«Le festival-institut». Mercerdi soir au Théâtre national Mahieddine Bachtarzi (TNA), Mourad Zirouni a eu le mot juste pour qualifier le Festival national culturel de la chanson châabi qui est déjà à sa sixième édition. Jusqu'au 23 août courant, les trente finalistes de ce festival vont se produire deux fois, d'abord au TNA, ensuite à l'espace Fadila-Dziria, au théâtre de plein air de l'Institut national supérieur de musique (INSM) à Alger. «C'est une manière de leur donner une seconde chance», a précisé, lors de la cérémonie d'ouverture, Abdelkader Bendamèche, commissaire du festival. La manifestation est, pour rappel, organisée sous forme de concours. Les finalistes viennent cette fois-ci de Bouira, Aïn Defla, Boumerdès, Alger, Blida, Béjaïa, Tipasa, Mostaganem, Sétif, Souk Ahras, Chlef, Annaba, Jijel, Tizi Ouzou, Skikda, Oran et Constantine. Les candidats seront notés sur les possibilités vocales, la mémorisation des textes, la maîtrise de l'interprétation et du rythme et l'authenticité du texte et de la mélodie. Une douzaine de prix seront accordés aux meilleurs interprètes. Le montant des distinctions varie de 30 000 à 300 000 DA. Les cinq premiers auront la chance d'enregistrer un album dans un studio professionnel et faire une tournée à travers le pays. Le jury est présidé par Boudjemâa El Ankis, l'un des maîtres du châabi, Rezkallah Abdallah, chef de l'orchestre de la Radio nationale, Toudjine Bouasria, Mohamed Touzout, Nacerdine Baghdadi, Mohamed Hmaïdia, Dahmane Aïssaoui, chercheurs dans le domaine du patrimoine chaâbi, Youcef Toutah, chanteur chaâbi et Tahar Ben Ahmed, compositeur et ex-chef d'orchestre de la Radio nationale. Parallèlement aux spectacles, des débats sont organisés à la salle Bokhari Moghari de l'INSM, chaque jour à 12h30. Ils sont modérés par Fateh Imloul. Mercredi, Abdelkrim Amimour a abordé la théorie et la méthode dans l'interprétation du châabi. Mohamed Hamaïdia a évoqué hier la poésie melhoun et ses composantes. Demain, Amine Delaï Ahmed et Mohamed Touzout débuteront de la poésie melhoun, «passé et présent». Nacereddine Baghdadi reviendra dimanche sur l'histoire du chaâbi alors que Abdelkader Bendamèche clôturera le cycle de conférences avec une communication sur «le savoir et les connaissances dans le patrimoine musical châabi». Et le spectacle continue... Les candidats assistent à ces débats. Cela est considéré aussi comme une complément de formation. Abdelkader Bendamèche a rappelé que des journées d'étude sur le châabi ont été organisées en mars et en juin à Béjaïa, Jijel et Constantine. «Nous allons continuer ce programme dans d'autres wilayas de l'ouest du pays en octobre et en novembre de cette année. C'est la traduction sur le terrain de l'un de nos principaux objectifs qui est celui de la connaissance et du savoir qui demeure notre leitmotiv», a-t-il expliqué. Mercredi soir, la soirée a commencé avec une intro de l'orchestre, El Hamam li oualeftou, suivie par une zorna aux rythme de Rana djinek, la chanson de lancement des mariages dans l'Algérois et à Blida immortalisée par Meriem Fekkaï. Les lauréats des cinq précédentes éditions du festival ont ensuite animé la soirée inaugurale. Mohamed Réda Charaf d'Alger a repris à sa manière Emchi ya rassoul and el lahbib, chanté habituellement en insraf dans le mode andalou, avant d'enchaîner avec Lakytouha fi. Abdelhak Bourouba a, lui, repris la qcida, Jinek ya al qadi : «Ô qâdi, arbitre le différend qui m'oppose à ma belle qui m'a laissé pleurant, l'esprit égaré et ma demeure déserte j'en suis inconsolable. Nous voilà devant toi, ô qâdi : juge-nous équitablement.» Des paroles parmi les plus célèbres du chant châabi. Après un léger Inkounta achik, Abdelhak Bourouba a laissé sa place au jeune Youcef Benyeghzer, lauréat de l'édition 2008, qui a interprété un mdih, Essmou fel jena Belkacem. Zoheir Aït Kaci a, lui, aussi choisi le mdih avec Chach kelbi el Mekka, des paroles mises sur la mélodie de Masbani ou da akli ghir boussalef Meriem. Mourad Zediri, qui a été sacré meilleur chanteur du festival en 2010, est resté sur la même lancée avec Dhikr sbab koul khir. La fidélité de Mourad Zediri à l'école ankaouie a plu au public présent. La jeune Lamia Batouche de Mostaganem, lauréate de la Star academy «Alhan oua chabab» de l'ENTV en 2009, a, elle aussi, suscité beaucoup d'applaudissements. Adepte de l'école andalouse de Tlemcen, Lamia Batouche a interprété Moul el Mekka ou el Madina avant de continuer avec Allah ya moulana. Abdelkader Chaou est monté pour clôturer la soirée. Il a commencé avec A mersouli di slami, une qcida de Mbarek Essoussi. A la demande du public, l'artiste a repris l'un de ses chansons les plus connues : El Casbah ouana wildha ou la sar essir qui se veut un hommage à Alger, à la Citadelle, aux quartiers Bir Djebah, Soustara, Zoudj Ayoun, Bab Ejdid, là où l'âme du châabi est toujours aussi présente, malgré les épreuves du temps. Et pour ne pas faillir à la tradition, Abdelkader Chaou a terminé son récital avec Loukan maakoum jat. Ce soir au TNA, Nacereddine Zaïma de Jijel sera l'invité. Avant lui, les candidats Larbi Hania Halima, Tsabsat Anour, Lounici Abdelrazak, Bouihi Sonia, Chaouch Tahar, Goual Abdelkader passeront sur scène pour une interprétation d'une quinzaine de minutes pour chacun d'entre eux. A l'espace Fadila Dziria, les chanteurs El Hadi Rahmouni et Mustapha Boutchiche seront les invités de la soirée de vendredi. A noter enfin que le sixième Festival culturel national de la chanson chaabi rendra hommage aux regrettés Abdelkader Guessoum, Abdallah Guettaf et Abdelmalek Imansourène.