devenus par la force des choses casaniers et peu prolixes à cause de l'apparition d'une faune de marginaux qui débarquent des quartiers de la périphérie pour s'approvisionner en psychotropes auprès de dealers inconnus. L'absence de l'éclairage public réduit à néant la visibilité dans certains endroits de la cité et encourage ainsi d'autres groupes à y élire domicile. «Je suis né dans ce quartier et je vous assure qu'il m'arrive très souvent d'appréhender le passage par certaines ruelles sous peine d'être agressé», nous confie un résidant. La rue des Jardins n'échappe pas non plus à l'insalubrité et à la prolifération des chiens errants, devenus partie prenante du décor. «Au petit matin, ces meutes deviennent agressives et j'ai moi-même été victime de morsures», lance un autre habitant de cette rue. Au prolongement de celle-ci, la cité Ghellouci, n'offre plus ce décor verdoyant fait de maisons éparses construites en pierres taillées et caractérisé par l'odeur du jasmin et du pin, le goût des framboises abondantes, le chant des chardonnerets et le contact avec la nature agissant sur les cinq sens. L'irréversible avancée du béton y a fait des ravages, et une décennie aura suffi pour transformer une potentielle zone d'extension urbaine en un conglomérat de béton, ceinturé par des baraques et autres constructions illicites. Les immondices y jonchent le sol à longueur d'année, les fuites d'eaux y son abondantes et la poussière se transforme dans certains endroits en nuées grises. Sur le lit d'une rivière desséchée, des bâtisses ont été érigées dans une anarchie indescriptible. Des avaloirs, des trottoirs, des chaussées, des réseaux de canalisation d'eaux usées y ont été éliminés au profit de plusieurs extensions réalisées au vu et au su de tous les responsables locaux. «Des routes entières ont disparu du côté du prolongement bis de la rue des Jardins, éliminant du coup une voie d'accès à la partie nord de la ville», signale Abdelhamid. Non loin et en contrebas de la ligne ferroviaire, un autre constructeur squatte l'espace de sécurité et entame de gros travaux. Une fosse béante et un début d'affaissement sont visibles le long de deux mètres en dessous de ladite ligne. En prenant le chemin du retour, la rue des Ecoles vous choque par le boucan et le nombre impressionnant de vendeurs ambulants. Femmes et hommes se bousculent dans ce marché informel où tout se vend. Voleurs à la sauvette, vendeurs à la criée, dragueurs novices et expérimentés, automobilistes, cyclistes, agresseurs et filles de joie y trouvent leur lieu de prédilection, et ce sont les habitants de cette rue, naguère, un havre de paix, qui en pâtissent. Ceci est aussi valable pour plusieurs autres rues et cités résidentiels de la ville.